Élections communale 2018 à Arlon: Trois listes rêvent de se fiancer avec le cdH
Seule une tripartite pourrait rejeter le cdH dans l’opposition, mais aucun des trois autres partis ne semble prêt à se lancer dans une telle aventure.
Publié le 29-08-2018 à 09h00
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Les observateurs les plus avertis de la vie politique arlonaise n’envisagent pas de réel bouleversement. En 2012, le cdH trônait largement en tête avec 11 sièges devant le PS (8), le MR (6) et les Écolos (4). Personne n’imagine un seul instant que les humanistes du bourgmestre Vincent Magnus perdent plus que 2 sièges.
Sa liste d’ouverture, Arlon 2030, à très forte coloration orangée, restera plus que probablement en tête de peloton et gardera la main pour choisir son (ou ses) futur(s) partenaire(s).

Par contre, le suspense est entier en ce qui concerne les résultats des trois autres partis, qui n’ont pas dérogé à la mode de se cacher (mais pas trop) derrière des listes d’ouverture au nom trafiqué: Pour vouS (avec un P et un S majuscules), le MRMC (avec un MC qui ouvre la porte aux citoyens non encartés au MR) et Écolo + (avec un + qui permet de présenter des candidats de la société civile). Personne ne sera évidemment dupe au moment où les partis se mettront à table pour négocier: les couleurs des bristols seront orange, rouge, bleue et verte.
Calculette à la main, chacun analysera les gains et les pertes des uns et des autres, ce qui pourrait changer la donne. Mais, dans les cas de figure les plus plausibles, Vincent Magnus et ses amis devraient choisir leur future fiancée en évaluant sa dot (le nombre de sièges acquis), son bagage intellectuel (la compatibilité des programmes) et son charme (l’empathie pour les futurs échevins).
Le PS veut se maintenir
André Perpète et le PS n’en menaient pas large voici un an, quand le parti d’Élio Di Rupo était empêtré dans les affaires. Mais le PS luxembourgeois ne traîne aucune grosse casserole à l’échelon provincial ou communal et les affaires semblent déjà presque oubliées dans l’esprit des électeurs. Perpète et ses amis se sentent capables de se maintenir à leur score de 2012 et, à tout le moins, de limiter la casse,
Le MR s’est trouvé une tête de liste de charme en la personne de Carine Lecomte et a réussi le gros coup du mercato, en attirant dans ses filets, l’ancien socialiste Alain Deworme, dont le nom risque de drainer un paquet de voix. Le ticket Lecomte-Deworme rêve d’effectuer le casse du siècle en dépassant le PS, voire mieux encore. Reste à voir comment l’électeur réagira au retournement de veste d’Alain Deworme.
Fraîcheur chez Écolo
Du côté d’Écolo, rejoint par Défi, la liste, certes plus jeune, se présente comme celle du renouveau et de la bonne gouvernance. Romain Gaudron, qui a occupé le crachoir au conseil communal pendant six ans et qui a aussi occupé le pavé de toutes les manifestations et événements du chef-lieu, a gagné en popularité surtout dans le cadre du dossier du parking souterrain. Sera-ce suffisant pour obtenir les 6 sièges dont il rêve, ce qui lui permettrait de se présenter comme un candidat sérieux aux yeux du cdH de Vincent Magnus?
PS, MR et Écolo pourraient envisager de s'allier et rejeter le cdH dans l'opposition, mais personne ne semble vraiment souhaiter cette solution. En tous les cas, personne n'ose le dire. «Ce serait probablement une solution pour que je devienne bourgmestre, admet André Perpète. Mais je dois penser à l'intérêt d'Arlon et je ne pense pas que se retrouver à trois au collège, soit une bonne solution.»

Le bourgmestre d'Arlon a passé ses derniers jours de vacances à Copenhague. «Mon dada, c'est la "smart city", insiste-t-il. Copenhague est une ville à la pointe dans ce domaine.» Pour le mayeur cdH, l'élaboration de la liste a été le premier devoir des élections communales. «Deux grands serviteurs de notre parti, mon prédécesseur au mayorat, Raymond Biren, et l'échevin des Travaux, André Balon, ne se représentent pas, regrette-t-il. Nous avons heureusement des jeunes de grande valeur qui vont pouvoir nous apporter beaucoup. L'avenir est au numérique, les choses vont aller de plus en plus vite. La jeune génération est prête pour ces nouveaux défis.»
Arlon, future reine des city-trips?
Si les électeurs ne sanctionnent pas durement son parti, la mathématique électorale devrait offrir au bourgmestre une voie royale avec le choix du parti avec qui il partagera le pouvoir jusqu'en 2024. «Notre partenaire actuel a été d'une totale loyauté, reconnaît le bourgmestre. Jamais André Perpète et son parti n'ont renié leur parole. 90 % des décisions prises au collège l'ont été à l'unanimité.» On pourrait donc croire qu'il n'y a aucune raison de changer une équipe qui gagne. «Ça, c'est une autre histoire, reprend Magnus. Nous ne fermons aucune porte et nous étudierons les différentes options potentielles. L'important sera de se mettre d'accord sur un projet pour les six prochaines années.» Le bourgmestre rêve d'une législature où ses objectifs seront atteints: «Si dans six ans, je peux présenter un bilan où Vivalia 2025, cette gabegie financière sans aucun respect pour le contribuable, sera enterré, qu'Arlon soit devenue une ville référencée comme une destination agréable pour un city-trip et qu'il n'y ait plus de cellules commerciales vides dans le piétonnier, je pense que je pourrai être fier.»
Pour le chef de file du PS : «Magnus ne sera pas le seul faiseur de roi»

André Perpète s'insurge un peu quand on présente l'actuel bourgmestre comme le futur faiseur de roi pour former la prochaine majorité. «Historiquement, le cdH est le parti le plus fort sur Arlon, entame-t-il. Mais il faut aussi noter que depuis la fusion des communes, il n'y a jamais eu de grand chambardement en nombre de sièges: le PS a toujours eu entre 7 et 9 sièges et le cdH n'a jamais varié de plus de 2 sièges, en plus ou en moins, par rapport à sa position actuelle. La seule chose vraiment unique, c'est qu'en 2012, pour la première fois, une alternative d'une majorité PS et MR était impossible avec 14 sièges sur 29. Cela signifie qu'il n'est pas inenvisageable que l'électeur offre aussi une possibilité d'alliance rouge-bleu, avec un bourgmestre issu de la liste qui aura recueilli le plus grand nombre de sièges.»
Le premier échevin et tête de liste de Pour vouS admet cependant que la reconduction de l'alliance actuelle entre son parti et celui de Vincent Magnus peut être envisagée comme largement plausible. «Nous avons un bon bilan, nous nous connaissons bien, nous avons de l'expérience et des hommes qui ont de la disponibilité pour travailler, constate-t-il. Mais il faut attendre de voir ce que va décider l'électeur.»
«Nous reprocher notre mauvaise gouvernance n’est pas crédible»
André Perpète balaie également d'un revers de la main les accusations venant d'Écolo concernant une gouvernance partisane de la part de son parti: «Écolo profite d'un incident isolé, certes inacceptable, parmi les 400 personnes qui travaillent pour la commune, pour jeter le discrédit et l'opprobre sur l'ensemble du personnel communal. C'est vraiment honteux! De plus, ils ont été déboutés de leur plainte par la ministre MR Valérie De Bue en ce qui concerne l'aide apportée à une ASBL qui loue à tout qui le veut, une salle de réunion. Soyons sérieux!»

Romain Gaudron, la tête de liste Écolo, rêve de se retrouver dans une majorité communale. «Écolo a le vent en poupe et devrait progresser, espère-t-il. En 2012, le PS a gagné le dernier siège de quelques voix. Je ne pense pas qu'il puisse garder ses 8 conseillers. J'imagine que les élections vont provoquer un resserrement des forces en présence pour les trois partis qui suivent le cdH. Pourquoi pas, trois partis avec 6 sièges chacun? Cela ferait de nous un candidat potentiel pour entrer au collège.»
La liste qu'il mène sous le nom d'Écolo + fait largement appel à des personnes nouvelles. «C'est une liste jeune, avec deux nouvelles dynamiques et hypermotivées, comme Vanessa Wagner et Géraldine Frognet et d'autres nouveaux venus qui rejoignent ceux qui sont en place. »
À ceux qui craignent que les fortes personnalités des deux nouvelles venues soient difficiles à gérer, Romain Gaudron rassure. «J'ai longuement discuté avec Géraldine et avec Vanessa, comme avec tous nos nouveaux candidats. C'est très sain d'avoir des gens qui ont beaucoup d'idées et qui sont motivés pour faire bouger les choses. Mais, tous sont parfaitement conscients que la politique est un combat qui passe par le débat et la conciliation de positions parfois différentes.»
En imaginant une législature où il serait assis à la table du conseil, Romain Gaudron rêve de pouvoir dresser un bilan final où la bonne gouvernance aurait été l'un des points forts de son action: «Les subventions à des associations qui ont des accointances partisanes fortes et la gestion du personnel communal où des privilégiés sont protégés, ont été le lot de la précédente législature. Le bourgmestre a laissé faire pour ne pas mettre sa majorité en péril. S'il devait encore couvrir ces agissements dans le futur, ce ne serait plus une erreur politique. Ce serait une faute de gestion.»
Elle se verrait bien bourgmestre

Carine Lecomte (MR) ne le cache pas, elle se verrait bien être la prochaine bourgmestre d'Arlon. N'ayant jamais siégé ni dans un conseil communal, ni dans un collège, elle ne craint cependant pas de plonger en terre inconnue. «Les quatre années que je viens de passer au Fédéral et à la Région wallonne m'ont beaucoup appris, se défend-elle. Les pouvoirs locaux sont au centre de beaucoup de nos débats. J'ajouterai que de débarquer dans un nouveau niveau de pouvoir permet de regarder les choses avec un regard neuf et d'apporter une certaine fraîcheur par rapport à ceux qui sont ancrés dans leurs habitudes.»
La députée wallonne du MR, qui devra quitter son mandat en cas de présence au collège, que ce soit comme bourgmestre ou comme échevine, prend son futur possible rôle au sérieux.
La preuve, depuis un an, elle assiste régulièrement aux séances du conseil communal.
Alain Deworme, de socialiste à libéral

«Je suis en rupture avec la manière partisane dont on fait de la politique, indique Alain Deworme qui a démissionné de son mandat de député provincial PS en février 2014. Les instances de mon parti m'obligeaient à travailler contre l'intérêt de l'hôpital d'Arlon. Pour moi, c'était impossible.»
Quatre ans après son départ, le socialiste se retrouve sur une liste MR. «J'étais un social-libéral, se justifie Alain Deworme. À l'image de Macron, je suis devenu un libéral-social, cela ne change rien à mes convictions. Au MR, j'ai trouvé des gens beaucoup plus ouverts, des réformateurs progressistes. M'inscrire dans la pensée libérale n'est pas un problème pour moi.»
Cette fois, il part en campagne derrière la tête de liste Carine Lecomte, un duo que ses adversaires politiques ne manqueront pas de présenter comme un mariage opportuniste.