La défense de Sami Haenen plaide l’acquittement
Les avocats de Sami Haenen, Me Lamy et Me Wilmotte, ont plaidé mardi après-midi son acquittement devant la cour d’assises de Liège.
Publié le 13-10-2021 à 06h00
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Selon la défense, rien de pénalement répréhensible ne peut être retenu contre l’accusé.
Sami Haenen, un Flémallois âgé de 34 ans, est poursuivi pour des faits assimilés à un délit de presse. L’accusé avait proféré entre le 12 et le 19 octobre 2020 des menaces d’attentat à l’égard des femmes ou des féministes et avait incité à la haine ou à la violence envers les femmes.
Me Audrey Lamy a énoncé plusieurs éléments de droit pour mettre en cause les préventions reprochées à Samy Haenen. Selon elle, les éléments constitutifs des infractions ne sont pas réunis. Les menaces ne peuvent être retenues si elles résultent d’un emportement passager, si elles ne constituent pas un danger immédiat ou si elles ne sont pas dirigées contre une personne déterminée, de nature à constituer une crainte sérieuse.
Pour Me Alexandre Wilmotte, il est impératif de ne pas se tromper en analysant la personnalité de Sami Haenen avant de le juger. «Sami Haenen se retrouve sur le banc des accusés, dans une cour d'assises, alors qu'il n'a tué personne et n'a porté atteinte à l'intégrité physique de personne. Il n'y a pas de partie civile au procès et pas de plaignant, mais il aurait causé la terreur?», a souligné Me Wilmotte.
L’avocat de la défense a indiqué que son client est détenu depuis un an pour les faits qui lui sont reprochés. Il a purgé cinq mois à la prison de Lantin en détention normale et sept mois sous le régime du bracelet électronique.
Me Wilmotte estime que la législation actuelle est dépassée et inadaptée aux réseaux sociaux qui, à l'inverse des médias classiques, ne sont pas coresponsables des contenus qu'ils hébergent. «Zéro responsabilité! En réalité, les réseaux sociaux bénéficient d'une impunité. Et si Facebook était responsable, je ne suis pas convaincu que Mark Zuckerberg aurait été renvoyé aux assises?», a lancé l'avocat. Me Wilmotte affirme aussi que son client est utilisé pour faire un exemple, puisqu'aucune cour d'assises n'a été organisée depuis de nombreuses années pour juger de tels faits. L'avocat conteste l'élément moral des infractions et affirme que rien de pénalement répréhensible ne peut être retenu contre Sami Haenen. «Aucun danger immédiat et certain n'apparaît dans ses propos, il n'y a pas de personne déterminée ciblée», a-t-il relevé. L'avocat a également exhibé aux jurés le livre Moi les hommes, je les déteste, disponible en vente sur Internet. «L'ouvrage, menacé de censure, ne l'a pas été en raison de la liberté d'expression. C'est un plaidoyer contre les hommes. L'auteur de ce bouquin, vendu en parfaite liberté, est le pendant féminin de Sami Haenen, mais en pire!»
Menacer, ce n’est plus de la liberté d’expression
Avant la plaidoirie de la défense, l’avocat général avait soutenu que l’accusé a bien commis un délit de presse ainsi que des menaces verbales proférées sur les réseaux sociaux. Selon l’avocat général Brigitte Goblet, plusieurs dispositions constitutionnelles entrent en action lors de ce procès exceptionnel. La loi, la jurisprudence et la doctrine seront les outils des jurés lorsqu’ils devront déterminer la culpabilité de Sami Haenen.
«Ce procès permet de juger quelqu'un qui a subi une déception amoureuse depuis 10 ans. Sa déception s'est transformée en rage à l'égard des femmes, au point d'adhérer à une espèce de sous-culture Incel, née aux États-Unis et qui cloue au pilori les féministes et les femmes, considérées comme responsables de la misère sexuelle et affective des hommes», a annoncé l'avocat général en contextualisant les faits reprochés à l'accusé. Pour l'avocat général, Sami Haenen doit être déclaré coupable de la prévention liée au délit de presse, car il a bien exprimé une menace. La terreur qu'il voulait inspirer est un des éléments qui constituent l'infraction.
«La liberté d'expression n'est pas une liberté absolue. Elle a des limites. Il n'est pas permis de commettre une infraction dans le cadre de l'exercice de ses libertés. Quand on menace quelqu'un, ce n'est plus la liberté d'expression qui prévaut, c'est l'infraction. Le délit de presse est un écrit reproduit par un imprimé ou par un procédé similaire, tel que le numérique. Ce qui est écrit sur le net relève donc du délit de presse», a détaillé l'avocat général.