"Charleroi a urgemment besoin de succès"
Acteur du renouveau économique et de la formation en alternance, Simon Bullman fait état de ses espoirs et de ses attentes pour Charleroi. Entretien.
Publié le 17-01-2023 à 10h37 - Mis à jour le 17-01-2023 à 11h38
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Président de l’Institut wallon de formation en alternance des classes moyennes (IFAPME) et président de Sambrinvest, Simon Bullman porte un regard optimiste sur la transformation de Charleroi. Mais il met en garde: "Jamais on n’a été aussi près de délivrer des grands projets. Dans ce cadre, les cinq prochaines années vont être déterminantes", observe-t-il. Ce seront en effet celles de la concrétisation !
Simon Bullman, qu’est-ce qui vous donne envie d’y croire ?
Depuis plusieurs années, nous parvenons à réussir ce qui semblait impossible jusque-là: mettre nos forces au service de projets communs. Coconstruire et mutualiser les outils en travaillant ensemble plutôt que chacun de son côté, cela impose de rechercher ce qui peut unir au lieu d’identifier ce qui divise. C’est un profond changement de mentalité et de logique. Cela me galvanise.
A-t-on dépassé l’individualisme ?
Le cloisonnement a trop souvent et longtemps démontré ses limites. Il y a encore de vieux réflexes conservateurs, mais les barrières commencent à tomber. Les organisations et les entreprises ont compris la nécessité à ne plus fonctionner en silo. Chacun y perd sans doute un peu de pouvoir et d’influence, mais quel gain d’efficacité pour les utilisateurs !
Quel exemple concret pouvez-vous donner ?
Celui de l’enseignement et de la formation: la Cité des métiers et le Campus des sciences, des arts et des techniques en sont de belles illustrations. Pour que ça marche, il faut se différencier, sous peine de sombrer dans les travers de la concurrence malsaine. La Cité des métiers représente l’opportunité pour Charleroi de prendre une dimension de vitrine, d’institution de référence. Quant aux universités, elles pourront demain ensemble proposer une offre unique en Wallonie, avec le meilleur de ce qu’elles font chacune.
Considérez-vous qu’il y a urgence ?
C’est clair ! Nous sommes dans un bassin de vie où le taux de diplomation des jeunes est en dessous de la moyenne wallonne, une région où le taux d’emploi est de 53% contre 71% à l’échelle nationale… Alors oui, il y a urgence à sortir du fatalisme ! L’IFAPME que je préside ne peut pas être partenaire de tout, mais pour réformer l’alternance, la Wallonie a besoin de son expertise. Il faut repenser l’alternance, c’est notre responsabilité collective. Nous sommes prêts à nous investir à fond là-dedans.
Il existe un noyau dur de jeunes difficiles à intégrer…
Sans aucun doute, je pense à la population des NEETS, ces jeunes de moins de 25 ans qu’un acronyme désigne par ce qu’ils ne sont pas (ni en emploi, ni en éducation ni en formation). Nous avons le devoir de les accompagner (non de les assister), ne fût-ce que par humanisme, et cela réclame de la simplification, une autre condition de la transformation durable. Permettre à chacune et chacun de trouver sa voie car il en existe une pour tous: voilà ce qui doit nous motiver, voilà ce qui doit nous guider !
Sambrinvest est-elle partie prenante de ce projet ?
Bien sûr, comme le sont tous les acteurs économiques, sociaux et politiques de Charleroi Métropole. Sambrinvest, moi-même et le directeur général, Grégoire Dupuis, ont parfaitement pris la mesure de l’enjeu: nous devons être la génération qui aide la jeunesse. Nous avons tout pour relever le défi: un cap, des balises, des moyens de financement publics et même des investisseurs privés. Ce dont nous avons impérieusement besoin à présent, c’est de succès. À ce propos, les cinq années à venir seront déterminantes, on ne doit pas se louper !
C’est maintenant ou jamais ?
Exactement ! On ne peut plus se raconter d’histoire, on est dans la période charnière. Nous touchons à ce qui fait l’essence même de l’essor ou du déclin d’une ville. Soyons réalistes: personne dans le monde n’attend Charleroi. Il nous appartient donc de nous remettre nous-mêmes sur la carte. Partenaire du développement, Sambrinvest est par nature un acteur de ce challenge. Nous voulons tout faire pour le réussir.
Vous croyez aux écosystèmes ?
Nous avons de formidables modèles, je pense à l’A6K-E6K qui brasse divers publics: apprenants, chercheurs, PME, multinationales, centres de formation, universités… Ce que nous mettons en place élément par élément à Charleroi Ville Basse avec le centre Dock’in, le Quai 10, le futur hub d’innovation et de formation technologique et numérique, la Manufacture urbaine, l’espace de coliving, c’est ça: un ensemble de projets qui se complètent et font du quartier un endroit où non seulement on travaille, mais où on peut consommer, se divertir, manger, apprendre. Vivre quoi ! La ville est l’écosystème le plus large. Elle doit offrir à tous la possibilité de s’épanouir.