"Ils n'arriveront pas main dans la main"
La maman de Kevin et Jonathan hurlera depuis les tribunes ce soir. Mais elle pourrait être à la fois dans la joie et avoir mal au coeur à l'arrivée.
Publié le 30-07-2010 à 06h00
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Même voix douce, même chevelure blonde abondante : pas de doute, Edith Demaertelaere est bien la maman d'Olivia Borlée. Ancienne championne de Belgique sur 200 m, l'ex-épouse de Jacques Borlée est venue supporter ses enfants à Barcelone. À quelques heures de la finale du 400 m, elle parle avec émotion de ses jumeaux.
Est-ce la première fois que vous les suivez dans un grand championnat ?Oui, j'avais l'intention d'aller l'an dernier à Berlin, mais vu la blessure au pied de Jonathan, ma place était davantage en Belgique auprès de lui qu'au Mondial. Depuis 2005, je vis en moyenne la moitié de l'année à l'île de La Réunion. Mais nous restons très souvent en contacts grâce aux nouveaux moyens de communication comme Skype.
Ici, vous ne faites pas partie de la délégation. Les voyez-vous néanmoins ?Je viens de passer un moment avec Olivia (NDLR : l'entrevue au eu lieu mercredi, juste avant les demi-finales) . Le jour des courses, je les laisse dans leur bulle. Je leur envoie juste un SMS d'encouragement.
Quand avez-vous compris qu'Olivia, Kevin et Jonathan deviendraient des athlètes de très haut niveau ?Assez rapidement. En remarquant leurs foulées, leur tenue en course mais aussi en voyant leur motivation, leur force de caractère, leur discipline pour atteindre les objectifs fixés. Sans oublier non plus leur manière de surmonter les blessures. Ils n'ont jamais baissé les bras. Personnellement, je les vois toutefois d'abord comme mes enfants, et non comme des champions. On me parle du titre de champion d'Europe. Je serais hyperheureuse, évidemment, si Jonathan le décrochait. Mais je considère ce titre comme "accessoire". C'est tout aussi important que mes autres enfants, même ceux qui ne pratiquent pas l'athlétisme, atteignent leurs objectifs.
Les voilà au sommet de l'Europe dans leur discipline alors qu'ils n'ont débuté l'athlétisme qu'à 16 ans.Ils ont d'abord joué au football (NDLR : à Champlon lorsque la famille habitait la Roche-en-Ardenne) avant de suivre leur soeur qui avait, elle aussi, débuté l'athlétisme à 16 ans. Avoir connu d'autres choses leur a permis de débuter l'athlétisme avec plus de maturité.
Avec leur père, bénéficient-ils du meilleur coach possible ?Il est très, très exigeant et il connaît très bien son domaine. Jeunes, quand nous partions en stage, il s'intéressait déjà aux méthodes des coaches étrangers. Moi, on me donnait mon plan d'entraînement et je le suivais. Point. Lui, il voulait obtenir des explications, chercher le pourquoi du comment.
Aux yeux du monde extérieur, Jonathan et Kevin paraissent identiques. En quoi sont-ils différents? Ils développent chacun des qualités différentes, et simultanément, une très grande complicité. J'ai toujours néanmoins essayé de les individualiser. En les habillant par exemple de manière différente. Aujourd'hui, lorsqu'ils se confient séparément à moi, je les écoute différemment. Quant à la compétition, ce n'est pas facile pour eux. Mais ils parviennent à se motiver ensemble, à se réjouir l'un pour l'autre. Quand l'un a un coup de blues, l'autre trouve les mots pour lui remonter le moral.
Et ce vendredi si l'un décroche une médaille et l'autre pas...Je serai dans la joie de celui qui est sur le podium et en même temps dans la tristesse de celui qui vit difficilement l'événement. Sauf si ce dernier a réalisé une très belle course avec un super-temps. Idem pour Olivia. Si ça se passe mal pour elle, j'aurai mal au coeur de voir sa tristesse. Digérer une contre-performance prend toujours deux, trois jours quand on connaît tous les sacrifices réalisés.
Idéalement, vous devez souhaiter que Jonathan et Kevin terminent à la même place sur le podium, non ?(Rires) Lorsqu'ils étaient plus jeunes, ils participaient chaque année à un cross avec leur école à Marche-en-Famenne. Et ils arrivaient souvent main dans la main dans la dernière ligne droite avant de choisir celui qui gagnerait. Impossible ici. De toute façon, ni l'un, ni l'autre ne le souhaiteraient. Ils veulent que chacun se dépasse.
Comment allez-vous vivre cette finale ?Je prendrai place dans la partie supérieure de la tribune opposée à la ligne d'arrivée avec mes autres enfants, Dylan, Alyson et Youna. Je serai très stressée et n'aurai plus de voix. Je hurle mais ils ne m'entendent probablement pas (rires).
Ce n'est peut-être que votre première finale d'envergure d'une longue série. Parce que Dylan pointe aussi le bout du nez...Il aura 18 ans en septembre et vient de commencer le 200 m mais son objectif est de passer sur le 400 m. Dylan vient de connaître pas mal des douleurs musculaires car en un an, il a grandi de 10 centimètres pour mesurer 1m88. D'après ses frères, il possède énormément de qualités. Il est capable de "cracher ses boyaux sur la piste". Il doit juste faire preuve de patience.