Après Los Angeles, Ingrid Lempereur a connu le revers de la médaille
Ingrid Lempereur a vécu des moments difficiles après les JO de 1984. Parce qu’elle était mal face aux nombreuses sollicitations et cherchait ses meilleures sensations dans l’eau.
Publié le 26-12-2020 à 06h00
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Troisième à Los Angeles sur 200 brasse, 6e sur la même distance à Séoul quatre ans plus tard, Ingrid Lempereur se dit pourtant tout aussi satisfaite, voire plus, de cette dernière performance que de sa médaille. «Parce que les nageuses de l'Est étaient là cette fois (NDLR: le bloc de l'Est avait boycotté les Jeux de 1984) et la concurrence dès lors plus élevée, explique-t-elle. Et surtout parce que j'y voyais là la consécration d'un énorme travail dans des conditions difficiles. J'ai en effet vécu trois ans de galère après Los Angeles.»
Pour deux raisons. D'abord parce qu'elle n'est jamais parvenue à s'adapter à toutes les sollicitations, médiatiques ou mondaines, dont elle a fait l'objet. Accueillie comme une reine à Arlon, où un feu d'artifice fut tiré en son honneur sur une Grand-Place noire de monde, soumise à de multiples interviews, invitée à s'entretenir avec le roi Baudouin ou à recevoir de nombreux prix, la timide et introvertie Ingrid en souffrait. «Je ne demandais qu'à reprendre ma vie d'avant, j'avais besoin de souffler, avoue-t-elle. Heureusement, à l'école et au club, ça allait. On ne m'embêtait pas trop avec ça.»
«Mon corps a changé, j’ai dû m’adapter»
Son mental fut d'autant plus fragilisé qu'elle peinait aussi pour recouvrer ses meilleures sensations dans l'eau. «Un bond de six secondes, c'était énorme, il me fallait le temps de le digérer, détaille-t-elle. Et puis, je n'étais qu'une ado. Mon corps a changé, j'ai dû adapter ma façon de nager pour retrouver la même fluidité. J'ai essayé d'autres choses. Davantage sur 100 m ou alors en 4 nages. Mais il a fallu du temps pour que je réussisse à nouveau de bons chronos.»
Trois ans quasiment. Jusqu'à ces championnats d'Europe disputés à Strasbourg, où elle a décroché, sur sa distance de prédilection, la médaille d'argent en 2.29.79, presque deux secondes plus vite qu'à LA. «Cet Euro m'a libérée, poursuit l'Arlonaise. Parce que longtemps, j'ai cru que je ne parviendrais pas à surmonter mon passage à vide.»
Sur sa lancée, elle a bouclé son 200 m à Séoul un peu plus vite encore (2.29.42), avant de tirer définitivement sa révérence. Et un trait sur un passé dont elle n'a conservé que quelques souvenirs matériels. «Seulement ma médaille en fait, les autres trophées sont chez mon père», précise-t-elle.
Et plus de trois décennies plus tard, elle ne tremble plus à l'idée de répondre à une interview. Diserte, affable et souriante, elle y prend même un certain plaisir, même si elle ajoute qu'elle ne recherche toujours pas davantage la notoriété. «Mais avec les années, j'ai eu le temps de prendre de la bouteille», conclut-elle dans un éclat de rire.