Province du Luxembourg: l’emploi menacé chez les trois Delhaize? (vidéo)
Les Delhaize le Lion d’Arlon, Marche et Libramont ont gardé portes closes hier en réponse à la direction qui veut les franchiser.
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Publié le 07-03-2023 à 14h43 - Mis à jour le 07-03-2023 à 16h00
L’annonce faite par la direction de Delhaize le Lion de franchiser les 128 magasins du groupe en Belgique concerne trois magasins dans la province de Luxembourg : ceux de Marche-en-Famenne, Arlon et Recogne (Libramont). Ces trois grandes surfaces emploient entre 150 et 180 personnes au total. Selon les syndicats en front commun CSC et FGTB, personne ne s’attendait à pareille annonce ce mardi matin : “Nous sommes venus travailler ce matin tout à fait normalement, explique Nancy Deschoemaecker, déléguée CNE, employée depuis 20 ans au Delhaize de Marche-en-Famenne. Vers 8h15, on a appris la nouvelle. Ce fut le choc. Le personnel est désemparé, certains pleurent. C’est la consternation. La direction nous dit que cela ne va rien changer pour nous. C’est faux : si on passe en franchise, ce sera avec des pertes d’emplois. Le personnel qui restera sera sous une autre commission paritaire bien moins intéressante et donc il y aura des pertes de revenus importantes pour le même travail. Nous avons décidé très vite de fermer les portes du magasin. Notre clientèle découvrait la chose ce matin aussi et elle est derrière nous. ”
Un couple travaille au magasin à Marche. Que va-t-il devenir ?
Du côté de la FGTB, on ne dit pas autre chose, comme l’explique Vincent Lemmens, délégué FGTB, boucher depuis 40 ans chez Delhaize : “On est déjà sous plan de restructuration. Que voulez-vous faire d’autre ? Et pourtant, notre “chère” direction continue. C’est consternant tout d’abord dans la façon de procéder puisque nous n’avions rien vu venir et ensuite dans les terribles conséquences que sa décision va entraîner pour tout le personnel. Des gens ici travaillent au Delhaize de Marche-en-Famenne en couple. Comment vont-ils faire ? ”
Quand on lui demande si la grève se fera au finish, M. Lemmens précise que tout reste possible, en fonction de l’évolution de la situation. “On attend des nouvelles, mais on peut déjà se préparer à une catastrophe. Toutefois, nous restons tous déterminés. ”
À l’intérieur du magasin, des employés, ébahis, sèchent leurs larmes. Le directeur, qui n’a pas l’autorisation de s’adresser à la presse, est dans le même bateau.
Deux anciens permanents syndicaux CSC à la retraite se sont joints au mouvement ce mardi matin, par solidarité : “Ça fait mal de voir cela. Vous imaginez le nombre de travailleurs que cela concerne dans tout le pays ? Ils ne méritent pas cela. C’est pour cela qu’on n’a pas pu rester tranquillement à la maison”, concluent-ils.
Quant à Françoise Malherbe, permanente FGTB, elle s’indigne de ce que les commissions paritaires vont changer : “En plus de la menace réelle sur l’emploi, les employés qui seront repris par les franchises ne bénéficieront plus des commissions paritaires négociées en son temps et qui leur étaient profitables. (N.D.L.R. : lire aussi ci-dessous). Maintenant, on attend des informations complémentaires de la direction de Delhaize et le retour des instances nationales du syndicat vers les régions. ”

“Autant de milliers de gens en franchise, c’est du jamais vu ! ”
Évelyne Zabus, permanente CNE, négocie, elle, dans le dossier Mestdagh-Intermarché. Elle n’est pas directement concernée par les négociations chez Delhaize. Son éclairage est toutefois intéressant. Pour elle, le secteur est en pleine mutation et pas pour le meilleur d’un point de vue social : “Il y a toujours eu des franchises ; mais autant de milliers de travailleurs concernés, c’est du jamais vu ! C’est une véritable régression sociale”, précise-t-elle. Pour étayer ses dires, elle sort des chiffres : “Aux 2 000 employés de Mestdagh, viennent s’ajouter les 9 000 de Delhaize ! Déjà que ce n’est pas évident de trouver un repreneur indépendant pour les 51 magasins Intermarché, ce sera encore plus compliqué en ajoutant les 128 magasins de Delhaize le Lion”, déplore-t-elle encore.
Ce qu’ils risquent de perdre
Actuellement, la commission paritaire de Delhaize le Lion (magasins non franchisés) fait bénéficier le personnel des 128 magasins belges des conditions suivantes : 35 heures de travail par semaine, travail le dimanche sur base volontaire, salaire pas mirobolant, mais un peu plus élevé. Si les magasins et le personnel sont repris par un indépendant, la loi (32 bis) obligera ce dernier à maintenir certains avantages qui, malheureusement, s’étioleront au fil du temps.