Province de Namur: se préparer au retour progressif du loup
Le retour du loup en Wallonie est incontestable. Pour faciliter sa cohabitation avec les éleveurs, plusieurs solutions sont déjà en vigueur. Explications, au départ d’une conférence à l’UNamur.
Publié le 19-03-2023 à 17h10 - Mis à jour le 20-03-2023 à 11h16
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Disparu en Belgique à la fin du XIXe siècle, le loup s’apprête peu à peu à recoloniser nos contrées. Ces trois dernières années, deux meutes et un couple ont déjà été répertoriés, à l’échelle belge, sur trois territoires: Hechtel-Eksel (Limbourg), Hautes Fagnes (Malmedy) et Nord-Eifel, parc naturel à cheval sur la Belgique et l’Allemagne. "Dans le futur, il faudra indéniablement apprendre à vivre avec le loup", estime Alain Licoppe, coordinateur du Réseau Loup du SPW. Invité jeudi dernier, à l’UNamur, le coordinateur a résumé les enjeux du Plan Loup, établi par la ministre wallonne Céline Tellier (Écolo). Le tout en balayant quelques idées reçues.
Un retour naturel
Contrairement à une croyance populaire, le loup n’a pas été réintroduit par l’homme. Depuis l’exécution du dernier loup en 1861 dans les Hautes Fagnes, certaines micro-populations, issues de France et d’Allemagne, ont en effet fini par regagner notre territoire lors de leurs perpétuelles quêtes territoriales.
Dès 2016, une première attaque de loup contre un troupeau de moutons est signalée, à Samrée (La Roche-en-Ardenne). Deux ans après cette apparition remarquée, c’est la louve Naya qui s’installe en Flandre au terme d’un voyage de 700 km depuis son Allemagne natale. Cette migration vers le nord-ouest peut s’expliquer par l’augmentation, dès les années 70-80’, des surfaces forestières que compte la Belgique ainsi que la densité de gibiers comme ressources alimentaires.
Aussi en province de Namur
Capable de parcourir jusqu’à 70 km par jour depuis son lieu de naissance, l’intrépide animal peut aussi s’aventurer hors des espaces boisés. "Il n’est pas exclu de le rencontrer dans des lieux improbables, commente Alain Licoppe. En 2021, une attaque sur un troupeau de moutons a été observée, à Wanze, à proximité d’un internat de jeunes filles. Pourtant, il ne s’agissait pas d’un endroit intéressant pour le loup." Cette capacité à se mouvoir l’expose toutefois à un risque élevé de collision avec un véhicule, sa principale cause de mortalité en Allemagne.
La province de Namur n’échappe pas non plus au retour progressif du loup ! Observé d’abord en janvier 2020, à Assesse, l’animal s’est ensuite attaqué, trois mois plus tard, à un troupeau de moutons de Briquemont, à Rochefort. Cette commune a aussi fait l’objet d’un cas similaire l’an dernier, à Lessive, seulement un mois après la découverte d’une brebis gisant au sol, couverte de sang, dans un élevage condrusien (Ciney). L’ADN prélevé lors de ces trois attaques a prouvé qu’il s’agissait bien de l’œuvre d’un loup, issu de la lignée germano-polonaise.
Au sein du monde agricole, le loup peine encore à être accepté en raison de ses attaques en hausse contre des proies domestiques, principalement des moutons. Pour l’année 2022, pas moins de 76 attaques ont été référencées, soit une augmentation de 53% par rapport à l’année précédente. Sur ces 76 signalements, 26 ont été effectivement attribués au loup, une fois exclues les autres causes mortalité, comme les attaques de chiens par exemple.
Solutions pour une cohabitation harmonieuse
Le phénomène étant susceptible de s’amplifier, le Plan Loup 2020-2025 de la Wallonie prévoit quelques alternatives pour accompagner les éleveurs tout en protégeant l’animal. En zone de présence permanente, où au moins trois indices sont relevés durant deux hivers consécutifs, il existe déjà une subvention de 80% des frais de matériel, y compris pour la protection anticipative. Destinée aux propriétaires de troupeaux de minimum dix moutons, cette mesure facilite, entre autres, un renforcement et l’électrification de clôture existante. Tout agriculteur ou particulier peut également réclamer une indemnisation, auprès de la Région, en cas d’animaux tués ou blessés, analysés au préalable par un expert agréé pour éviter toute confusion possible. "En moyenne, une attaque sur deux est liée à un chien qui peut souvent être confondu avec le loup", souligne Johan Michaux, professeur et directeur du laboratoire Génétique de la Conservation, autre invité de la conférence de l’UNamur.
Étant le dernier pays à être colonisé par le loup, la Belgique a l’aubaine de pouvoir s’inspirer des plans déjà entrepris par les territoires voisins. De quoi espérer une cohabitation harmonieuse avec ce prédateur qui joue pourtant un rôle primordial dans la biodiversité, en régulant naturellement certaines espèces invasives.