Première mondiale à Engis: des blocs de maçonnerie écologiques fabriqués avec du CO2
Quatre sociétés belges vont innover ensemble dans des blocs de maçonnerie écologiques. Dont Prefer à Engis (fabrication et commercialisation), et Lhoist à Saint-Georges qui lui fournira une partie de ses fumées. Voici CO2ncrEAT.
Publié le 09-01-2023 à 16h24 - Mis à jour le 09-01-2023 à 16h26
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Hermalle-sous-Huy va devenir la capitale mondiale du bloc de maçonnerie écologique à l’horizon 2025. Un consortium de quatre sociétés belges vient d’être sélectionné par un fonds européen à l’innovation en vue de l’obtention d’un subside de 4,5 millions d’euros. Avec leur projet CO2ncrEAT ("manger du CO2"), les sociétés Prefer (Engis), Lhoist (Saint-Georges), toutes deux implantées en bord de Meuse, Fluxys Belgium et Orbix (Farciennes) vont ensemble innover. Comment ? En captant du CO2 directement de fumées industrielles pour les faire réagir avec des déchets de sidérurgie et ainsi fabriquer des blocs. C’est Orbix qui a développé cette technologie de carbonatation. Lhoist, le leader mondial de la chaux situé rive gauche, fournira une partie de ses fumées. Et ces dernières seront acheminées par un pipeline à construire par Fluxis Belgium jusqu’au site Prefer situé rive droite.
17 millions de blocs par an
C’est là que la production aura lieu. "Sur nos deux sites de Flémalle et de Hermalle-sous-Huy, nous fabriquons actuellement 17 millions de blocs de béton par an, ce qui équivaut à 3 400 maisons. L’intention est de progressivement remplacer cette gamme qui pollue par notre nouvelle gamme innovante de blocs de maçonnerie écologiques, se réjouit Raphaël Grimont, le directeur général chez Prefer, leader belge dans la production et la commercialisation de blocs de maçonnerie en béton. Ces 100 000 tonnes de blocs annuelles seront uniquement fabriquées sur notre site à Hermalle car il serait autrement plus coûteux et difficile de construire une conduite beaucoup plus longue pour acheminer des fumées de Lhoist jusqu’à Flémalle."
Cette conduite aura une longueur de 2 kilomètres entre les deux sociétés et passera en dessous du pont de Hermalle pour franchir la Meuse. "Elle sera raccordée à une installation au pied de la cheminée de notre four cuisant la pierre dolomitique, explique Laurence Indri, responsable communication chez Lhoist. On peut résumer cela à un aspirateur qui captera une partie des fumées émises. Il sera commandé depuis l’usine Prefer. Ainsi, près de 12 000 tonnes vont pouvoir être capturées, transportées et réutilisées dans les blocs au lieu d’être émises dans l’atmosphère."
Empreinte carbone négative
Le consortium insiste sur cet aspect. Leur projet CO2ncrEAT est motivé par le désir collectif d’aider à décarboner l’industrie belge. Car ce partenariat vertueux offrira aussi une voie de valorisation durable pour certains résidus solides de la sidérurgie. En l’occurrence, Lhoist livre de la chaux à une succursale d’Arcelor qui fabrique de l’inox et dont les scories sont récupérées et valorisées par la société Orbix.
De cette valorisation, restent encore des déchets appelés carbinox que la société Prefer va faire réagir avec les fumées de chez Lhoist. Et c’est donc cette réaction chimique qui va donner le produit fini après 24 heures dans une chambre de cure dont l’atmosphère sera chargée en CO2. "On n’utilisera donc plus de ciment, éclaire Raphaël Grimont. Ces blocs de nouvelle génération auront la même allure et les mêmes caractéristiques que les blocs en béton traditionnels, mais avec une empreinte carbone négative puisqu’ils renfermeront plus de CO2 qu’il n’en faut usuellement pour les produire. Leur production avec des matières premières recyclées permettra d’éviter 8 000 tonnes d’émissions de CO2 additionnelles."
Depuis deux ans, la société Prefer a fait des tests de production mais avec du CO2 pur dont le prix d’achat (100 € la tonne) allait rendre le bloc écologique beaucoup plus coûteux qu’un bloc en béton traditionnel. L’utilisation d’une partie des fumées de Lhoist va permettre de tendre davantage vers des prix habituels. "On ne parle plus de CO2 pur. On va récupérer la fumée sans la purifier ni la liquéfier. La seule transformation sera de diminuer la température des fumées sur le site de Lhoist pour pouvoir ensuite les transporter par le pipeline jusque chez nous. C’est ce qui rend notre projet innovant. Je pense qu’il s’agit d’une première mondiale", assure le directeur général de Prefer.
Production prévue début 2025
Les partenaires espèrent voir les premiers blocs écologiques sortir des murs engissois en 2025. Le temps d’obtenir tous les permis nécessaires à la construction du dispositif d’extraction et de refroidissement des fumées chez Lhoist, du pipeline Fluxys et de la chambre de cure sur le site Prefer. "Pour le reste, notre usine qui n’a que deux ans est exploitable", termine Raphaël Grimont.