Imbroglio éditorial autour de l’autobiographie de David Alexandre Winter
David Alexandre Winter, chanteur de variétés à la gloire éphémère et aujourd’hui star des thés dansants, verra son autobiographie publiée par une maison d’édition montoise. Au grand dam de son actuel éditeur, avec qui il est toujours sous contrat.
- Publié le 16-04-2019 à 18h07
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Si vous avez moins de 50 ans, le nom de David Alexandre Winter ne vous dit sans doute rien. Si vous avez plus de 50 ans, vous vous souvenez sans doute de son plus gros succès, «Oh Lady Mary», sorti il y a tout juste… 50 ans, en avril 1969. Le chanteur d’origine hollandaise, né Leon Kleerekoper, connaît alors une gloire éphémère, vendant près de trois millions d’exemplaires de ce titre en Europe, dont deux millions en France.
L’artiste, qui devient papa d’une certaine Ophélie Winter en 1974, tombe ensuite dans l’oubli dans nos contrées. Vivant aux États-Unis, il est exhumé en 2010 à l’occasion de la tournée Âge Tendre et Tête de bois, où il tourne aux côtés de vieux artistes des années 60 à 80 tels qu’Herbert Léonard, Sheila, Michèle Torr, Isabelle Aubret…
En 2019, pile-poil pour le cinquantenaire de son plus grand succès, David Alexandre Winter prépare un come-back qui doit passer par Mons puisque c’est une maison d’édition basée dans cette ville qui publiera son autobiographie, intitulée «L’étoile du Berger».
Une histoire qui commence en 1943, quand huit mois après sa naissance il est déporté avec sa famille dans le camp de concentration d’Auschwitz, duquel il survit miraculeusement, tout comme ses parents.
«Son manager belge, Alain Flament lui a trouvé un éditeur à sa demande pour publier son livre en français, pour le marché européen dans un premier temps et ensuite en anglais pour le marché américain où le chanteur continue sa carrière avec succès», indique Jean-Claude Lardinois, fondateur de la maison d'édition. Le manager, habitant Quévy, a téléphoné au plus proche et a suscité l'intérêt du fondateur des Éditions du Rapois.

Mais cette publication n’enchante pas tout le monde, singulièrement à Saint-Ferdinand, petite bourgade québécoise où sont basées les Éditions La Draiglaán. Et pour cause: en 2017, cet éditeur avait déjà publié l’autobiographie de David Alexandre Winter, sous le même titre et avec la même couverture, en français et en anglais, après avoir bénévolement traduit le manuscrit du chanteur.
Encore sous contrat
Et quelle ne fut pas sa surprise en lisant un article en ligne (sur la dh.be) annonçant une sortie dans les prochaines semaines de cette autobiographie sous la bannière d’un éditeur belge… Alors que suivant les termes du contrat liant l’auteur et l’éditeur québécois, les droits d’édition sont bloqués jusqu’au 16 novembre 2019. Publier le texte avant cette date serait tout simplement du vol d’édition.
Contacté, Jean-Claude Lardinois assure être dans la totale légalité, précisant que l’ouvrage ne sortira en librairies qu’à la mi-novembre, soit après la fin du contrat liant le chanteur et sa maison d’édition québécoise.
Il l'assure, son planning éditorial correspond à la fin du contrat de l'auteur avec son éditeur actuel. «Je suis membre de l'association des éditeurs de Belgique et je me dois de respecter des règles strictes. J'ai commencé cette maison d'édition en 2013 avec 16 euros. Je ne vais pas risquer de mettre six ans de ma vie en péril pour un titre», assure-t-il.
Promotion défaillante?
Entre David Alexandre Winter et son ancien éditeur, la pierre d'achoppement était clairement la diffusion et le non-succès de l'ouvrage: «53 exemplaires vendus en 18 mois», s'étonne son futur éditeur Jean-Claude Lardinois.
L'auteur accuse son actuel éditeur de ne pas avoir assuré la promotion de l'ouvrage, mais ce dernier se défend, arguant avoir prévenu lors des discussions du contrat que «l'auteur (était) le mieux placé pour faire la promotion de son livre.» L'éditeur pointe également un fan-club «de plusieurs milliers de membres» vanté par le chanteur, mais dont il n'a jamais vu la couleur.
«Nous avons tenté de trouver un distributeur en Europe sans succès, nous avons envoyé des livres en service de presse à des personnalités du monde du spectacle qui ne nous ont pas manifesté leur intérêt. Nous avons publié sans frais le livre en version numérique en Europe, au Canada et aux États-Unis, personne ne l’a acheté.»
Pas de quoi refroidir le futur éditeur Jean-Claude Lardinois, qui dit vouloir remuer ciel et terre pour que l'histoire de David Alexandre Winter se diffuse à des dizaines de milliers d'exemplaires. «Un éditeur, ça prend sa voiture et ça se bat pour la promotion de ses auteurs, ça n'hésite pas à faire 5 000 kilomètres par mois pour les placer partout où il peut», assène-t-il.
Best-seller potentiel?
Et il entend bien se battre pour placer «L'étoile du Berger» dans les librairies belges, françaises, et au-delà. Le potentiel de vente du livre, il l'estime à… «100 000 exemplaires sur une année complète, dont 50 000 rien qu'aux Pays-Bas.»

Vraiment? Les 50 ans et plus sont accros assure-t-il. «Aux États-Unis, il assure deux tournées par an, deux mois complets dans des hôtels ou des casinos devant 500 à 1500 personnes chaque soir. Il participe également à une croisière en Floride, avec 3 000 personnes à bord.»
Et chez nous? Jean-Claude Lardinois est convaincu que David Alexandre Winter a encore suffisamment de fans hardcore, curieux de son histoire. De son côté, l'éditeur québécois ne devrait pas engager d'actions judiciaires si la date de fin de contrat est respectée. «Nous nous en réservons le droit au cas où la maison d'édition ne tiendrait pas parole.»
Gaffe dès lors à ne pas proposer le livre lors des prochains concerts du chanteur prévus chez nous, en septembre…