Covid à Dinant: 3 mois très funèbres en 2020
Il y a trois ans, c’était le choc du premier confinement, le début "officiel" de la pandémie. Retour sur la période la plus critique du Covid avec un entrepreneur de pompes funèbres. Il se trouvait en première ligne.
Publié le 17-03-2023 à 00h00
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Yves Baonville dirige les pompes funèbres Willems-Leroy, à Dinant. À quelques pas de l’hôpital et de plusieurs homes pour personnes âgées. Il y a tout juste trois ans, le gouvernement décrétait le premier "lock-down", et c’était parti pour une période de crise intense, que l’entrepreneur a vécue en première ligne, avec son personnel et son fils Romain, qui travaille avec lui. Leur mémoire à tous est définitivement marquée par les périodes les plus intenses et les plus tragiques de cette pandémie.
Dès le départ, explique notre interlocuteur depuis sa base des hauteurs de Dinant, il en attribue le mérite à Romain, "on avait senti qu’il se passait quelque chose de grave". Bon flair, avec une commande immédiate de gel désinfectant, de salopettes, de charlottes et de visières. Il y avait encore moyen d’obtenir ce matériel. Plus pour longtemps. Il n’a fort heureusement pas fallu attendre l’approvisionnement par les autorités, sourirait presque Yves Baonville: "Tout a commencé en mars 2020 et en juillet, j’ai reçu un coup de fil d’un représentant du centre de crise provincial, m’annonçant que j’allais recevoir un pot de gel et un paquet de masques".
On avait déjà tout chez Willems-Leroy: "Romain avait préparé des kits avec tout le nécessaire pour une intervention, on jetait tout au retour, et d’autres kits étaient disponibles pour les prises en charge suivantes".
Des prises en charge, il y en a malheureusement eu beaucoup: "La période la plus catastrophique, ça a été lors de la deuxième vague, en octobre, novembre et décembre 2020. Chez nous, on gère généralement entre 25 et 30 décès par mois, on est passés à 53 en novembre de cette année-là. Ce fut pénible, surtout pour les familles. On a dû organiser des cérémonies dehors, sous une tonnelle, avec 5 personnes au maximum".
À Dinant, on avait à un moment parlé d’un moment de souvenir pour tous les disparus du Covid, une fois le calme revenu. Mais, dit Yves Baonville, "à ma connaissance, il n’y en a pas eu". Confirmation par le conseiller communal de la majorité Omer Laloux: "On avait imaginé de le faire lors de l’inauguration de Dinant Lumière, mais on a laissé tomber, car le sujet est trop sensible".
Sept prises en charge en un jour
C’est évidemment au sein des familles que cela a été le plus pénible: dans l’entreprise de pompes funèbre, on se souvient notamment de la mort des deux membres d’un couple, à une semaine d’intervalle. Ou d’un fils puis de sa mère, en une quinzaine de jours.
Dur aussi pour le personnel, ajoute Yves Baonville, mais ce dernier a résisté: "Comme à chaque fois qu’il y a une situation plus pénible, mon bureau est toujours ouvert, on en discute". Il n’en reste pas moins qu’il a fallu s’accrocher. "À un moment, j’ai pris quelques jours de repos. J’ai téléphoné à mon fils pour voir comment ça se passait. Il était 19 heures, il m’a raconté qu’il y avait eu 7 prises en charge dans la journée, qu’il avait été trois fois dans le même home le matin. Cette période a véritablement été catastrophique".
Encore des cas, notamment dans un home
Depuis lors, ça s’est heureusement bien calmé: "Depuis le début de cette année, on a eu deux décès avec Covid positif, mais sans savoir si c’est la cause du décès". Par ailleurs, Yves Baonville sait que dans l’une de maisons de retraite du territoire dinantais, pour l’instant, "il y a une bonne vingtaine de cas de Covid". Mais on est loin des périodes les plus critiques. "On a encore tout le matériel nécessaire, au cas où, en espérant ne plus jamais revivre ça. Celui qui dit que cela ne l’a pas touché, qui fait le king, ce n’est pas possible". Comme pour ranger définitivement cet épisode dans le passé, Yves Baonville a sur son smartphone une photo de son fils en tenue complète de protection. "Un souvenir".