45.000 consommations de drogues dures en moins dans les rues
Créée il y a 3 ans pour encadrer et sécuriser les drogués, la première salle de consommation de drogues dures à moindres risques (SCMR) du pays installée à Liège ne désemplit pas.
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Publié le 12-10-2021 à 18h30
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Trois ans après son ouverture, la première salle de consommation de drogues dures à moindres risques (SCMR) du pays installée dans le quartier Cathédrale-Nord, juste à côté du commissariat Wallonie Liège-Centre, ne désemplit pas. Ils sont nombreux à s’y presser quotidiennement pour consommer leurs stupéfiants en toute sécurité et à l’abri des regards. Dans cet endroit baptisé Sâf’ti («Protège-toi» en wallon) qui comprend une zone d’injection et une autre d’inhalation, il est ainsi possible de s’adonner à quatre types de modes de consommation: l’inhalation (héroïne ou cocaïne), l’injection (via des seringues), le sniff (de cocaïne, mais aussi d’héroïne), ou encore la prise de drogues par voie orale.
Pionnière en Belgique en la matière, Liège participe activement au projet Tadam, bravant néanmoins la Loi du 24 février 1921 qui interdit à quiconque de faciliter la consommation de substances illicites. «Malgré nos trois ans d’activités sans difficultés et sans incidents, mineurs ou majeurs, cela n’a pas entraîné une reconnaissance légale du processus de la part du fédéral», regrette Dominique Delhauteur, le coordinateur général de la fondation privée Tadam, laquelle réunit la Ville et la Province de Liège, ainsi que des hôpitaux.
Le projet liégeois porte néanmoins ses fruits, comme en témoignent la diminution de la toxicomanie en rue et l’attrait d’autres villes, comme Charleroi et Bruxelles, pour ce type de structure. «Nous avons été désignés comme opérateur par la Ville dans le cadre d’un marché public, mais le délai s’étant terminé au 1er septembre dernier, nous avions dû fermer nos portes. N’étant plus couvert par une quelconque convention, nous avions encore plus de risques qu’avant de tomber sous la Loi de 1921 s’il y avait eu une plainte quelconque. Raison pour laquelle nous avons par prudence et responsabilité fermé, avant que la Ville ne nous désigne pour une nouvelle durée de 3 ans. On a l’accord du parquet local, des autorités médicales locales, etc.»
Ouverte tous les jours, la salle liégeoise a enregistré 45.000 actes de consommation en trois ans. 945 personnes inscrites se sont présentées sur les trois ans et ont donc consommé au moins une fois des drogues dures. On y observe 146 consommateurs qui s’y présentent chaque mois.
Voisine de Maastricht, Liège est confrontée depuis longtemps à une consommation importante de drogues, y compris sur la voie publique. Eradiquer complètement cette problématique est illusoire, mais l’accompagner permet d’éviter certaines dérives en rue. Quid des éventuelles overdoses? «On en a régulièrement, avec des arrêts cardiaques et respiratoires, mais nous n’avons jamais eu de personne décédée», précise Dominique Delhauteur.
L’objectif maintenant? Élargir les heures d’ouverture de la salle, pour permettre aux toxicomanes d’y venir non stop.
Lorsqu’on sait que 74% de nos dépenses sont consacrées au personnel, il nous faudrait un million d’euros de subventions.
«Nous dressons un bilan positif de nos trois ans d’activités dans la mesure où on a rempli nos objectifs, mais on peut certainement encore faire beaucoup mieux. Cela demande des extensions de plages horaires ou une politique plus active dans la rue pour amener les consommateurs à la salle de consommation. Le seul bémol, c’est le coût. Lorsqu’on sait que 74% de nos dépenses sont consacrées au personnel, il nous faudrait un million d’euros de subventions.»
Nous examinons également actuellement la possibilité de mettre en place un second centre en Wallonie, à Charleroi.
La ministre wallonne de la Santé Christie Morreale (PS) se dit «favorable aux salles de consommation à l’instar de celle de Liège». «Nous venons d’ailleurs de prolonger le financement pluriannuel de Tadam à hauteur de 830.000 euros par an», souligne-t-elle. Ce qui permet de fonctionner avec douze équivalents temps plein, ainsi qu’avec deux médecins. «Nous examinons également actuellement la possibilité de mettre en place un second centre en Wallonie, à Charleroi. Des budgets sont prévus à cet égard dans le cadre du Plan de relance wallon», conclut Christie Morreale.