Les oiseaux aiment les sapins de Noël
Les plantations de sapins de Noël peuvent remplacer des haies disparues et attirer des oiseaux, mais à condition que…
- Publié le 23-01-2018 à 06h00
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Les plantations de sapins de Noël à la place de prairies soulèvent parfois des polémiques, tout comme d’autres cultures non-alimentaires. Ce qui rend les sapins de Noël antipathiques, c’est surtout la façon dont ils peuvent être cultivés: intensivement, sur de grandes surfaces et à renfort de pesticides et d’herbicides. Le sapin de Noël couvre quelque 5 000 ha en Wallonie, principalement en Ardenne. Par ailleurs, les pratiques agricoles intensives ont entraîné un déclin de nombreuses espèces d’oiseaux.
Des ingénieurs agronomes de Gembloux (ULg Agro Bio Tech) et des ornithologues avertis ont considéré ces conversions de prairies intensives en plantations de sapin de Noël sous un nouvel angle. Ils ont mené leur étude dans la région de Bièvre et Gedinne en 2013, étude dont les résultats ont été publiés l’an dernier. Et ils ont découvert que les sapins de Noël peuvent améliorer les milieux ouverts et faire revenir des espèces d’oiseaux, des passereaux.
Plus de haies, plus d’oiseaux
La conclusion de leur étude: une plantation de sapins de Noël améliore la diversité d'un milieu quand celui-ci comporte moins de 70 m de haie par hectare dans les environs immédiats. «Dans nos paysages d'Ardenne où les haies ont disparu, les sapins de Noël ramènent de la structure là où il y a de grandes surfaces, constate Robin Gailly, l'un des cinq auteurs de l'étude, qui prépare une thèse de doctorat à Gembloux. Au contraire, si on se situe sur des prairies déjà riches en biodiversité, il vaut mieux les laisser, l'arrivée du sapin de Noël est négative. L'effet positif est moins bon quand la plantation de sapins est vaste de quelques hectares, d'un seul tenant et du même âge. Dans ces conditions, les oiseaux ne se tiennent qu'en bordure de parcelle. Le phénomène est d'ailleurs le même avec le miscanthus. »
Tolérer les «mauvaises herbes»
D'autres critères interviennent: «Les oiseaux peuvent être attirés par un habitat qui n'est pas optimal, ils peuvent se tromper. C'est le cas quand on y trouve trop de pesticides. Il est important de trouver des plantes adventices, des ''mauvaises herbes'' qui fournissent de la nourriture. Il faut une certaine tolérance aux ''mauvaises herbes'' qui apportent des graines et attirent les invertébrés, les insectes. Les oiseaux qui s'installent dans une parcelle où les adventices ne sont pas tolérées doivent multiplier les allers-retours plus loin pour nourrir leur progéniture. Au final, l'idéal, c'est un paysage diversifié, avec des petites parcelles et une certaine tolérance aux ''mauvaises herbes''. »
Quatre espèces, observées par écoutes durant la saison de nidification, ont particulièrement été repérées: la linotte mélodieuse, le bruant jaune, l’accenteur mouchet et le tarier pâtre. A contrario, les observations ont montré qu’aucune espèce répandue en prairie ne disparaît à cause de l’introduction de plantations de sapins de Noël.
Une nouvelle étude prolonge actuellement celle-ci: son objectif est de comparer le succès reproducteur d’une espèce modèle, en l’occurrence le tarier pâtre, dans différents milieux, dont les plantations de sapins de Noël.
Gailly, R., Paquet, J.-Y., Titeux, N., Claessens, H. & Dufrêne, M. (2017): Effects of the conversion of intensive grasslands into Christmas tree plantations on bird assemblages. Agriculture, Ecosystems & Environment, 247: 91-97.