Soins de santé: des «facilitateurs» pour aider les plus démunis
Pour faciliter l’accès aux soins de santé des publics précarisés, un nouveau métier vient d’être créé: celui de Community health worker.
Publié le 02-07-2021 à 18h07
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Comment prendre rendez-vous chez le médecin? Comment remplir correctement les papiers de la mutualité? En Belgique, certains publics fragilisés sont démunis face à ces questions. C’est donc pour répondre à cette problématique que le projet de Community health workers a été lancé par le ministre de la Santé Frank Vandenbroucke, et mis en œuvre par l’ensemble des mutualités.
Au total, cinquante facilitateurs santé ont été déployés, il y a tout juste deux mois, dans des quartiers identifiés comme réunissant des groupes vulnérables.
Une bonne connaissance du terrain
Jessica Henry fait partie de ces facilitateurs et travaille à Seraing, Jemeppe et Ougrée.
Son parcours ? «J'ai d'abord été agent de sécurité, j'ai ensuite travaillé dans l'horeca pour enfin décrocher un bachelier d'éducatrice spécialisée.»
Mais ce n'est pas sur base de son diplôme que Jessica a été recrutée.«Ce qui est intéressant dans ce projet, c'est que le focus est mis sur certaines villes. Nous ne sommes que cinquante en Belgique, il fallait donc concentrer nos efforts sur un nombre limité de quartiers. L'idée étant d'avoir une bonne connaissance du quartier couvert, et idéalement, d'y vivre. Ce qui n'est pas mon cas, mais par contre, j'ai grandi ici, et ma famille y vit toujours. Nous avons par ailleurs reçu une formation spécifique pour exercer ce métier. »
Une démarche proactive
Lancée dans l’aventure en mai dernier, Jessica a pour mission d’orienter un public fragilisé vers les soins de santé de première ligne. Pour ce faire, c’est à elle d’aller à la rencontre de la population.
«On fréquente les milieux où vit la population : je fais des maraudes dans les quartiers, je me rends dans les parcs, dans les plaines de jeux. C’est délicat d’aborder une personne en lui demandant si elle a des difficultés. Donc finalement, après quelques minutes, ce sont les gens qui me demandent ce que je fais là. Et on peut alors entamer la discussion.»
La Community health worker est également en contact avec plusieurs associations de terrain. «Il y a des associations qui font des colis alimentaires, des boutiques de vêtements de seconde main, etc. Et elles me mettent alors en contact avec certains publics. Je vais aussi dans les maisons médicales et chez les médecins traitants pour savoir s'ils ont toujours de la place. Ce qui me permet d'orienter les personnes qui n'ont pas de médecin traitant chez eux, par exemple.»
Les accompagnements sont souvent d’ordre administratif: il s’agit notamment de réinscrire les citoyens à la mutuelle.
«Il y a aussi des personnes qui n’ont pas conscience qu’elles peuvent bénéficier d’un statut BIM (NDLR: bénéficiaire d’intervention majorée). Or, payer le médecin ou ne payer que le ticket modérateur, ça change la donne!»
Pas de crédit pour le call center
Le contact avec les citoyens peut être récurrent pour des démarches assez poussées, ou ponctuel. « En pleine période Covid, évidemment, notre rôle est aussi d'informer sur la vaccination. Quand il y a des craintes, on y répond. La crise a clairement creusé les inégalités: certaines personnes n'ont pas la télé, pas Internet. Elles ont l'info par l'intermédiaire de leurs voisins… La réticence à l'égard de la vaccination relève davantage de la désinformation que d'une réelle appréhension. »
Dans ce contexte, le facilitateur santé peut aussi réaliser l'inscription des individus concernés: «Il y a des personnes qui ne savent ni lire ni écrire, d'autres reçoivent la convocation papier mais n'ont pas de crédit pour appeler le call center … C'est compliqué pour elles. On peut d'ailleurs aussi les accompagner physiquement jusqu'au centre de vaccination, pour qu'elle ne se sentent pas perdues.»
En Wallonie, les Community health workers sont actifs dans les régions de Liège, Verviers-Dison et Charleroi. Ce projet-pilote sera évalué à la fin de l’année, avant d’être éventuellement pérennisé.