La pièce de Luc Templier jouée à la prison de Marche à travers la pièce de Luc Templier
Des détenus se sont "évadés" le temps d’un spectacle poignant que leur ont présenté Luc Templier et sa compagne au sein de la prison de Marche.
Publié le 03-06-2022 à 06h00
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La promesse faite aux détenus de la prison de Marche par Luc Templier et sa compagne, Anne-Marie Desclée, de leur offrir une représentation n’est pas restée lettre morte. Souffrant du Covid, les deux acteurs avaient été contraints d’annuler celle-ci le 11 avril. Ou plutôt donc reporter, puisque notre duo s’est adressé aux 17 détenus à avoir pris place dans le hall sportif de l’établissement à travers Lettre au père . Et le moins que l’on puisse écrire est que bien leur en a pris, tant ceux-ci ont été réceptifs.
Luc Templier a adapté au théâtre 20 des 80 pages du document du même nom que l’écrivain Franz Kafka rédigea en 1919 à son père. Et dans laquelle il décrit une figure paternelle qui l’effraie et le domine.
"On avait présenté une première fois "Lettre au père" au Centre culturel de Bertrix , souligne Luc Templier, lui-même écrivain et qui avait déjà joué L’Art de vivre à la prison il y a quelques années. J’ai contacté le directeur de la prison, Frédéric de Thier, qui a donné son feu vert. "L’Art de vivre" était un spectacle positif et plus serein. En allant à la prison avec ce texte, on savait qu’on prenait des risques. Chacun est confronté à sa relation au père sous des formes et à des degrés très divers, qu’il soit manquant, abusif, violent, intolérant, alcoolique,…"
«L’espoir de casser la chaîne et d’une prise de conscience»
Luc Templier poursuit: "Il confronte très fort le public, et plus encore les détenus. Les gens avaient déjà être très touchés à Bertrix. C’est incroyable le nombre de personnes qui avaient témoigné être concernées. C’est pour cela qu’on voulait jouer à la prison, avec aussi l’espoir de casser la chaîne et d’une prise de conscience en tant que père."
Il insiste encore: "Comment est-ce possible que tu m’obliges à faire ce que tu ne fais pas? Cette question revient à maintes reprises dans la lettre. C’est un nœud du problème. Le père demande parfois aux enfants de faire ce qu’il ne fait pas, comme, par exemple, de ne pas fumer alors qu’il fume. Dans "Lettre au père, le père est tellement envahissant, écrase tellement son fils, qu’il devient un dragon. Il faut bien que le fils émerge d’une manière ou d’un autre. Cela peut-être dans la violence ou d’autres dysfonctionnements. Pour Kafka, cela a été dans l’écriture, qui l’a sauvé".
S’il en allait finalement de même, dans l’écriture ou le théâtre, pour des détenus?