VIDÉO | Willy Demeyer: «Je pense avoir encore une vision, de l’énergie et une mission au service de Liège»
Liège est en pleine mutation, avec la prochaine arrivée du tram dont les travaux sont en cours dans la Cité ardente. L’occasion de rencontrer le bourgmestre de Liège, Willy Demeyer.
Publié le 27-01-2020 à 20h00
Fin de semaine dernière, le bourgmestre de Liège et vice-président du PS, Willy Demeyer, nous reçoit dans son bureau de l’hôtel de ville. Il nous invite à prendre place dans un petit salon, un café à portée de main, avant d’évoquer Liège, «sa» ville, pour laquelle il aime se battre.
M. Demeyer, vous avez connu des problèmes de santé l’an dernier. Comment vous portez-vous?
Cela va fort bien, je fais tout ce qu’on me dit de faire. Je prends quelques médicaments et je suis des séances de revalidation cardiaque. Et j’essaie de ne pas voir trop de journalistes. (Rires.)
Arrivez-vous désormais à lever le pied ou êtes-vous toujours sur le qui-vive?
Partiellement. Parce que l’actualité, la gestion des phénomènes sociétaux, on ne sait pas y échapper. Et puis vous avez des gens qui disent: «Fais bien attention à toi, sais-tu, et n’oublie pas mon dossier». Je m’organise désormais autrement, donc cela va bien. Et je viens d’avoir toute une série de résultats médicaux ce (jeudi) matin et qui sont tous impeccables.
Vous aviez renoncé à siéger à la Chambre afin de vous concentrer sur votre reconduction à l’hôtel de ville de Liège. Vous n’avez pas de regrets?
Non, pas du tout. C’est-à-dire qu’il fallait choisir un moment. C’est vrai que quand vous avez la chance d’être bourgmestre de Liège, c’est une responsabilité qui éclipse toutes les autres. Maintenant, il est vrai que je suis juriste de formation, avocat de profession, spécialisé par la force des choses dans une série de matières qui fait que j’étais reconnu comme un parlementaire compétent, et qui comptait. Mais voilà, la vie est faite de choix et en ce qui me concerne j’ai choisi à un moment où je n’y étais pas obligé. C’est cela la différence.
L’opinion publique ne supporte pas que vous fassiez deux ou trois choses en même temps.
D’ici quelques années, pourriez-vous choisir une autre voie?
La motivation que j’ai eue à ce moment-là était d’empoigner des dossiers importants pour la Ville sur lesquels j’avais déjà travaillé. Je sentais bien que les choses avaient changé. Maintenant, l’opinion publique ne supporte pas que vous fassiez deux ou trois choses en même temps. La sensibilité de la population est exacerbée sur tout. Exacerbée sur les réseaux sociaux. Donc, si vous ne vous adaptez pas à cela, vous disparaissez et je pense avoir encore une vision, de l’énergie et une mission au service de Liège. Et travailler pour Liège, c’est travailler pour la Wallonie, la Belgique, l’Europe et même le monde quand on voit qu’ici on a 160 nationalités différentes. Il faut essayer de bien faire ce qu’on fait.
Ne venez pas nous dire que vous n’avez pas d’autres ambitions politiques...
J’ai été reconduit comme vice-président du PS avec Paul Magnette et Philippe Close qui sont deux amis, et aussi une jeune dame du Brabant wallon. Je suis très content parce que nous allons, avec mes deux collègues bourgmestres et d’autres, mettre en place toute une série de choses qui sont importantes pour le développement de la Wallonie.

Le tram, la colonne vertébrale du futur liégeois
Liège est en pleine mutation. Comment peut-on imaginer le Liège de demain, l’avenir de Liège?
Le tram, c’est la colonne vertébrale qui va tout desservir. Un exemple: la nouvelle piscine, très difficile à construire dans un hypercentre-ville, mais très bien située par rapport à toutes les écoles où tous les petits Liégeois vont et pas seulement tous les petits Liégeois. Ceux qui ne viendront pas à pied prendront le tram. Tout le reste est à l’avenant. Donc, c’est le renforcement de la centralité, du développement durable, le renforcement de la fonction culturelle - c’est fait -, aussi la ville du quart d’heure, comme dit Anne Hidalgo. Je suis à la fois assez proche d’Anne Hidalgo et assez fan de la vision, mais ils ont d’autres moyens que nous. Ils ont tous les moyens de la France pour le faire. Une ville où il fait bon vivre, où l’espace public doit être apaisé. Cela ne veut pas dire que la voiture doit être rejetée de partout, mais elle doit être amenée à sa juste place et il faut donc des alternatives. Il faut aussi un habitat adapté. Un des grands risques qui nous guette, c’est qu’on voit bien que le prix de l’immobilier, qui était assez abordable à Liège, commence à flamber. Cela veut dire que la mixité sociale ne sera plus possible. On va trouver ce qu’on trouve ailleurs, c’est-à-dire les classes moyennes, moyennes inférieures, rejetées dans les périphéries. J’ai observé cela notamment aux États-Unis récemment, et cela donne alors le mouvement des gilets rouges, les électeurs de Trump, avec tous ceux qui se sentent rejetés des villes. Pour l’instant, c’est le phénomène contraire. On est encore un peu sous le règne de la quatre façades périphériques, mais cela s’inverse. On a à peu près 10.000 permis de bâtir en cours, parfois liés à de grands projets comme Coronmeuse. Et les dossiers n’arrêtent pas de survenir. Donc, c’est plutôt bien. Il faut aussi avoir une réponse à la polytoxicomanie et au sans-abrisme, c’est un problème pour nous, mais qui est un problème mondial. Il faut alors trouver une forme de gouvernance pour la supracommunalité. Si vous observez la France, l’Allemagne ou l’Espagne, on arrive à organiser une masse critique en termes de population, en termes de volet budgétaire qui permet d’avoir d’autres ambitions, d’autres projets. Si nous n’y arrivons pas, tous les territoires qui n’arriveront pas à s’organiser deviendront des zones de troisième ou de quatrième catégorie. Donc, l’enjeu c’est de savoir si nous serons une métropole entre Lille et Cologne. Et si on regarde Bruxelles, la région bruxelloise a la taille critique, elle commence à avoir l’organisation. Donc, la région bruxelloise est une métropole, avec un territoire, un corps de règles, une population, une masse critique autour d’un million. Eux sont sur le bon chemin et la Wallonie doit apprendre à bien traiter ses grandes villes et sa métropole.
De quelle manière, selon vous?
Il faut un corps de règle adapté. Un financement, mais surtout un corps de règle. On ne sait pas combattre le droit de propriété, qui permet de faire tout et n’importe quoi, c’est-à-dire la meilleure et la pire des choses, comme les night shop, les kots dans n’importe quelle condition. Tout cela doit être organisé autrement.
Dans notre vidéo ci-dessus, sa vision pour l’avenir de Liège.

«L’arrivée du MR au lieu du cdH dans la majorité, cela correspond à une réalité politique», explique Willy Demeyer (PS). «Puisque j’avais toujours dit et tout le monde le sait que je souhaitais une majorité à 27 minimum. Parce qu’il faut un minimum de stabilité. Vous ne pouvez pas être à la merci d’un malade, d’un absent, d’une mauvaise humeur, donc il faut une petite marge, la majorité étant à 25. Je vous invite à aller regarder les PV de toutes les réunions. À l’époque, j’ai publié tous les PV des réunions et vous verrez que c’était la seule possibilité puisque le cdH a émis des préalables qui étaient impossibles à rencontrer. Avec Écolo, ce n’était pas possible, et Écolo et Vega s’étaient disputés. Donc, il ne restait plus que cette bipartite-là. J’avais pressenti la sensibilité sociale du MR pour Liège et vous voyez que les faits ne l’ont pas démenti. Et puis, cela fait une forme d’alternance. Sociologiquement, cela n’est pas choquant à la condition que nous soyons sensibles aux accents sociaux - cela fait partie du job du PS -, qui n’est pas contrecarré par MR pour Liège, et que nous soyons aussi sensibles à tout ce qui est environnemental, développement durable, écologie, etc. Ce qui est le cas également. Les Ecolos l’auraient peut-être mieux fait. Mais être bourgmestre de Liège et être dans la majorité de Liège, cela nécessite aussi une vision économique, d’accepter la gestion de la sécurité, de prendre des responsabilités sur le plan budgétaire. Vous devez d’une manière ou d’une autre épouser toutes les facettes.» (Th. L.)
