L’alcool chez les jeunes : "Les services croulent sous les demandes"
Peu de chiffres fuitent sur la (sur)consommation d’alcool chez les ados de la province du Luxembourg. Pourtant, le phénomène est présent et banalisé
Publié le 09-03-2023 à 17h08 - Mis à jour le 09-03-2023 à 17h31
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Durant tout le mois de février, de nombreuses personnes ont participé à la célèbre Tournée minérale. Ce challenge, proposé depuis quelques années, invite à passer tout un mois sans boire une goutte d’alcool. L’objectif étant de réfléchir à sa consommation habituelle mais aussi à se rendre compte des bienfaits liés à l’absence de ce breuvage.
Nous nous sommes penchés sur la consommation d’alcool chez les jeunes. "Il y a très peu de chiffres en la matière, déplore Marie Sainlez, responsable du Service ODAS Coordination basé à Etalle, un service qui propose un accompagnement dans la problématique des drogues et assuétudes. Pourtant, les cas explosent chez les jeunes. Nous sommes face à une société qui prône cette consommation via des publicités et des messages forts qui touchent les adolescents. On constate notamment cela avec la marque Jupiler." Selon la spécialiste, un gros travail d’éducation est à faire autant avec les jeunes qu’avec leurs parents. "La plupart des adultes banalisent cette consommation d’alcool, poursuit-elle. Face à des problèmes de cannabis, il n’est pas rare d’entendre certains parents souligner qu’ils préfèrent voir leur enfant se mettre une bonne cuite plutôt que de fumer un joint. Cette conception est dangereuse et il faut y remédier."
"La santé mentale en pâtit"
Selon Marie Sainlez, la consommation chez les jeunes est précoce puisqu’elle se situe aux alentours de 13 ans. "La crise Covid laisse aussi des traces, poursuit-elle. Enfermés pendant deux ans, les adolescents se sont remis à sortir et à consommer. Certains sont tout de suite passés aux alcools forts, sans transition avec des alcools plus légers. Les dégâts sont donc plus importants."
De quoi se montrer pessimiste pour l’avenir ? "La prévention est importante mais quasiment inexistante, souligne la dame. On voit plus de spots de prévention sur l’alcool au niveau de la sécurité routière que sur les dangers à court et moyen termes. On est malheureusement toujours dans l’acte répressif et non préventif. Au niveau de la province de Luxembourg, les services d’aide croulent sous les demandes. L’alcool bien entendu, mais également les problèmes d’assuétudes en général. La situation est dramatique puisque la santé mentale des jeunes en pâtit également. Les moyens dont nous disposons ne sont pas assez importants."
Du côté de la Coordination Luxembourg des assuétudes (CLA), on abonde dans le même sens. "Pour pouvoir avoir des chiffres sur le problème, il faudrait que chacun puisse s’exprimer librement sur le sujet, souligne Nieves Raucy, coordinatrice au CLA. Nous aimerions bien évidemment avoir des statistiques mais il faut pour cela mettre les moyens pour une étude solide et sérieuse."
Pour la coordinatrice, il est bien évidemment essentiel de mettre beaucoup d’énergie sur la prévention. "C’est très important mais pas toujours évident, précise-t-elle. Dans certains établissements scolaires, le sujet semble tabou. Certaines directions estiment que leur population d’élèves n’est pas confrontée au problème. Si on se voile la face, difficile d’avancer. Pour un travail préventif qui a du sens, il faut que tous les acteurs soient partie prenante et que le sujet soit abordé sans tabou. Et cela vaut pour tous les problèmes d’assuétudes."
Selon la coordinatrice, les moyens manquent cruellement et la situation est difficile mais pas dramatique. "Il est essentiel de déconstruire les représentations de tous, adultes comme adolescents."