Arthur Baude (CC Chevigny): "Aucun Wallon à Kuurne en juniors, c’est inquiétant"
Premier coureur provincial du Chevigny à remporter une Coupe de Belgique chez les juniors, Arthur Baude a vécu un nouvel exploit dimanche, à Kuurne, comme directeur sportif: le succès de Jarno Widar.
Publié le 01-03-2023 à 07h02 - Mis à jour le 01-03-2023 à 09h04
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Arthur, vous avez abandonné la compétition à vingt ans, après avoir atteint l’antichambre du monde professionnel pour vous lancer dans la corporation des directeurs sportifs. Vous ne regrettez pas cette décision ?
Aucunement. J’ai pris beaucoup de plaisir en course, mais j’ai tourné la page. J’ai voulu accorder la priorité à mes études et cela ne s’est pas mal passé puisque je touche au but. Je suis actuellement en dernière année et en stage au Grand-Duché pour six mois ; j’ai trouvé ma voie dans la communication d’entreprises. J’entame également ma cinquième année comme directeur sportif au Chevigny. J’adore ce boulot. Il faut dire que j’ai eu beaucoup de chance puisque j’ai fait mes premiers pas avec un certain Arnaud De Lie comme leader.
Vous ne sortez plus le vélo du garage ?
Moins souvent que le paternel (Alex). Il a encore dépassé les 15 000 bornes l’an passé. Moi, je suis devenu un cyclo. Pendant le Covid, j’ai quand même atteint près de 10 000 km en roulant avec des copains. Je n’ai pas tout perdu. L’an dernier, avec Morgan Martin, nous avons remporté les 4h de Bébange. J’effectue régulièrement une sortie le week-end. Les juniors alignent une bonne soixantaine de courses, mais nous sommes quatre à nous partager les missions.
Ressentez-vous autant d’adrénaline au volant de la voiture que lorsque vous abordiez le final d’une course ?
Je pense qu’il y a davantage de stress dans la voiture. Parce que pendant la course, on a l’impression de ne pas pouvoir tout maîtriser. D’abord, ce n’est pas le directeur sportif qui pédale ! Qui plus est, chez les juniors, les écouteurs sont interdits. Pour discuter avec ses coureurs, il faut que ceux-ci redescendent à l’arrière du peloton ou que nous passions les infos via les soigneurs ou les accompagnateurs lors des ravitaillements.
Le pilotage doit être plus aisé lorsque vous accompagnez les attaquants, voire un homme seul comme dimanche ?
C’est vrai. Au début, remonter tout le peloton constituait ma plus grande crainte, mais il suffit de rester bien concentré, de se faire respecter des autres conducteurs aussi. J’ai gagné bon nombre de courses avec Arnaud. Ça se jouait souvent au sprint, en petit groupe aussi. Dimanche, à Kuurne, Jarno (Widar) est parti seul à 35 km de l’arrivée. Il a creusé un écart important (1’55) avec ses poursuivants. Là, on a eu le temps de savourer. D’autant que le Chevigny n’avait jamais gagné à Kuurne (NDLR: Lionel Taminiaux s’était classé 2e derrière James Shaw, aujourd’hui chez EF Education).
Avec Widar, vous tenez un second De Lie ?
Ce sont des gabarits tout à fait différents. Jarno est taillé pour la montagne. Arnaud est un sprinter redoutable. Mais ce sont surtout des coureurs d’exception. Ils ont tous deux gagné à la Redoute le GP Philippe Gilbert. Dimanche, Jarno s’impose sur les pavés. La veille, Arnaud passe le Mur de Grammont en patron. C’est inouï.
Vos protégés, vous les gardez deux ans au maximum. Ce n’est pas frustrant ?
Non. C’est chouette de voir la progression de tous ces jeunes. Par contre, ce qui m’énerve, c’est la pression que les grosses écuries exercent sur eux. L’an passé déjà, certaines ont déjà fait le siège de Jarno. Peut-être va-t-il directement effectuer le saut chez les pros. Personnellement, je pense qu’un jeune a tout intérêt à passer au moins une saison dans l’antichambre comme l’a fait Arnaud.
Avec Jarno Widar, mais aussi Lars Vanden Heede, Victor Van Eeckhoutte et quelques autres, les Flandriens trustent les places dans les sélections…
C’est vrai. Mais savez-vous qu’au départ à Kuurne ne figurait pas un seul Wallon. C’est inquiétant pour l’avenir de notre cyclisme même si on a l’impression d’un nouvel engouement chez les plus jeunes. Il y a de moins en moins de courses en Wallonie. Par contre, les coûts sont de plus en plus élevés. Au Chevigny, la direction veille toutefois à décentraliser les entraînements à Léglise, à Hotton et à Liège. J’espère aussi que les exploits de notre Arnaud vont amener un maximum de jeunes à découvrir le cyclisme.