François Gourmet: "Julien voulait des infos avant les Jeux, il les a"
Julien Watrin a impressionné tout le monde ce week-end à Istanbul. Et les commentaires à son égard sont unanimes.
Publié le 05-03-2023 à 20h23 - Mis à jour le 05-03-2023 à 23h01
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Phénoménal ! En décrochant sa première médaille internationale dans une épreuve individuelle (l’argent sur 400 m), en poussant Karsten Warholm, le prodigieux recordman du monde du 400 haies, dans ses derniers retranchements, en s’offrant un 7e record de Belgique en un peu plus d’un an, en ajoutant une nouvelle ligne à un palmarès très riche au sein des Tornados et, peut-être surtout, en gérant de maîtresse façon, sans jamais donner l’impression de faiblir, quatre courses aussi intenses en un peu moins de 60 heures, Julien Watrin a sans doute écrit l’une des plus belles pages de l’histoire du sport luxembourgeois.
L’athlète gaumais, parmi les plus en vue de ce rendez-vous européen d’Istanbul, a clairement franchi un palier ce week-end dans sa maîtrise mentale des événements et dans sa gestion tactique d’une course. Et cela laisse augurer de lendemains encore très souriants. On songe ici en premier lieu aux Jeux Olympiques de Paris en 2024, où il pourrait atteindre le pic d’une carrière aux multiples rebondissements.
François Gourmet, son entraîneur, était aux anges samedi soir, après la finale du 400. "Je ne trouve pas les mots, lançait-il. C’est monstrueux ce qu’il a fait. On s’était dit qu’il ne fallait pas avoir peur de ceux qui sont derrière, mais regarder à ceux qui sont devant. Et c’est ce qui est arrivé. On savait que Warholm partirait comme une balle et on supposait que Bengstöm ferait pareil. Le scénario s’est produit et Julien a pu se caler derrière eux avant de placer son accélération. Sa dernière ligne droite a été exceptionnelle. On s’était inspiré de son expérience de Belgrade où, en demi, il avait trop calqué sa course sur les autres. Ici, il a fait ses courses, au feeling, alors qu’auparavant, on élaborait toujours des scénarios. Et ce chrono de 45.44, c’est carrément plus rapide que son record en plein air (NDLR: 45.56). Quel exploit ! En plus, il récupère bien, il n’a mal nulle part. À 30 ans, il est dans la forme de sa vie."
Quelques heures et une médaille d’or en relais plus tard, l’ancien décathlonien n’avait évidemment pas perdu son sourire. "En fait, confiait-il, le relais a été sa course la plus facile. Kevin l’a placé dans les meilleures conditions et il savait qu’il pourrait attaquer l’Espagnol et le dépasser. Il surveillait surtout l’écran pour voir si Bonevacia ne rappliquait pas trop près. Théoriquement, il devait être fort pour cet Euro, mais on n’en avait pas l’assurance puisqu’il n’avait couru que deux 400 en étant fatigué. Mais sa course en série, face à une forte concurrence, nous a rassurés d’emblée. On a vu qu’il en avait sous la pédale. En fait, il nous avait demandé de pousser en préparation. “Je veux de cette façon avoir des infos dans la perspective des JO de Paris.” Et là, il les a. On sait qu’on est sur la bonne voie. Il enchaîne toutes les compétitions internationales depuis un certain temps, en individuelle et en relais, et à chaque fois, il est au rendez-vous."
"Il a tellement maîtrisé ses courses individuelles que nous étions moins stressés pour le relais"
France Maissin, la maman du champion gaumais, avait, elle, la voix un peu enrouée quand nous l’avons contactée hier soir. "J’ai beaucoup crié et encouragé pendant trois jours, s’excusait-elle, tout sourire. C’est fantastique ce qui lui arrive. On est même surpris, surtout par la façon dont il a géré ses quatre courses. À chaque fois de la même façon. Tout était réfléchi, maîtrisé. Pour se placer, pour attaquer au bon moment, pour obtenir un bon couloir au tour suivant. Et dans le relais, c’était pareil. Dès sa première course, en série, on a senti qu’il était facile. Alors qu’il s’était pourtant inquiété en découvrant le tirage et les noms de ses adversaires. Pour tout vous dire, il a tellement maîtrisé ses courses individuelles que nous étions moins stressés qu’à l’accoutumée pour le relais. Même si, après le premier relais et l’accrochage dont a été victime Dylan Borlée, un petit vent de panique a soufflé dans le salon… Mais on a vu qu’ils forment une excellente équipe et le voir ponctuer ce relais, c’était encore plus beau. Il ne l’avait fait qu’une fois auparavant, mais c’était en séries à Amsterdam (NDLR: championnat d’Europe 2016). La plupart du temps, c’est lui qui prenait le départ. C’est vraiment super. Il nous a téléphoné deux fois, après la demi et après la finale du 400 ; on l’a senti réellement heureux."
"Il était au centre de la photo"
Éric Louis, entraîneur de l’AC Dampicourt : «Quelle consécration pour lui! Et quelle fierté pour notre club auquel il est toujours resté fidèle, quel exemple pour nos jeunes! On le savait en forme, mais on ne l’avait pas encore vraiment vu à l’œuvre sur 400 cet hiver. Sa finale samedi et sa course en relais ce dimanche montrent à quel point il a gagné en maîtrise, en maturité. Et en assurance. Il est apparu tout le temps relâché et se comporte désormais comme un leader. Auparavant, les Borlée occupaient souvent le centre des photos et lui se mettait sur un côté, un peu plus discret. Cette fois, c’est lui qui était au centre.»
"Fabuleux de se révéler à 30 ans"
François Culot, bourgmestre de Virton : «Exceptionnel. J’ai toujours eu une grande estime pour Julien dont la simplicité mérite la mention, pour son club qui est exemplaire en matière de formation et pour ses parents qui étaient athlètes en même temps que moi. C’est fabuleux de se révéler ainsi à 30 ans, sur des épreuves individuelles alors qu’auparavant, aux yeux du reste du pays, il était surtout le quatrième élément d’un relais emmené par les Borlée.»