Laurent, tué sur la place St-Lambert à Liège: "Dix ans après la mort de notre fils, une perte inconsolable"
En marge du bonheur d’une famille qui s’agrandit, Claudine et Thierry se souviennent de la tragique disparition de leur fils Laurent Kremer (20 ans), évoquant le drame avec émotion et sobriété.
Publié le 12-12-2021 à 18h00
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La douleur ne s’atténue pas, même une décennie après la perte de l’un de leurs deux fils. La fusillade de la place Saint-Lambert survient au cœur de Liège, en ce mardi 13 décembre 2011. Présent dans la foule sur le temps de midi, Laurent Kremer (20 ans, de Crisnée) attend, avec sa copine, à l’arrêt de bus lorsqu’il est atteint par une grenade lancée par Nordine Amrani, un criminel multirécidiviste en libération conditionnelle qui avait peur de retourner en prison. Grièvement blessé, le jeune Hesbignon est plongé dans un coma artificiel dès son arrivée à l’hôpital. Neuf jours plus tard, il y succombera à ses blessures.
«Cela ne sert à rien de broyer du noir»
"Dix ans, cela paraît beaucoup et finalement, on est encore proche dans le souvenir, nous dit Thierry Kremer. Les stigmates restent encore très présents. Cette notion du temps est fort abstraite. Le manque est toujours bien là. On vit avec, et comme on l'a déjà dit, on ne s'habitue pas à cette absence, on s'adapte. Lorsqu'on dit que le temps arrange les choses, je ne suis pas trop d'accord avec cela. Le temps nous aide à apprivoiser une certaine tristesse et à poursuivre la vie, car elle nous demande de continuer… Finalement, après réflexion, on a quand même pu presque survivre, mais vivre aussi, avec des réjouissances, sachant que cette année, et c'est peut-être un heureux hasard, notre deuxième fils vient d'être papa de jumeaux."
Un garçon et une fille, âgés aujourd'hui de cinq mois, agrandissent la famille. "C'est une réjouissance qui nous fait beaucoup de bien, d'autant qu'on ne peut pas vivre tout le temps avec la tristesse. On a forcément des moments plus difficiles, comme les dates qui sont là pour nous rappeler des choses. Mais on n'attend pas de date anniversaire pour se souvenir de Laurent. La famille, les amis, les collègues nous le rappellent en permanence. Il est clair que nous, on parle quasiment tous les jours de Laurent. Il reste présent dans nos esprits mais toujours avec un côté positif. Cela ne sert à rien de broyer du noir, sinon on ne va plus rien faire dans la vie. La preuve, avec ces petits bouts qui ont besoin de nous."
Souhaitant perpétuer la mémoire de leur fils, les parents de Laurent avaient fait don de ses organes. Un geste de générosité permettant de sauver d'autres personnes. "Mon épouse, Claudine, a spontanément proposé le prélèvement, se souvient Thierry Kremer. Même si on n'en avait jamais parlé auparavant, j'ai été d'accord avec elle. Les médecins se sont d'abord montrés étonnés de cette initiative. Laurent ne sera jamais papa, mais, d'une certaine manière, il a donné la vie."
«Avec le don d’organes, Laurent a sauvé des dizaines de personnes»
Laurent était quelqu'un de très gentil, de très attentionné, et de généreux. "Il se destinait au métier d'instituteur, une profession qui nécessite d'être particulièrement attentionné à l'égard des enfants."
Le don d'organes de Laurent aura permis de sauver plusieurs vies. "Combien, on ne le sait pas vraiment, même si on parle de sept personnes, car on fait le lien avec les organes. Mais il y avait également un don de tissus… Avec le recul, j'ai envie de dire qu'il a sauvé des dizaines et des dizaines de personnes, car les mentalités ont changé sur le don d'organes. Quelque part, Laurent aura permis de sauver d'autres personnes. Et ce qui nous réjouit, c'est qu'on peut désormais marquer sa volonté de donner ses organes par internet, ce qui constitue une belle avancée, surtout quand on sait que les jeunes y sont en permanence."
«On doit vivre avec...»
Les parents de Laurent ont décidé de se battre pour promotionner le don d'organes, se rendant à de multiples reprises dans les établissements scolaires, mais aussi en animant diverses conférences. "Cela nous a aidés à avancer. Laurent était un excellent porte-drapeau par rapport à cela, un bon symbole. Notre étoile nous a guidés vers la résilience, une certaine sérénité. On n'est pas soulagés, on ne sera jamais guéris de cette absence, de cette mutilation, car nous sommes blessés à tout jamais. Même si le temps qui passe semble nous apporter une forme d'apaisement. Le fait d'avoir promu le don d'organes fut aussi une manière de faire connaître Laurent aux autres."
Noël est, comme chaque année, une fête particulière, car c’est à ce moment-là que Laurent nous a quittés. Mais cela ne nous empêche pas de garnir un sapin, d’organiser un échange de cadeaux.
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Dix ans après le drame, Claudine et Thierry devraient se rendre ce lundi 13 décembre à une commémoration devant la stèle située sur la place Saint-Lambert. "Pour nous, Noël est, comme chaque année, une fête particulière, car c'est à ce moment-là que Laurent nous a quittés. Mais cela ne nous empêche pas de garnir un sapin, d'organiser un échange de cadeaux. On doit vivre avec cette disparition, on n'a pas le choix…"
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