Maigret aura bientôt 90 ans
Il n’a jamais existé mais est bien présent dans l’imaginaire collectif. Le commissaire Maigret fêtera bientôt ses 90 ans.
- Publié le 21-02-2019 à 06h00
C'est au printemps 1930 que le commissaire Maigret naît de l'imagination, très fertile, de Georges Simenon. Avec Pietr-le-Letton, l'écrivain liégeois signe d'ailleurs pour la première fois de son nom un roman, après quelque 200 ouvrages publiés sous pseudonymes. Dans la foulée, il écrira trois autres Maigret, sentant qu'il «tient» enfin sons style. Quatre romans qui paraîtront au début de l'année 1931 chez Fayard.
Même Mr Bean
Le célèbre commissaire fête donc bientôt son nonantième anniversaire alors qu'en septembre prochain, il y aura trente ans déjà qu'est mort Georges Simenon. «Tous les vingt ans, nous confie Pierre Assouline, écrivain et biographe de Simenon, une nouvelle génération découvre Maigret et, dans la foulée, Simenon.»
Et il est vrai que le célèbre commissaire, pourtant bien loin des experts des séries télévisées continue à fasciner, que ce soit dans les rééditions de ses aventures ou à l'écran. Pour preuve, même Rowan Atkinson – Mr Bean – a dernièrement pris les traits de Jules Maigret. «Un défi original et surprenant, estime Pierre Assouline, et ce n'était finalement pas mal, ça valait le coup d'essayer.»
Pour autant, «le» Maigret de Pierre Assouline est sans conteste Bruno Crémer qui a longtemps incarné le commissaire dans un décor des années 50. «Il avait l'épaisseur, la hauteur et la présence du personnage imaginé par Simenon. Sa sobriété aussi. Ça nous parle.»
Le purgatoire Colombo
C'est pourtant à cause de la télé que Maigret va connaître le purgatoire. «Lorsque l'inspecteur Colombo arrive sur les écrans, il adopte certains codes de Maigret. Il va alors faire de l'ombre au commissaire. Mais plus tard, l'inspecteur américain va se démoder. Ça n'arrivera pas à Maigret pour une raison très simple, il n'a jamais été à la mode! Il ne correspond à la police d'aucune époque. Simenon l'avait compris en campant avant tout un être humain.»
Un seul Simenon
Trente ans après la mort de l'écrivain, le regard sur l'œuvre de Simenon évolue-t-il encore? «L'entrée de Georges Simenon dans la Pléiade, en 2003, a changé le regard du monde littéraire sur l'auteur liégeois. Parce que cette édition a été une étape importante dans la reconnaissance des Maigret. Pour les intellectuels, il y avait deux Simenon, celui des romans populaires avec Maigret et celui des romans durs. Depuis, l'œuvre de Simenon est considérée comme un seul bloc qui raconte ce que j'appelle la condition humaine.»
Pierre Assouline préface le premier volume (sur dix) de «Tout Maigret», une nouvelle collection dont les couvertures sont illustrées par Loustal, un habitué des rééditions de Simenon. Dans cette préface, il l'avoue, son préféré, c'est Les mémoires de Maigret. «Pourtant, c'est en quelque sorte un non Maigret. Il n'y a pas d'enquête, rien. Mais il a une originalité remarquable et on y trouve une mise en abîme de Simenon, à la fois auteur et personnage, qui est extraordinaire.»
Tout Maigret, éditions Omnibus, dix volumes à paraître d’ici le 4 avril, 28€ environ chaque volume.