Ateliers pratiques, l’avenir de l’unif?
Pour ses portes ouvertes aux rhétos, l’ULg proposait des ateliers participatifs. Appâter l’étudiant? L’unif s’en défend et parle de réorientation pratique.
Publié le 03-02-2017 à 18h45
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Le générique des Experts résonne dans l'auditoire. À proximité du pupitre professoral, une silhouette est dessinée au sol, entourée d'un ruban jaune prohibitif. Dans cet amphi, les stigmates d'une véritable scène de crime se dévoilent aux élèves de rhéto, venus découvrir l'ULg.
Il s’agit en réalité de l’un des 62 ateliers participatifs mis sur pied par les différentes facultés de l’université, dans le cadre de sa Journée enseignement secondaire. L’objectif: présenter les études de manière inédite, et surtout pratique.
Cette séance intitulée Dans les coulisses des experts – qui fait salle comble – en est un exemple probant. Les étudiants sont invités à découvrir les différentes facettes de la criminalistique.
Les démonstrations de techniques scientifiques, comme la prise d’empreintes digitales, l’analyse de fibres textiles ou de traces de sang, s’enchaînent. L’exposé présente par ailleurs les dernières recherches en la matière, qui ne manquent évidemment pas d’intérêt.
Mise en scène pour attirer l’étudiant?
Cette immersion pratique soulève néanmoins quelques questions: dans quelle mesure cette présentation illustre-t-elle la réalité des études universitaires? Ne s’agit-il pas, finalement, d’une simple manière d’appâter le futur étudiant?
«Il est vrai que nous présentons les études de manière attractive, mais l'objectif, dans le cas de cet atelier en particulier, est de montrer que derrière cette discipline se cache toute une série de métiers. Car une dizaine de disciplines tournent autour du métier d'expert», réplique Éric Haubruge, Premier Vice-Recteur à l'ULg.
Ce responsable académique se dit toutefois conscient de la réalité des études et du marché de l'emploi. «Il est clair que nos étudiants ne travailleront pas tous à l'Institut national de criminalistique. Cela dit, certains d'entre eux feront sans doute de la chimie ou de la biologie, par exemple.»
Davantage de pratique à l’unif
Ces ateliers concrets s’inscrivent ensuite dans une volonté de souligner l’orientation pratique des études universitaires. Une logique qui tendrait à s’affirmer dans les années à venir. Éric Haubruge l’assure: l’unif n’est plus seulement théorique.
«Nous sommes clairement à la croisée des chemins. Le seul principe de transfert des savoirs relève d’une époque révolue! Aujourd’hui, à l’ULg, on investit déjà beaucoup plus dans la pédagogie de projet, comme en faculté de sciences appliquées.»
Cet élan plus pratique, professionnalisant, n'est donc pas chimérique. «L'Institut du Val Benoît va d'ailleurs se doter d'une structure qui proposera des formations courtes, entre 5 et 30 heures, et qui répondra aux besoins précis du marché et des entreprises.» Les facultés sont aussi en train de revoir leurs programmes dans ce sens, «avec des projets qui devraient aboutir dans les deux ans».
Filières en pénurie
Durant ces portes ouvertes aux rhétos, plusieurs disciplines avaient visiblement la cote. Quid des filières en pénurie, a priori moins attractives? «On essaie aussi de les valoriser, soutient Éric Haubruge. Si je prends le cas des ingénieurs, il y a davantage d'étudiants inscrits cette année. On travaille beaucoup sur les nouvelles technologies, on est d'ailleurs en train de lancer un master sur le big data.» Quant aux sciences dures, l'ULg tente progressivement de développer des alternatives à la recherche au sens strict, «en encourageant une logique de doctorat entrepreunarial».
Pour élargir cette capacité d'ancrage, l'unif se dit en constante discussion avec les pôles de compétitivité des entreprises. «Nous cherchons sans cesse de nouveaux partenariats. Car l'université est incapable de porter ces projets seule.»
«Il faut sortir de la tour d’ivoire»
Des portes ouvertes qui dévoilent l’aspect concret des études universitaires, cela peut prêter à sourire, surtout lorsqu’on se remémore ces interminables séances face à un syllabus.
Bien qu'elles présentent des divergences, les universités francophones s'accordent sur un point: leurs programmes d'études ne se limitent pas à un simple bagage théorique. «Il faut oublier cette image de l'université enfermée dans sa tour d'ivoire, clame Ghislaine Viré, conseillère du recteur à l'ULB. Il existe évidemment des aspects pratiques, notamment par le biais des stages.»
Même constat du côté de l'UCL. «Depuis le décret Bologne, nous avons développé des stages dans 80% des filières. Ceux-ci durent entre un et trois mois , explique Marc Lits, prorecteur à la formation et à l'enseignement. Ensuite, nous menons actuellement une réflexion sur l'insertion socioprofessionnelle.» L'idée? Proposer une offre de modules, qui faciliteraient l'insertion des étudiants sur le marché du travail. « Des cours de langue, par exemple, mais aussi ce que l'on appelle les soft skills, qui recouvrent la conduite de réunions ou la gestion d'un groupe», et qui constituent de nouveaux enjeux, pour les universités.