Entre Louis Rossignol et Philippe Reynaert, 40 ans d’écart mais la même passion pour le grand écran : “un bon critique de cinéma est un éclaireur”
Les deux hommes ont partagé une scène du Plaza pour parler de l’évolution de la critique de ses débuts à l’émergence des réseaux sociaux.
Publié le 15-03-2023 à 14h52 - Mis à jour le 20-03-2023 à 16h10
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Entre Philippe Reynaert et Louis Rossignol, 40 ans d’écart mais le même amour, la même passion pour le cinéma. Ce mardi, les deux hommes étaient sur la scène d’une salle du Plaza pour une conférence sur la critique cinématographique. On ne présente plus Philippe Reynaert et ses célèbres lunettes blanches, ancien journaliste ciné. Par contre, Louis Rossignol travaille dans une boîte de production française mais surtout, a lancé il y a quelques années une chaîne YouTube baptisée “Intercut” qui décortique le cinéma sous toutes ses formes.
Entre vous deux, une génération d’écart donc mais un regard convergent vers la critique cinématographique qui, forcément, a fortement évolué depuis les années 80…
Philippe Reynaert : “La critique cinématographique a évidemment fortement évolué et n’a plus grand-chose à voir entre ce que j’ai connu à mes débuts et ce qui se passe aujourd’hui, ne fût-ce que par les moyens de diffusion. À l’époque, c’était le papier qui faisait la loi. Il y avait la télévision évidemment mais qui n’avait pas encore l’influence qu’elle a pu avoir par la suite. Une influence totalement minée par les réseaux sociaux qui aujourd’hui, sont prépondérants en matière de critique ciné.”
Louis Rossignol : “C’est intéressant de parler du papier car pour moi, ce qui se passe sur YouTube, ce n’est pas de la critique mais plutôt un avis. Quand quelqu’un prend le temps d’aller acheter un magazine, il le fait confronter son point de vue avec celui d’un critique, d’un journaliste quitte à ce qu’il soit différent. Parr contre quand cette personne se rend sur les réseaux sociaux, c’est pour chercher un avis convergent, qui va dans le même sens. Sans remise en question.”
P.R. : “C’est le phénomène des followers. Sur YouTube, tu es d’accord avec quelqu’un, tu le likes, tu le suis et tu ne prends en considération que son avis.”
Une autre différence, c’est que le cinéma est aujourd’hui en danger et les critiques peuvent être assassines sur YouTube…
P.R. : “Effectivement. Dans ma vie professionnelle, j’ai toujours fait de la critique positive. Si un film ne me plaisait pas, je n’en parlais pas c’est tout.”
L.R. : “Or, aujourd’hui, sur les réseaux, n’importe qui peut faire sa critique. YouTube par exemple travaille beaucoup sur les algorithmes ce dont les youtubeurs sont évidemment conscients. Les gens veulent du sang, cliquent pour du sang. Et donc, ils font des titres accrocheurs pour dire du mal d’un film alors que, pour certains, ils n’ont pas forcément cet avis.”
Un exemple récent ?
L.R. : “Astérix. Le film et son réalisateurs Guillaume Canet ont été assassinés par la critique alors que, c’est mon avis personnel, il détestait lui-même son film et aurait aussi préféré ne pas jouer dedans. Cela dit, même si ce film a été fait quasiment uniquement pour des raisons mercantiles, il ne méritait pas cet acharnement.”
P.R. : “Je n’ai pas vu le film mais j’ai lu beaucoup dessus et ce qui m’a frappé, c’est que beaucoup ont critiqué mais finalement, peu ont argumenté. dire que Guillaume Canet n’a pas la gueule de l’emploi, ce n’est pas de la critique.”
L.R. : “Et on revient au fait que tout ce que veulent les youtubeurs, c’est du clic, des vues.”
Quelle est la définition d’un bon critique de cinéma alors ?
P.R. : “Un critique de cinéma est un éclaireur dans les deux sens du terme. Tel un scout, il doit passer à l’avant pour voir ce qui se passe et, par ailleurs, éclairer ce qu’il a vu, lui donner un sens.”
L.R. : “Pour moi, une bonne critique est effectivement une critique qui va pousser à la curiosité.”