Norman Bassette, le coup de boost après les coups de blues
Le Gaumais Norman Bassette joue à Caen, en Ligue 2 française. Et vient d’inscrire son premier but à ce niveau. Sa trajectoire, pour arriver jusque-là, n’a pas été rectiligne cependant. Retour sur un itinéraire pour le moins singulier.
Publié le 06-03-2023 à 09h09 - Mis à jour le 06-03-2023 à 22h51
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Cela s’est passé le 18 février dernier, à l’ultime minute de Caen – Grenoble, match de haut de tableau en Ligue 2. Norman Bassette, attaquant gaumais au pied gauche puissant, utilise toutefois sa tête sur ce coup-là, offre à son équipe la victoire et inscrit au passage son premier but dans un championnat professionnel. À 18 ans, 3 mois et 9 jours précisément. Un an et demi plus tôt, alors qu’il n’avait pas encore 17 ans donc, ce natif de Breuvanne (Tintigny) avait déjà effectué ses débuts officiels avec l’équipe caennaise, contre Pau. Des données qui respirent la précocité et laissent deviner qu’on décrit ici la trajectoire d’un surdoué à qui l’ont prédit le plus haut niveau depuis quelques années. Il n’en est rien pourtant. Pour en arriver là, Norman Bassette a même dû traverser quelques périodes pour le moins agitées: passé par l’académie virtonaise, il n’y acceptait pas l’approche trop critique d’un entraîneur ; par celle de Charleroi, il n’y a pas été conservé à cause de sa petite taille ; par celle d’Eupen, il y a été victime de la concurrence étrangère. Ajoutez-y un douloureux épisode de harcèlement scolaire et vous comprendrez que rien n’a vraiment été simple dans son cheminement vers l’élite. Il a même été contraint à porter des béquilles durant quatre mois pour se remettre d’un arrachement osseux, conséquence probable d’une croissance accélérée qui lui a fait prendre 15 cm en un an et atteindre la taille appréciable d’1,86 m. Un atout lorsqu’il s’agit d’inscrire un but décisif du front…
Norman, ce but contre Grenoble a dû sacrément renforcer votre confiance ?
Et comment ! Marquer un but, c’est un peu comme gagner au poker (rires). Vous avez tout de suite envie de recommencer. Là, je suis à l’arrêt quelques jours à cause d’une petite élongation, mais j’ai hâte de pouvoir remonter sur le terrain.
Vous percevez aussi que vos supporters et équipiers vous considèrent d’une autre manière désormais ?
Les équipiers, je ne pense pas, j’ai toujours eu la confiance du groupe. Chez les supporters, c’est différent. Le regard des gens change. Pour moi, c’est un vrai coup de boost.
Après les coups de blues…
Ah ça, il y en a eu beaucoup. Chez les jeunes d’abord, mais je n’ai plus envie de revenir en arrière, j’ai tourné la page. Puis encore récemment, au mercato. J’avais des offres pour partir, je manquais de temps de jeu, mais le club a tenu à me garder. Quand vous devez rester sur le banc, c’est toujours un peu compliqué mentalement (NDLR: même s’il a débuté avant 17 ans, il n’a joué qu’une cinquantaine de minutes en Ligue 2 jusqu’ici).
Le moment le plus dur, c’était lequel ?
Ma blessure. J’avais déjà un accord verbal avec Caen avant mes 16 ans, mais je ne pouvais pas y signer un contrat en raison de la réglementation en vigueur pour les jeunes. Je m’entraînais avec Longlier en attendant, puis quand j’ai enfin pu signer une convention avec Caen (NDLR: en janvier 2021, suivie d’un contrat de stagiaire pro en juin de la même année), j’ai subi assez rapidement cet arrachement osseux et cette indisponibilité. Après les déboires que j’avais connus, c’était un nouveau coup d’arrêt qui, moralement, faisait mal. Mais j’ai repris ensuite, j’ai bien bossé et je n’ai pas tardé à être convoqué en équipe A. Le travail finit toujours par payer, c’est la leçon que j’en ai tirée.
Le coup de fil qui a tout changé
Mais parfois, cela tient à peu de chose. Car vous auriez pu tout aussi bien jeter l’éponge, non ?
C’est vrai. Après Eupen, j’avais l’intention de revenir jouer avec mes amis à Rossignol ou alors de rejoindre les U21 de Virton et je m’étais inscrit dans une école technique à Arlon. Pour moi, les rêves de foot s’arrêtaient là. Puis, à quelques semaines de la rentrée scolaire, un agent m’a appelé pour aller passer des tests à Caen. Vous connaissez la suite…
On imagine qu’un tel parcours forge un caractère ?
Clairement. Après Eupen, c’était dur de penser que j’avais peut-être fait tous ces sacrifices pour rien. J’étais tout de même parti de la maison dès mes 11 ans. Heureusement, j’ai toujours pu compter sur mes parents pour me soutenir, me remettre dans le droit chemin si cela s’imposait et m’aider à supporter l’éloignement (NDLR: son père Nicolas a joué au niveau provincial et coaché Rossignol). On s’appelle quasiment tous les jours et ils viennent me voir à Caen dès qu’ils le peuvent.
Vous sentez que ce premier but chez les pros vous a déjà offert une petite reconnaissance dans notre province ?
Ça fait plaisir, en tout cas, de représenter notre petite région, de découvrir tous ces commentaires. Quoi qu’on en dise, quand on est footballeur, on y fait forcément attention.
Ce but, c’est votre meilleur moment jusqu’ici ?
C’est le n° 1. Mais j’ai aussi beaucoup apprécié mon premier match avec le maillot national. En U18 face à la Suède. J’ai toujours espéré revêtir la vareuse belge. À Caen, j’étais un peu loin des regards, mais mon agent a fait en sorte que les responsables fédéraux soient attentifs à mon évolution.
Et quel est votre rêve ultime ?
Je ne veux pas aller trop vite en besogne. Mon premier objectif, c’est de jouer un maximum, de m’imposer chez les pros. Mais si vous me demandez de quoi je rêve, c’est un peu comme la plupart des jeunes: j’aimerais jouer un jour en Ligue des champions et représenter mon pays en Coupe du monde. Mais, j’insiste, j’en suis très, très loin. Je ne suis qu’à Caen ; il reste énormément de chemin à parcourir.