Le soir du réveillon de l’an neuf avec les pompiers de Sambreville : après minuit, c’est parti, on bosse
Chez les pompiers, le soir du réveillon de l’an neuf amène toujours son lot de misères liées à l’abus d’alcool. Mais cette année, il y a eu une cerise sur le gâteau: une rave party.
Publié le 01-01-2023 à 21h00 - Mis à jour le 01-01-2023 à 22h15
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Dans le réfectoire, ils sont une douzaine d’hommes à prendre un soft autour de plats de chips disposés sur une nappe rouge en papier. Une guirlande lumineuse fait briller un sapin. Il est passé 20 h. Les routes sont désertes et la température, de 14°, se confond avec celle d’un soir de printemps belge ou d’un soir d’hiver espagnol. Ils sont presque au complet, pompiers et ambulanciers volontaires et professionnels dont un officier de garde, le lieutenant Mehdi Akal.
C’est le calme avant la tempête. "Sûr à 100 %, on va bosser", tranche le sergent Romuald Demeure. Ils ont pris leur service ce samedi à 6 heures du matin et le termineront 24 heures plus tard. Une grosse journée au cours de laquelle, entre les missions, ils espèrent pouvoir disposer d’un peu de temps pour s’allonger et fermer les yeux.
Alors que la soirée du réveillon commence, traditionnellement marquée par des excès d’alcool, ils ont déjà bien bossé: 11 missions pompier, au-dessus de la moyenne, et 12 missions ambulance. Les premières ont à voir avec une météo de tempête: des arbres arrachés et couchés sur la route, des gouttières décrochées, des caves à vider. À Moustier, une chute d’arbres a sectionné un câble électrique et privé de courant toute une rue.
"À présent, ce n’est plus le vent qui nous inquiète mais les comportements des gens", appuient-ils. Par expérience, ces secouristes savent qu’ils vont trouver, au rayon des faits divers, des intoxications alcooliques, des disputes dégénérant en bagarres et, à une heure plus avancée de la nuit, des retours de fête chaotiques finissant en tôles froissées et en blessures graves. Les ambulanciers savent que c’est surtout eux qui vont trinquer. Bizarrement, à regarder de plus près les statistiques, des deux réveillons, celui de la douce nuit de Noël est le plus agité et le plus émaillé d’incidents ou de drames, très loin de l’univers débonnaire du petit papa Noël déposant des cadeaux sous le sapin.
Un cœur battant à 225
L’apéritif se clôture. Tous ces hommes de service se dispersent dans le magnifique arsenal à deux niveaux de la rue de la Vacherie, parce qu’il y a toujours à y faire en termes de maintenance et d’entretien. Mais ils reviendront tout à l’heure dans le réfectoire pour partager un repas sans chichis, une raclette ou une fondue bourguignonne, facile à préparer et qui peut surtout s’interrompre à tout moment et puis reprendre. Il manque toujours bien l’un ou l’autre convive. Ce grand soir de l’an, une seule dame figure au rôle, Amina, ambulancière. L’interphone résonne via l’appel d’urgence 112. Un départ pour un transfert de patient d’Auvelais à Mont-Godinne. Plus tôt, la jeune femme et son collègue sont intervenus pour une douleur thoracique sans gravité et, plus tard, pour un homme affichant une dangereuse fréquence cardiaque de 225.
À minuit, ceux qui ne sont pas encore sur le terrain se souhaitent une bonne année autour d’un soft. Un seul homme ne bouge jamais: c’est le centraliste, le dispatcher. Ce soir de Nouvel An, c’est Fabian qui se colle aux téléphones et aux écrans.
1 h 30: comme attendu, ils se sont çà et là égayés dans la nuit pour des feux d’artifice qui ont allumé des broussailles. Quand, soudain, la police les alerte que des fêtards, dans le cadre d’une rave party, tirent des fusées à proximité de l’entreprise Seveso Air Product. Pas très malin. C’est l’événement humainement explosif de cette Saint-Sylvestre. Un pompier ira s’y glisser pour raisonner quelques esprits sous influence de cette faune étrange.
De retour à l’arsenal, vers 2 h, le lieutenant Akal qui discute le coup s’interrompt. Pas de morts ni blessés graves jusqu’à présent. Juste ces milliers d’énergumènes aux neurones fondus et aux allures de Martiens en face desquels la police veille, impuissante. "Et si on prenait le dessert ?"