Des femmes violées sur la transhesbignonne: un appel à l’aide lancé aux Communes
Après plusieurs récents viols de femmes et une agression au couteau dans le couloir migratoire hesbignon, la Plateforme de soutien aux réfugiés lance un appel à l’aide aux Communes.
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- Publié le 21-01-2022 à 19h04
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Mesdames et messieurs Tout-le-monde. C’est ce qu’ils étaient avant d’entreprendre ce grand voyage pour une vie meilleure. Avant de devenir malgré eux des transmigrants, des réfugiés. Et ceux-ci sont aujourd’hui contraints d’essuyer les dures réalités de leur condition nouvelle: viols, agressions en tout genre, froid, détresse psychologique… Et parmi les plus vulnérables d’entre eux, il y a les femmes mais aussi les homosexuels.
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Dernièrement, en Hesbaye, plusieurs femmes en transit se sont retrouvées violées. Dont une pas plus tard qu’il y a une quinzaine de jours, à Crisnée. La plateforme citoyenne de soutien aux réfugiés n’en a été informée que ce mercredi.
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"Des bénévoles de la plateforme ont reçu un appel au secours de transmigrants, relaie Sophie Godefroid, bénévole de la Plateforme. Lorsqu'ils sont arrivés dans le camp précaire d'où émanait l'appel, ils ont trouvé, prostrée au fond d'une tente, une jeune femme…"
«Elle a été mise en sécurité»
Les faits sont troubles mais la jeune femme présentait tous les signes d'un traumatisme, "vraisemblablement consécutifs à une agression sexuelle". La dame a été écartée du camp et mise en sécurité. "Nous avons pu lui trouver un hébergement et mettre en place un accompagnement et les soins nécessaires." Aucune plainte n'a été déposée, comme c'est souvent le cas puisque les transmigrants craignent de se rendre à la police (lire par ailleurs).
Dans les camps de migrants précaires, les femmes sont exposées à tous les dangers!
Ces faits sordides démontrent l'importance de mettre en place un hébergement spécifique aux femmes sur la route migratoire. "Il y a bien la Sister's House de Huy qui accueille les femmes, mais uniquement les week-ends. Ce dispositif est aussi assez éloigné du couloir migratoire. La semaine, elles se rendent donc dans les camps précaires", à Waremme, à Fexhe-le-Haut-Clocher et plus récemment à Crisnée; au plus près de l'axe autoroutier. Ceci pour espérer embarquer dans le camion qui les emmènera vers l'Angleterre. Dans ces camps, "elles sont exposées à tous les dangers".
«Je lance un appel à l’aide aux Communes»
Vu ce contexte tendu, la Plateforme citoyenne, "Hesbaye, terre d’accueil", lance un énième appel aux Communes traversées par le couloir transmigratoire hesbignon pour venir en aide aux transmigrants. Communes qui, pour la plupart, s’en lavent les mains depuis des années. Et royalement.
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"Je lance un appel aux responsables politiques pour trouver des solutions dignes face à cette situation inhumaine", ne désespère pas Sophie Godefroid, qui précise que depuis la fermeture de l'ancienne maison communale de Crisnée (fermée pour travaux en vue de pérenniser l'accueil des transmigrants, entre autres), le groupe qui y était jusqu'alors hébergé s'est retrouvé dehors. Ce qui n'arrange rien à la situation.
«Les particuliers peuvent aussi se manifester»
Ce que revendique l'association? "On aimerait que soient mis en place un ou plusieurs lieux d'hébergement pour les femmes, non mixtes surtout. Il y a aussi un besoin d'hébergement pour les hommes", indique la bénévole, qui demande également aux pouvoirs locaux de "soutenir les citoyens bénévoles qui portent depuis plusieurs années cette aide humanitaire", souvent aux dépens de leur propre vie privée, de leur propre santé.
Mais ce n'est pas tout puisque la Plateforme demande la mise en place de points de contact permettant une aide directe, ceci pour répondre aux besoins de base (manger, se laver, se soigner…) mais aussi au besoin d'information sociale, administrative et juridique… "Les particuliers qui possèdent des biens inoccupés sont aussi appelés à se manifester."
L’appel à l’aide des bénévoles transmis à la Conférence des élus
Après avoir pris connaissance de l'appel à l'aide lancé par la Plateforme citoyenne, le bourgmestre de Waremme, Jacques Chabot, l'a transmise à la Conférence des élus. "Vu que cet appel est adressé à un bon nombre de Communes, j'ai transmis la lettre envoyée par Sophie Godefroid au président de la Conférence des élus, Éric Hautphenne, pour la sensibiliser à ces réalités, dit-il. On verra collégialement ce que chacun peut faire pour venir en aide à ces personnes. Toutes les Communes sont concernées par cette problématique!"
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Le mayeur a également transmis la lettre au président du CPAS de la capitale hesbignonne, Luc Vandormael, qui rappelle qu’en plus de tout ce qui a déjà été fait, le CPAS aspire à mettre en place une solution pérenne pour l’accueil des sans-abri dont les transmigrants font partie.
"On a débloqué 30 000€ destinés à payer un auteur de projet (NDLR: pour la construction éventuelle d'un lieu d'accueil). Là, on est en train de rédiger l'appel d'offres.Deux orientations s'offrent à nous: répondre à un appel à projets de la Région wallonne pour lutter contre le sans-abrisme ou essayer de créer une infrastructure sur fonds propres comme des conteneurs. Mais cette dernière solution n'est pas pérenne…"
«Les migrants ont peur de porter plainte»
Étant en séjour illégal en Belgique, les femmes victimes de viols – tous les transmigrants victimes d'agressions d'ailleurs – sont terrorisées à l'idée de porter plainte auprès de la police. "Ils n'osent pas s'adresser à la police belge de peur d'être arrêtés. Or, et on leur dit, ces personnes sont des victimes et la police les traitera comme telles", dit Sophie Godefroid.
Du côté de la police, même discours: "En tant que policiers, on doit d'abord adopter une attitude humanitaire, informe André Jamers, chef de corps de la zone de police Hesbaye. Le procureur du roi de Liège a d'ailleurs déjà rappelé qu'on doit faire preuve de tolérance."
Migrants ou pas, ils ont le droit au statut de victime.
Et le policier de rassurer les personnes en transit: "Ils ne doivent jamais avoir de crainte quant au fait qu'ils seront pris en charge. Migrants ou pas, ils ont le droit au statut de victime et le fait qu'ils soient en séjour illégal ne change rien à cela. On sait qu'ils sont là. Il y a une forme de tolérance par rapport à cela, car on a conscience du drame humain qui se joue", affirme le commissaire divisionnaire, qui précise que c'est le rôle de la police que de rechercher les auteurs de faits et de les livrer à la justice. "C'est notre mission!"
Des vérifications mais pas d’inquiétude
Le seul fait d'être en séjour illégal ne constitue pas un risque pour les transmigrants vis-à-vis de la police. Mais des vérifications sont toujours réalisées. "Il nous appartient de veiller à ce que la personne ne fasse pas l'objet de mesures, qu'elle n'a pas été elle-même l'auteur d'un fait ou qu'elle ne prend pas part à un trafic d'êtres humains. Ce sont des choses dont on doit tenir compte bien évidemment." André Jamers le répète, "ils ne doivent pas avoir peur de dénoncer des faits".
À noter qu’un point a été ajouté à l’ordre du jour du conseil de police de ce vendredi concernant l’appel à l’aide lancé aux Communes par la Plateforme.