"Rehausser encore le nombre de jours de télétravail n’est pas à l’ordre du jour"
Les gouvernements belge et luxembourgeois se retrouveront le 29 mars à Bruxelles pour un nouveau sommet intergouvernemental. L’occasion pour Thomas Lambert, ambassadeur belge au Luxembourg, de faire le point sur son travail et les relations entre les deux pays.
Publié le 20-03-2023 à 11h01 - Mis à jour le 20-03-2023 à 11h03
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Quel bilan faites-vous de ces trois années à la tête de l’ambassade belge au Luxembourg ?
J’en tire un bilan vraiment positif jusqu’ici. On ne s’ennuie jamais au Grand-Duché ! (Il rit.) J’ai un agenda très chargé, mais c’est un choix. Il y a beaucoup de choses à faire dans ce petit pays, contrairement à ce qu’on peut penser. C’est aussi ce qui fait le caractère unique du Luxembourg: le monde entier passe par ici, c’est très international. En pratique, je travaille beaucoup au niveau économique, mais pas uniquement pour la Belgique et le Luxembourg, je suis sans cesse plongé dans le bain européen aussi. Je regarde ce que je peux résoudre à mon niveau, avec mes collègues du Benelux.
Vous vous êtes exprimé, à la suite du débat sur le télétravail frontalier à la Chambre des députés, en soufflant quelque peu les espoirs de voir les quotas augmenter encore ces prochains mois… Expliquez-nous.
J’assume ce que j’ai dit. Nous venons seulement de ratifier un accord, c’était même un cadeau sous le sapin de Noël le 22 décembre dernier, et pour nous, c’était le produit d’une négociation au sein de l’UEBL qui doit désormais trouver son équilibre. Nous verrons dans quelques années. Il y a une clause de révision prévue en 2031, nous verrons bien alors dans quelle mesure le télétravail, qui a la cote en ce moment, va se stabiliser ou augmenter davantage.
Il faut aussi voir d’autres initiatives, comme la création d’espaces de coworking le long de la frontière par exemple. Il faut laisser le temps au temps. Nous allons évaluer la situation, j’imagine vers 2031, mais actuellement, rehausser encore le nombre de jours de télétravail n’est pas à l’ordre du jour, je vous le dis formellement. Il y a un paquet financier qui a été négocié, ce n’est pas quelque chose que nous pouvons faire comme ça, en un claquement de doigts.
Mais cette situation nous amène à réfléchir: est-ce qu’il ne faudrait pas européaniser le télétravail ? Il serait judicieux de regarder si nous ne pouvons pas plutôt obtenir un standard européen. Ce n’est pas très pratique d’avoir une hétérogénéité d’accords entre États membres, c’est très compliqué à gérer. Nous en avons parlé côté belge, et nous voulons vraiment nous pencher là-dessus et voir au niveau de l’Union européenne si c’est possible. Et puis, pourquoi pas le tester d’abord au sein du Benelux ? Nos pays sont un vrai laboratoire potentiel pour l’Europe, il peut être utilisé encore davantage. C’est ça notre vocation historique.
Sur quels dossiers avez-vous travaillé ces deux dernières années ? L’un en particulier vous a-t-il marqué ?
Il y en a plusieurs. J’ai beaucoup travaillé sur la coopération et l’intégration militaires. Nous sommes en train de créer un bataillon commun, nous venons d’ailleurs de déterminer la localisation géographique des différentes casernes. Je suis très content de pouvoir dire que ça va très bien, ça s’annonce bien. J’ai des contacts très amicaux et très fréquents avec l’armée luxembourgeoise et ça se passe vraiment à merveille. Nous sommes même en train de sonder ce que nous pourrions faire de plus. Ce bataillon belgo-luxembourgeois, c’est comme des briques Lego, cela fait partie d’une coopération avec la France.
Je suis aussi enchanté par le talent luxembourgeois pour développer une vision stratégique sur l’avenir du Grand-Duché pour l’horizon 2050. Que ce soit pour la mobilité, la durabilité, le logement, l’économie, etc. Moi, je prends ces réflexions stratégiques luxembourgeoises et je les transmets du côté belge limitrophe et je leur dis: "Écoutez, c’est en train de se passer au sein du Luxembourg, ça va se faire et l’impact sur nous, côté belge, sera certain". J’aimerais vraiment développer une réflexion commune sur l’avenir du Grand-Duché vers 2050 et comment la Belgique limitrophe peut en faire partie. C’est un cadeau que j’aimerais donner à mon successeur: l’entame d’un début de dialogue concret sur ce que nous pourrions faire ensemble.
Parce que si nous regardons les perspectives dressées par le Statec ou la Fondation Idea par exemple, nous voyons bien qu’il y aura plus qu’un doublement du flux transfrontalier et notamment depuis la Belgique, qui dispose de la structure démographique la plus jeune dans la Grande Région. Je vois déjà les bouchons le matin en venant d’Arlon… (Il soupire.) Vous allez doubler ça ? Franchement, c’est un modèle qui va droit dans le mur, il faudra d’autres solutions. Donc, je voudrais voir dans quelles mesures nous pourrions complémenter ou même corriger le modèle économique luxembourgeois avec la Belgique voisine et peut-être aussi la France et l’Allemagne.
Il vous reste un an encore à la tête de l’ambassade belge: quelles vont être vos priorités pour l’année à venir ?
Le chantier le plus important, c’est de pouvoir activer les autorités belges pour entamer un dialogue, prendre partie aux exercices stratégiques pour le développement du Luxembourg, en tant que partenaire motivé. Trouver un modèle inclusif, conjoint, de développement économique. Je regarderai aussi les dossiers européens, la Belgique prenant la tête de la présidence européenne l’an prochain, et je continuerai à trouver des opportunités de coopération entre nos pays.
La coopération spatiale par exemple… Je vois qu’il y a un potentiel pour la développer encore davantage ! Tout est pensable, tout est possible: nous ne faisons pas de compte d’apothicaire quand il s’agit de nos ambitions et vocations européennes.
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