Pierre Leclercq, le Bastognard devenu chef designer chez Citroën
Après un parcours aux E-U, en Allemagne, puis en Asie, le designer automobile bastognard Pierre Leclercq s’est lié à Citroën. Rencontre.
- Publié le 03-10-2018 à 06h00
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En une vingtaine d’années, Pierre Leclercq s’est fait un nom dans le design automobile international. Le petit gars de Bastogne peut se targuer d’une sacrée expérience à travers le monde pour déposer à partir du 1er novembre ses valises au sein de PSA pour prendre la direction du design de Citroën.
«Déjà petit, je dessinais des voitures et des maisons, se souvient-il. Après mes études secondaires, j'ai suivi des cours à Saint-Luc à Liège, mais j'avais l'espoir d'intégrer une école de design automobile en Suisse. J'ai dû démontrer ma motivation car le coût des sessions était conséquent, mais mes parents ont finalement accepté.»
Le voilà donc au départ en Suisse, puis en Californie avec les 150 étudiants venant de 35 pays. Il réalise un stage chez BMW et espère rejoindre la marque allemande, mais c'est bouché. Il trouve finalement embauche en Italie, chez Ford. Un an plus tard, ce sera un retour chez BMW durant trois ans aux États-Unis, puis dix autres à Munich. «J'y ai gagné les concours pour la conception des X5 et X6, poursuit le designer. C'était un aboutissement, le plus beau jour de ma vie car on passe à du concret. Chaque fois que j'en vois une, je partage le plaisir que je vois chez le conducteur.»
Après cela, direction la Chine. «J'avais d'abord dit à ma femme qu'on n'irait jamais, mais il y avait beaucoup d'argent et une grande liberté, explique Pierre Leclercq. J'étais le premier blanc dans une boite de 60 000 Chinois. C'était un choc culturel énorme. C'était très dur. J'avais rendez-vous avec le patron toutes les semaines et il m'a montré les mauvais côtés de la Chine.»
Après quatre ans, Pierre Leclercq se dirige vers la Corée du Sud et Kia. «C'était beaucoup mieux du point de vue humain, sourit le Bastognard. À ce niveau, c'est ma meilleure expérience. Comme chez BMW, on réduisait les risques, mais, comme en Chine, tout était permis.»
L’avenir, l’hydrogène
Toutefois, après une année, il décide de revenir en Europe avec la proposition de Citroën. «Jean-Pierre Ploué, le papa de la Twingo ou de l'Argos, m'a contacté en juillet et m'a donné la possibilité de rejoindre un groupe qui a presque cent ans d'histoire. C'est une passion qui m'a manqué depuis BMW. On rentre à la maison. Et puis, Paris, j'en ai toujours rêvé. Je veux travailler avec des avancées technologiques et un design audacieux. Le projet ne sera pas de créer du premium, mais la voiture de tout le monde. Et ce n'est pas une marche en arrière; Porsche, par exemple, c'est la pire des marques pour être créatif. Le groupe doit aller de l'avant et le poste que je vais prendre est très prisé.»
Pierre Leclercq sait que le monde l'automobile est en pleine mutation. Lui mise plutôt sur l'hydrogène que sur l'électrique. «L'hydrogène, c'est de l'eau et du soleil, précise-t-il. C'est le futur. Qui est intéressé par l'électrique? La Chine pour vendre ses batteries au lithium. Pour moi, c'est de la poudre aux yeux. L'hydrogène, c'est propre et pour le plus grand monde.»
« Bastogne, une qualité de vie exceptionnelle »
Pierre Leclercq adore sa ville, Bastogne. Il a d'ailleurs construit une maison dans un nouveau quartier. « Ma femme est originaire de Yalta (Ukraine, Russie), mais elle adore Bastogne. Nous y avons un petit cercle d'amis, ma famille. Quand tu vis à Shanghai, c'est 25 millions d'habitants. Ici, tu prends ton vélo et tu es dans la nature. Nous pouvons compter sur une qualité de vie exceptionnelle en Belgique. J'ai habité sur les plages américaines, dans les villes chinoises, coréennes ou allemandes. Il y a des choses qui manquent, mais ici tout est facile. Je n'ai pas envie d'être retraité ailleurs qu'en Belgique ou en France. »
Vite dit
La réussite des X5 et X6 Les projets que Pierre Leclercq a réalisés pour la société BMW ont entraîné des investissements pour quelque 1,5 milliard d'euros. Mais les résultats ont également été probants avec quelque 700 000 X5 et 500 000 X6 sur les routes. Pas mal…
Des enfants du monde Pierre Leclercq a eu la chance d'accueillir trois enfants : le premier est né en Ukraine, le deuxième à Shanghai et le troisième à Libramont. Ils ont également la chance de s'exprimer en anglais, en russe et en français (à l'école).
La voiture autonome en 2025 Un designer doit aussi composer avec les évolutions dans le domaine automobile. Et le secteur est en pleine évolution. « Je pense que la voiture autonome devrait arriver en 2025 et que le volant devrait disparaître pour 2030, pense Pierre Leclercq. Dans ce cadre, il faut totalement revoir la voiture, qui sera une extension de la maison. »
Plus de créativité comme directeur Comme directeur du design, Pierre Leclercq ne compte pas laisser ses crayons. « J'ai une plus grande liberté avec ce poste car je sais que je vais influencer les créations. C'est un peu comme au football. Moi aussi, j'ai fait mon temps sur les planches. Maintenant, je dois coacher mon équipe. C'est un travail de direction et d'équipe. »
La touche Leclercq pour 2022 Le designer belge, le premier à ce poste chez PSA, espère pouvoir mettre sa griffe sur les créations qui devraient sortir d'ici trois à cinq ans. « Mais les Salons de Paris en 2020 et 2022 seront très importants pour nous, conclut-il. Maintenant, j'espère être chez Citroën pour longtemps. »