Fosses : entre la cité de Feuillen et Orbey, une belle route à 410 bornes
Fosses-Orbey: 410 km. La route est si bien tracée, aiguillonnée par une inoxydable amitié, que les voitures s’y rendent toutes seules, dans les deux sens, sans GPS. En tout cas, aucun Fossois n’y a jamais perdu les pédales. Certains y sont même allés à pied. Entre ces deux bourgades, tout a commencé il y a 50 ans. Un demi-siècle pour les Fossois à partager avec des Alsaciens leur belgitude et leurs singularités. On vous résume cette idylle démarrée du Sud de la France.
Publié le 12-05-2023 à 13h45 - Mis à jour le 12-05-2023 à 13h47
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Ce mardi soir, on tombe en plein milieu d’une réunion du Comité du jumelage. Les Fossois débriefent leur festif déplacement à Orbey, la ville jumelle, mi-avril. Un week-end pluvieux de printemps en terre française et alsacienne pour remonter aux sources d’une belle et improbable histoire franco-belge, se souvenir des pionniers qui l’ont initiée, des milliers de km joyeusement parcourus depuis 1973 et, en fin de compte, célébrer ce bonheur "saute-frontière" d’un long partage, 50 ans durant, de traditions, d’expériences et de saveurs.
Le président du comité, Géry Moreau, n’y était évidemment pas mais il débobine par cœur les circonstances singulières de l’étincelle ayant fait advenir ce jumelage parti de rien et devenu monumental.
En fait, géographiquement, ce jumelage de Fosses avec la ville alsacienne d’Orbey est parti d’un camping du Sud de la France, et d’une rencontre totalement fortuite entre une famille fossoise et une famille d’Hachimette, à quelques encablures d’Orbey. "C’était les vacances, quelque part dans les années 70, raconte le sémillant président. Sur sa parcelle, Nelly Brogniez, Fossoise, s’apprête à camper. Sa fille, Martine, a quelque difficulté à enfoncer en terre les piquets de sa tente et son voisin, un certain Roger Beterich, lui a proposé de l’aide."
Eh hop, le tour est joué dans la parcelle voisine. Voilà comment c’est parti, d’un coup de main, et comment, un beau jour de 1973, feu le bourgmestre de Fosses, Jean Romain, et le maire d’Orbey, Adelain Goffart, ont apposé leur signature au bas d’une charte, à Orbey. Comment une assistance offerte par un quidam étranger à ficher des piquets en terre, longtemps avant la disparition des francs et des frontières, a fini à tirer un trait d’amitié, et jeter un grand pont à double voie, entre Fosses et Orbey. Faut-il croire que ces deux villes avaient rendez-vous au cœur d’une Europe en construction. Ou que ce jumelage était inscrit dans les astres.
Un couronnement
Pour ce 50e anniversaire, les Fossois ont embarqué avec eux les truculents personnages d’une légende: celle de la Limotje. Au moins une "vache" en carton était dans les valises et son vétérinaire particulier figurait parmi les invités. Les Orbelais, eux, ont embauché un groupe de danseurs alsaciens de la ville de Kaysersberg pour divertir le banquet d’anniversaire. Soyons de bon compte, c’est plus les Limotches que les valses champêtres qui ont allumé les agapes.
Une délégation des pompiers de la zone de secours Val de Sambre a aussi embarqué.
Les retrouvailles, gourmandes, se sont déroulées en altitude, dans le cadre de la ferme-auberge Glasborn, spécialisées en plats alsaciens. On ne peut vous dire si de la choucroute ou de la tarte à l’oignon, les Spätzles ou le Bretzel, figuraient au menu.
Ils ont été quelque 120 Fossois à se rendre à Orbey pour souffler les 50 bougies.
Si le jumelage se vit chaque année, en groupe ou individuellement, les deux villes et les deux comités de jumelage se rencontrent tous les 5 ans pour réaffirmer les valeurs et perpétuer l’esprit de la charte fondatrice du jumelage.
Le dimanche 16 avril, lors d’une cérémonie plus protocolaire précédée d’un cortège, le bourgmestre de Fosses Gaëtan de Bilderling et le maire d’Orbey Guy Jacquey ont renouvelé solennellement les vœux dictés respectivement dans le Serment de la Charte de 1973. Ils ont proclamé, noir sur blanc, "que ce 50e anniversaire couronne les liens d’amitié qui se sont renforcés entre les habitants, et qu’ils espèrent les voir s’intensifier."
Une charte nouvelle donc, couverte de signatures.
Dans son discours, le président Géry Moreau a énuméré quelques-uns des échanges saillants qui ont émaillé cette longue route, laquelle a presque équitablement tracé son sillon entre les 20e et 21e siècles.
Ainsi, il y a environ 25 ans, une école primaire de Vitrival (Fosses) a délocalisé ses classes vertes à Orbey.
À plusieurs reprises, des équipes de pompiers fossois ont rallié Orbey à vélo, et par étapes, pour arriver la veille des grandes cérémonies quinquennales du jumelage.
Plus récemment, en 2018, un florilège d’artistes fossois a exposé ses toiles aux cimaises d’une exposition orbelaise célébrant ses as locaux du pinceau. Et on passe les nombreux tournois sportifs.
Enfin, Fosses, où les tambours résonnent de partout chaque été, a vu nombre d’Orbelais venir cligner des paupières devant ces tableaux napoléoniens chatoyants. Et, a fortiori, aucune septennale n’a déroulé son grand tour hors les murs sans Orbelais pour l’admirer passer.
Nous n’avons pas été témoin de cette effusion belgo-française à Orbey, riche en déclarations, bons baisers et poignées de main. Mais quelque chose nous dit que cette ligne d’amitié tirée d’un trait noir, qui a égrené d’un feutre rouge pléthore d’instants émouvants, n’est pas près de tirer à sa fin. Car, quand il y a un voyage aller, il y a toujours un retour. Cela nous a été dit lors de cette réunion de débriefing. L’an prochain, en mai 2024, les Fossois rendront la pareille à leurs jumeaux orbelais. Ce sera, à n’en pas douter, d’aussi chaleureuses retrouvailles, couronnées par 51 bougies sur le gâteau. "On ne peut pas encore fixer la date à cause des élections européennes. qui doivent aussi avoir lieu en mai. On attend."