Me Pierre Neuville : « Et le droit des victimes ? »
Me Pierre Neuville, avocat de la famille de Geneviève Trembloy, monte au créneau. Il s’étonne du mutisme dans lequel le parquet s’est enfermé.
Publié le 28-08-2011 à 01h04
:fill(000000)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/CBWBYHR7ENFB3FDNOY4JUCLW7Q.jpg)
Il n'a pas pour habitude de sortir de sa réserve. Le bâtonnier Pierre Neuville, avocat de la famille de Geneviève Trembloy, estime aujourd'hui devoir réagir, après la comparution, en chambre du conseil à Marche-en-Famenne, des deux meurtriers présumés de la tenancière de la friterie Les Frangines (Gouvy). La chambre du conseil a confirmé les mandats d'arrêt délivrés, lundi, à l'encontre d'Antoni et Timothée Évrard. Les deux frères ont reconnu avoir tué, d'une balle dans la tête, cette mère de famille. Le 15janvier 2011, alors qu'elle rentrait chez elle après sa journée de travail, ils l'ont suivie en voiture. À hauteur d'Halconreux, ils ont obligé Geneviève Trembloy à s'arrêter, après une manœuvre. Le duo voulait lui voler la recette, 250euros contenus dans une caisse. Timothée Évrard (23 ans) a fait feu, au moment du braquage et tué. Après sept mois d'enquête, le service d'enquête et de recherche (SER) de la zone Famenne-Ardenne et la police judiciaire fédérale ont fini par remonter jusqu'à eux. Les deux frères ont été trahis par leur Renault Clio, avec laquelle ils ont eu un accident peu de temps après les faits. Le tireur, dans ses déclarations, aurait expliqué ne pas l'avoir… fait exprès. Son frère, Antoni, qui avait lancé l'idée de «faire un coup», dit lui avoir été pris de panique au moment où il a entendu le coup de feu. À travers divers témoignages, la jeunesse compliquée de ces deux individus a également été mise en évidence: l'un d'eux a été placé. Pour Me Pierre Neuville, trop, c'est trop. «Les personnes qui ont été arrêtées soutiendraient – comme pour formater une opinion et peut-être un futur jury – qu'ils «ne l'auraient pas fait exprès», souligne-t-il. L'avocat enchaîne: «La presse relate encore que le jour même où ils comparaissent pour la première fois en chambre du conseil, ces individus font déjà état de leur enfance malheureuse». Selon lui, il est étonnant, alors qu'il existe des aveux publics, «que le parquet s'enferme dans un mutisme complet, dont on n'a pourtant pas l'habitude. Par ailleurs, depuis le début de cette semaine, la famille n'a même pas été contactée par le service d'aide aux victimes… et on prétend que les mentalités changent». L'avocat, qui n'a toujours pas eu accès au dossier rappelle un double principe: «La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme a renforcé, à raison, le droit des personnes privées de liberté. Cette jurisprudence liée à l'arrêt Salduz oublie cependant trop le droit aux victimes et des parties civiles dans la procédure pénale. Le déséquilibre est manifeste !».¦