Planification d'urgence à la Ville de Charleroi: un métier méconnu
Stéphanie Legat assure la coordination d'un service qui "prévoit le pire pour l'éviter".
- Publié le 10-08-2022 à 22h00
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Titulaire d’un master en sciences de la Santé Publique à finalité spécialisée en urgences, cette infirmière brevetée a travaillé plus de dix ans au service des urgences du Grand Hôpital de Charleroi (GHdC) avant de rejoindre la Ville de Charleroi, à la succession de Valérie Velghe. Désormais, son job consiste à identifier les risques présents sur le territoire, à établir des plans d’action et à faire collaborer les différents services de secours, sécurité et logistique dans des situations de crise."Son rôle est en quelque sorte celui d’un super-héros de l’ombre, sourit une de ses collègues.Stéphanie tient la baguette de chef d’orchestre. À charge pour elle d’obtenir le meilleur de chacun des intervenants et composantes de l’urgence."
Cette urgence s’articule autour de cinq disciplines indissociables: les secours de première ligne, d’abord. Viennent ensuite les opérations médicales, sanitaires et psychosociales puis le pôle sécurité, avec les services de Police. Le team Discipline 4 porte sur l’appui logistique (acheminer le matériel, mettre en place l’infrastructure et les moyens techniques). Enfin, il y a la communication, le D5. Il s’agit d’informer la population civile et lui transmettre les consignes à respecter, notamment au travers des médias.
"Les risques sont de trois types, explique Stéphanie Legat. Les premiers sont localisés: ce sont par exemple les entreprises Seveso, au nombre de cinq, sur le territoire de Charleroi. Il y a les risques semi-localisés: ce sont les conduites de gaz par exemple, ou le réseau ferroviaire. Il y a enfin les risques non localisés comme les pandémies et les pollutions. En ce moment, il y a la vague de chaleur et les pics d’ozone."
En fonction de chaque cas de figure, un organe est chargé de définir un schéma détaillé d’actions: c’est la cellule de sécurité qui s’y colle. À l’échelon local, cette cellule est présidée par le bourgmestre. Des experts extérieurs sont appelés à y participer."J’interviens pour conseiller l’autorité", précise la coordinatrice.
Aussi sur le pont pour les grands événements
En marge de son travail de planification pour les risques permanents (gares, aéroport, entreprises Seveso, etc), elle s’investit dans l’élaboration de dispositifs événementiels. Exemple: les Fêtes de Wallonie que Charleroi organise au début septembre. Quant aux événements privés comme les concerts, soirées, festivals, les risques sont évalués par la cellule d’analyse des événements. L’identification de ces risques permet de hiérarchiser les priorités, de définir des actions de prévention et un plan opérationnel d’urgence."Au niveau des communes, il existe un plan général qui permet de répondre à un maximum de situations", confie Stéphanie Legat. S’ajoutent les plans particuliers qui ciblent des risques spécifiques.
Cet été, c’est déjà la troisième ou la quatrième fois qu’une alerte fortes chaleurs est activée. Ce n’est pas seulement lié à la montée des températures. Divers indicateurs interviennent dans l’évaluation du centre de crise régional en relation avec les organes locaux."Dès la mi-mai, nous entrons en phase de vigilance, cela pendant quatre mois jusqu’à la mi-septembre. Sur le terrain, nous relayons des conseils de prévention: bien s’hydrater, veiller à se protéger des expositions prolongées. C’est un peu le même message que lors des avis de tempête où nous déconseillons les promenades dans les parcs ou les forêts. Pour les publics les plus fragiles comme les seniors ou les sans domicile fixe, nous travaillons avec les responsables sectoriels: gérants de maisons de repos, direction du relais social."Chacun d’eux est dès lors tenu de relayer l’info auprès de ses usagers.
"Chaque année, des milliers d’avis de sinistres et de situations d’urgence nous sont transmis. Ils émanent des pompiers (incendies, accidents, fuites de gaz, etc.), de la Police (émeutes, meurtres, etc): nous nous attachons aux problématiques collectives."En l’espace de huit mois, la nouvelle coordinatrice de la planification d’urgence a dû se familiariser avec les procédures existantes."Je me suis également attelée à réévaluer en permanence les risques. Dans nos cinq gares de chemin de fer par exemple (Charleroi Sud, Charleroi Ouest, Lodelinsart, Marchienne-au-Pont et Couillet), dans notre aéroport."Menaces d’inondation, de crash aérien, d’explosion, d’effondrement d’un viaduc ou d’un bâtiment: il faut se préparer à faire face au pire dans tous les domaines. Le job impose une bonne gestion de son stress, de l’organisation, de l’intelligence relationnelle, du discernement."Il faut en effet pouvoir différencier une menace d’un vrai risque. Dans ce cadre, nous allons établir un plan particulier pour un accident en lieu clos."
Le choix devrait se porter sur le tunnel Hiernaux du R9 qui passe en dessous du square éponyme. C’est la première fois qu’un tel travail va être réalisé à Charleroi."Il l’a été à Liège pour le tunnel de Cointe. Nous allons pour cela nous entourer d’experts et collaborer avec le SPW qui gère les infrastructures autoroutières", conclut Stéphanie Legat.