La clignette wallonne de Michel Francard: Tu dmandes a ou tchin s’ i vout oun-och ?
Chaque semaine, Michel Francard, spécialiste du wallon de Bastogne, présente, traduit et recontextualise des expressions en wallon de la province de Luxembourg. Ce jeudi 25 mai, au tour de Tu dmandes a ou tchin s’ i vout oun-och ? , littéralement "Tu demandes à un chien s’il veut un os ?"
Publié le 25-05-2023 à 18h37 - Mis à jour le 25-05-2023 à 18h41
Savez-vous ce qu’est une "question rhétorique" ? C’est un procédé stylistique qui consiste à poser une question sans vraiment attendre de réponse, tellement cette dernière est évidente.
Le wallon se prête à des questions rhétoriques, dont certaines sont à ce point partagées qu’elles ont fini par prendre un tour proverbial. C’est le cas de l’expression du jour: Tu dmandes a ou tchin s’ i vout oun-och ?, littéralement "Tu demandes à un chien s’il veut un os ?"
La question est purement rhétorique, tant la réponse s’impose: un chien ne va pas refuser l’os qu’on lui propose. Appliquée à des humains, cette évidence est rappelée chaque fois que l’on est placé devant un choix qui n’en est pas un. La question "Veux-tu une tasse de café ?", adressée à un accro à la caféine, n’attend qu’une réponse affirmative.
Comme pour souligner le caractère incongru de la question, le tutoiement est employé: Tu dmandes a ou tchin s’ i vout oun-och ? Ce n’est pas un hasard: si, en français, le tutoiement est familier et bien accepté, en wallon il est généralement considéré comme déplacé, même entre des personnes qui se connaissent très bien. Devant leurs enfants, les parents se vouvoyaient en wallon ; il n’était pas rare que frère et sœur fassent de même.
Ce tutoiement jugé incongru est à la base d’un virelangue que je vous cite dans la version de Bastogne: Pocwè ç’ ku tu dis ti a mi k’ è stî si bon por ti ?, littéralement "Pourquoi dis-tu tu à moi qui a été si bon pour toi ?"
Même en wallon, il est toujours recommandé d’être poli…