AMB Ecosteryl, l’entreprise montoise qui traite les déchets médicaux de l’humanité
Le coronavirus a provoqué un pic de déchets médicaux. Comment les traiter efficacement? Une entreprise montoise a trouvé une solution innovante, il y a 20 ans déjà…
Publié le 16-06-2020 à 17h23
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La crise du Covid-19 a mis en lumière une problématique à laquelle on prêtait jusqu’alors peu d’attention: la gestion des déchets médicaux.
Depuis le 15 mars, date où la crise sanitaire a débuté chez nous, les déchets médicaux ont bondi de 40 % en Belgique, indiquait au début du mois de juin l'entreprise de traitement des déchets Suez. A titre d'exemple, au plus fort de la crise, la consommation de masques chirurgicaux et de blouses avait globalement quintuplé au CHU Ambroise Paré de Mons. Et ces déchets, que deviennent-ils? Ils finissent tous brûlés à l'incinérateur de Thumaide.
Pourtant, il existe une alternative: le broyage et la décontamination des déchets par micro-ondes. Cette solution a été développée par une entreprise wallonne: AMB Ecosteryl. Cette société, qui a son siège et son atelier d'assemblage installé dans le parc Initialis à Mons, a fait la une des médias en mai dernier, grâce à un four de décontamination de masques.
Un appareil qui s’inscrivait dans le savoir-faire développé par l’entreprise depuis 20 ans, quand les Ateliers Mécaniques du Borinage, alors installés à Jemappes, décidèrent de réorienter complètement leurs activités dans le domaine médical.
Éliminer les déchets dangereux sans polluer
«La base de la recherche, c’était de trouver un système unique, écologique et offrant une solution durable et responsable pour l’élimination des déchets hospitaliers», explique Olivier Dufrasne, président de l’entreprise familiale. L’idée est de proposer une alternative à l’incinérateur et à l’autoclave (traitement par vapeur d’eau), deux procédés coûteux, économiquement et d’un point de vue environnemental . Leur solution prend le nom d’Ecosteryl.

Son principe est très simple: «passer d’un déchet dangereux et volumineux à un déchet au volume réduit de 80% et non dangereux.»
Pour y arriver, «la première étape consiste à broyer le déchet, afin de diminuer son volume de 80%. Quand il prend la forme d'un tas de confettis, on le chauffe par micro-ondes à 100 °C. Cette température est maintenue pendant une heure, ce qui garantit une décontamination totale du déchet, devenu plus stérile que n'importe quel déchet ménager.»
Cette technologie présente de multiples avantages. Un: elle n'engendre pas de combustion et n'occasionne aucun dégagement toxique. Deux: elle n'utilise que de l'électricité. Il n'a besoin ni de gaz, ni d'eau comme pour l'autoclave, de quoi épargner de coûteux traitements. Trois: cette technique est beaucoup moins lourde à installer: une surface plane et une prise électrique triphasée suffisent.
Enfin, quatrième avantage: la durée de vie. «Un autoclave vapeur, vous le gardez maximum 10 ans, après cela devient dangereux, c’est un peu comme une cocotte-minute. Nous, c’est de la mécanique, chaque partie de la machine peut être remplacée. Et notre première machine, qu’on a installée il y a 20 ans, tourne encore…»
Respect des normes les plus strictes
Celle-ci a été conçue pour un grand centre hospitalier parisien, ce qui a permis de mettre la barre d’exigences sanitaires au niveau maximal.
«Cette machine a été développée en fonction des normes françaises, les normes DASRI, qui sont les plus strictes dans le monde en matière de déchets hospitaliers. On s’est dit qu’en partant de là, nous pourrions nous étendre dans le monde entier, sachant que les normes peuvent être très variables d’un pays à l’autre.»

La société est ensuite devenue la première alternative au traitement des déchets hospitaliers par incinération en France. Aujourd’hui, elle fait figure de précurseur. «Selon les tendances mondiales, les recommandations de l’OMS ou de la section environnement de l’ONU, on invite à sortir progressivement de l’incinération pour les déchets hospitaliers, qui contiennent beaucoup de plastique et peuvent être très polluants s’ils sont traités avec des incinérateurs non performants.»
Conquête du monde… et de la Belgique?
Après la France, AMB est partie à la conquête du monde. En pleine expansion, le nombre de ses travailleurs a quadruplé, passant d’une dizaine à quarante. Elle vend ses machines partout dans le monde, de l’Amérique du nord aux îles du Pacifique en passant par la Malaisie.
La crise Covid-19 lui a été favorable, recevant des sollicitations du monde entier, au gré du déplacement de l’épidémie. 100% tournée à l’export, AMB Ecosteryl ne désespère néanmoins pas de bientôt faire son trou en Wallonie, à la faveur d’une politique de gestion des déchets qui serait plus favorable à sa solution…

Il y a d’abord les sociétés spécialisées dans la collecte et le traitement de déchets, des grosses boîtes comme Veolia, Suez à des sociétés spécialisées dans la collecte uniquement de déchets hospitaliers, qui font le tour des structures médicales.
Deuxième type d’utilisateurs, «les hôpitaux eux-mêmes, de moyenne ou grande taille, qui ne veulent pas payer un sous-traitant pour leurs déchets et veulent traiter leurs déchets sur place, avec une petite machine.»
Le troisième, ce sont les États. «Ce sera dans des pays où il n’y a aucun circuit de traitement, aucune logistique et où les ministères de la santé ou de l’environnement vont directement investir dans des solutions à l’échelle étatique. C’est particulièrement le cas en Afrique.»