"Du bois de rallonge pour la Ville"
Avec la prolongation de l’activité de Tihange 3 jusqu’en 2035, la Ville de Huy est assurée de toucher 5 millions€ annuels de taxes.
Publié le 21-03-2022 à 06h00
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Le gouvernement fédéral a décidé vendredi soir de prolonger de dix ans la durée de vie des deux plus jeunes réacteurs nucléaires sur le sol belge. À savoir le 3e réacteur de la centrale de Tihange et le 4e de celle de Doel. Une bonne nouvelle pour les syndicats, pour les emplois indirects, mais aussi pour les finances de la Ville de Huy. C'est en tout cas le sentiment du bourgmestre ff Éric Dosogne. "Je m'attendais à cette prolongation d'une unité jusqu'en 2035. Pour l'approvisionnement énergétique du pays, c'était indispensable. Je suis favorable au développement des énergies renouvelables, mais il faut bien avouer qu'à court et moyen terme, la Belgique allait connaître de sérieux problèmes. Selon moi, il aurait même fallu maintenir deux unités à Tihange, car il manque toujours 1 000 mégawatts. Sans compter que de plus en plus de gens se tournent vers la voiture électrique…"
Avec le maintien de Tihange 3, c'est la garantie pour la Ville de Huy de toucher quelque 50 millions€ de taxes entre 2025 et 2035. Pour rappel, Engie verse actuellement 15 millions€ annuels pour l'exploitation des trois unités. Soit quasiment un tiers du budget communal (47 millions€). "Ces montants proviennent à la fois de la taxe sur le précompte immobilier (environ 80% du montant) et de la taxe sur la force motrice (environ 20%). Lorsqu'une unité est à l'arrêt, nous ne touchons donc pas une partie de la seconde taxe", rappelle Éric Dosogne.
Pour la confection du budget de l’année prochaine, la Ville devra composer avec le paramètre nucléaire, puisque la fermeture de Tihange 2 est prévue dès février 2023 alors que celle de Tihange 1 aura lieu en septembre 2025.
«Plus facile d’atterrir sur une piste d’un kilomètre que sur une de 800 m»
"En réalité, cette prolongation, c'est du bois de rallonge pour 10 ans, ajoute encore le maïeur faisant fonction. Ça ne va pas changer la transition dans laquelle nous nous sommes engagés. Nous voulons tendre vers des économies, en modernisant nos services au sein de la future cité administrative de la rive guache. Nous avons déjà regroupé sur les services techniques sur le site Heine. Christophe Collignon l'a déjà dit: nous voulons aussi renforcer l'image touristique de Huy, via notamment le retour du téléphérique et la future piscine. Sans oublier la silver economy (NDLR: développement de maisons de repos). Donc non, ce prolongement de dix ans ne change rien. Même si c'est plus facile d'atterrir sur une piste d'un kilomètre que sur une de 800 mètres."
Seul regret d'Éric Dosogne: que la décision n'ait pas été prise plus tôt. "Engie est en position de force à présent, juge-t-il. Il va faire monter les prix. Nous ne transigerons toutefois pas sur la sécurité des habitants et des travailleurs."
Dès ce week-end, Engie a déjà fait savoir, si on peut dire, de quel bois de rallonge il se chauffait: la décision de prolonger Doel 4 et Tihange 3 soulève "des contraintes importantes de sûreté, de régulation et de mise en œuvre, d'autant que cette prolongation interviendrait alors même que les activités de démantèlement sur des unités voisines auront commencé".
Tihange 3 prêt en 2025 pour tourner dix de plus?
La décision de prolonger jusqu'en 2035 "présente ainsi un profil de risque qui dépasse, par son caractère imprévisible et par son ampleur, l'activité normale d'un opérateur privé", a encore expliqué Engie. "Le schéma retenu devra permettre un alignement structurel des intérêts des parties prenantes ainsi qu'un partage adéquat des risques et des opportunités."
Opérationnel depuis 1985, Tihange 3 sera-t-il prêt en 2025 pour tourner dix de plus?
Mandatée par le gouvernement fédéral pour mener les négociations avec Engie, Tinne Van der Straeten a redit ce week-end qu'il n'y avait "aucune garantie sur un succès des négociations". Le Premier ministre Alexander De Croo, lui, se veut beaucoup plus optimiste. À la Ville, on va forcément suivre les débats des prochains mois d'un œil très attentif.