Un café de Florenville verbalisé: «Il faut se pincer»
Pendant le confinement, des clients terminent leur bière dix minutes après la fermeture légale. 4 400 € d’amende ?
Publié le 17-06-2022 à 06h00 - Mis à jour le 17-06-2022 à 09h04
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Le 10 août 2020, il est 1h10 du matin quand les policiers de la zone de police de Gaume débarquent au café Cap 56, un établissement bien connu, situé sur la place Albert Ierà Florenville. Une dizaine de clients sont attablés, la plupart ont un verre bien rempli. Aucun ne porte le masque obligatoire. Un peu plus loin, la terrasse surélevée étant décalée de quelques mètres de l’établissement, les lumières sont toujours allumées à l’intérieur du café.
À cette date, les mesures sanitaires drastiques pour contrer la crise du coronavirus, prises en mars, quelques mois auparavant, ont été allégées suite à une accalmie des contaminations. Les contacts sociaux sont à nouveau admis, les rassemblements permis, mais limités. Les établissements de l’horeca ont pu rouvrir sous certaines conditions dont celle de fermer au plus tard à une heure du matin. Il est une heure et dix minutes. Les policiers décident de dresser un procès-verbal.
Le gérant du café et sa société sont poursuivis par le parquet devant le tribunal de police. Lors d’un jugement en première instance, les prévenus ont été relaxés, le juge estimant l’action en justice irrecevable. Il considère que les arrêtés ministériels instaurant les mesures prises dans le cadre de la pandémie, sont illégaux.
Le ministère public déterminé, MeFourny courroucé
Le ministère public ne l’entend pas de cette oreille. Il a décidé de faire appel de ce jugement, se basant sur la jurisprudence de cours d’appel, mais aussi sur des avis de la Cour de cassation. "Le premier juge est complètement dans l’erreur, insiste le substitut Yannick Rosart. Les arrêtés ministériels sont légaux et l’action publique est recevable. Je requiers une amende de 4000 € contre la société et de 400 € contre son gérant."
L’avocat chestrolais MeDimitri Fourny défend les prévenus. Dans un premier temps, il a argumenté en se basant sur des articles de loi contradictoires assez obscurs, avant de prendre un ton courroucé pour rappeler les faits: « Quand on tient un établissement de boissons, une fois la fermeture actée, il faut laver les verres, ranger les tables, faire la caisse, remplir les frigos. Le café était fermé. Mon client vaquait à ces occupations et n’avait pas éteint les lampes. Il faut se pincer pour comprendre qu’il est poursuivi parce que clients étaient toujours sur la terrasse dix minutes après l’heure de fermeture imposée par une loi spéciale soi-disant légale. Je vous demande d’acquitter mon client, ou, au pire, de lui accorder la suspension du prononcé. » Le juge Pierre Nazé lira le prononcé le 27 juillet.