Namur : Â ! li Parlèmint ! Le curé de la messe en wallon se moque gentiment du prix des fauteuils des parlementaires (photos)
Pas de fiesses réussies sans la messe des Wallo du lundi. L’incontournable moment de communion où la truculente langue wallonne excelle dans l’art consommé d’imager la bêtise humaine, dont la vantardise. Elle est même imbattable.
- Publié le 19-09-2023 à 07h40
- Mis à jour le 19-09-2023 à 16h09
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L’église Saint-Loup est pleine à craquer en ce lundi des Wallo, ce dont personne ne s’étonne plus. La messe en wallon du lundi matin, c’est the place to be pour tout qui gère la cité et la Wallonie, si on peut se permettre l’incise de quelques mots tirés de la langue de Shakespeare pour synthétiser ce moment de ferveur et d’allégresse 100% wallon.
L’auteur du prétchemint, Bernard Van Vynckt, curé de la messe en wallon et doyen de Marche, profite de cette tribune par tradition très écoutée et acclamée, comme Paul Malherbe avant lui, pour asticoter les décideurs politiques et balancer avec humour quelques faits de l’actualité lui semblant tourner di truviès, incongrus ou absurdes.
"Quand on m’a demandé de prendre la succession de Paul Malherbe, on m’a dit: sois libre et va dans le même ton. C’est bien ce que j’essaye de faire", rappelle-t-il, sitôt sorti du chœur en s’épongeant le front. Car, en ce lundi matin, les marbres de Saint-Loup, vaisseau d’architecture baroque, ruissellent de la lumière d’une fin d’été rêvée.
Qu’est-ce qui ne va nin au pays wallon ? C’est surtout au parlement que le prêcheur a trouvé de la matière à se marrer gentiment, à coups de boutade. Il faut dire que la Wallonie politique est assez douée quand il s’agit de donner des bâtons à l’opinion publique pour se faire battre.
"Ah, le parlement wallon !" Â ! li Parlèmint ! Sous-entendu, quelle bastringue. Quelle farce ! Et que de surréalistes histoires de dérapages budgétaires, que de pataquès foireux, il n’alimente pas. Malheureusement, avec l’argent de tous les wallons, c'est beaucoup plus facile de fauter. Sans abuser de l’anglais, le budget wallon, c’est "open bar".
"Je me suis laissé dire que le greffier – (ce super fonctionnaire interminablement suspendu faisant craindre à l’un de ses subordonnés qu’il pourrait finir à la morgue, rien que ça) – avait mis un avis sur la porte d’entrée afin d’avertir les visiteurs: "Même si vous êtes pressés, quand vous serez assis, il vous faudra vous retenir pour lâcher un ‘pet’trop puissant, peur de faire un trou dans le revêtement des fauteuils ! Au prix où ils ont coûté ! Il paraît qu’il n’y a plus d’argent pour les remplacer !" Référence très explicite au mobilier de luxe acheté 2,35 millions dans le cadre d’un marché public entaché, en sus, de soupçons de favoritisme en faveur d’une société namuroise. Là, c’est le bouquet, et il n’est nin bia.
Pisser l’Meuse




En wallon dans le texte, ça a encore plus de saveur. C’est le boké do prétchemint qui fait s’écrouler de rire l’assemblée. "Minme si v’s-avoz ausse au-d’là, i v’faurè rastinu d’lachî one trop grosse vèsse quand v’s-sèroz achî, peû d’fé on trau dins l’gârniture ! Au pris qu’on-z-a payî lès fauteuls, vos-ôtes ! I parèt qu’i-gn-a pupont d’caurs po lès candjî !"
Les charmes discrets de nos intestins feront décidément toujours bien rire.
Il y a encore une catégorie de djins que la langue wallon aime tourner en ridicule, à lire le nombre d’expressions réservées à ce défaut humain largement répandu, et aggravé par les réseaux sociaux: ce sont les vantards. De bons clients. "Ils se prennent pour le roi de Prusse" ou, variante gazeuse: "Ils veulent péter plus haut que leur cul et ils se font un trou dans le dos." Une autre encore, de veine plus agricole: "Ils se prennent pour le roi des veaux et ils ne sont même pas celui des cochons". Et ne pensez pas que je dis cela parce que je suis de Meux (La Bruyère)", s’amuse Bernard Van Vynckt. Enfin, il cite un plus grand exploit dont se ferait fort de réaliser le champion toutes catégories des crâneurs et frimeurs: "Pisser l’Meuse".
Il est truffé de perles comme ça, le wallon, que le français ne peut pas égaler. C’est sa force et sa beauté, et une bonne raison de le perpétuer et de l’apprendre dans les écoles. "C’est son côté arsouille. Je le dis, mais je ne dis rien. En français, on ne pourrait pas le faire."