«Un trophée», «honteux et scandaleux»: l’avant-projet de la Région vers un rond-point Montgomery à deux bandes et pistes cyclables crispe communes et riverains
La Région bruxelloise a mis sur pied un “avant-projet” pour réaménager l’avenue de Tervueren et vient de débuter les concertations avec les communes concernées. Les réactions fusent déjà.
- Publié le 02-06-2022 à 11h47
- Mis à jour le 02-06-2022 à 11h48
Le répit aura été de courte de durée sur l’avenue de Tervueren. Début novembre éclatait la “bagarre des pistes cyclables” : Etterbeek, lassée d’attendre et opposée au projet de piste “bidirectionnelle” de la Région, a réalisé des pistes cyclables “monodirectionnelles” de part et d’autre de l’avenue. Un passage en force qui a (re)lancé un bras de fer entre commune et région.
Quelques mois plus tard, en mars, c’est le rond-point Montgomery qui a connu un lifting “temporaire” : Bruxelles-Mobilité a supprimé la quatrième bande du titanesque giratoire et réalisé des aménagements cyclables (une piste dans le rond-point, et un anneau extérieur pouvant être emprunté dans les deux sens).
Alors que le test de deux ans de ce rond-point n’est pas encore achevé, les instances régionales mettent déjà sur pied un nouveau plan de réaménagement de l’avenue de Tervueren. Les présentations ont déjà eu lieu auprès des autorités locales des deux Woluwe, et Etterbeek attend son tour.
Deux bandes
Cet “avant-projet” de Bruxelles-Mobilité prévoit un rond-point Montgomery à deux bandes, avec une piste cyclable bidirectionnelle séparée et un “anneau piéton” autour. L’avenue de Tervueren passerait quant à elle de trois à deux bandes. Les latérales seraient “apaisées”, c’est-à-dire débarrassées du trafic de transit grâce à un jeu de sens de circulation. Et enfin, une piste cyclable bidirectionnelle est prévue du côté “sud” (du côté du sens automobile vers Montgomery), et une “voie cyclable” au nord.

“C’est une base de discussion, une esquisse à discuter avec les communes et ensuite avec les riverains. Nous voulons un projet participatif”, insiste le cabinet de la ministre Elke Van den Brandt (Groen).
Ce lundi, la salle de réception de l’hôtel Eurostars Montgomery était pleine, avec une cinquantaine de riverains réunis pour un événement organisé par le comité Tervueren-Montgomery en présence du bourgmestre etterbeekois Vincent De Wolf (MR), du mayeur sanpetrusien Benoît Cerexhe (Les Engagés), et de l’échevin de la Mobilité de Woluwe-Saint-Lambert Gregory Matgen (Défi). Trois communes, trois tendances politiques, qui en apparence forment dans ce dossier un front commun en contrepoids aux instances régionales de tendances écologistes et socialistes.
«Ça ne passera pas chez nous»
“Notre objectif est d’aménager un vrai boulevard urbain, mais en trouvant un équilibre entre les usagers”, réclame le mandataire de Woluwe-Saint-Pierre, qui avec son homologue etterbeekois s’oppose vivement à une piste bidirectionnelle et la suppression du stationnement. “Dans l’état, ce projet ne passera jamais chez nous”, assure l’humaniste, qui salue toutefois l’ouverture du cabinet écologiste en vue de futurs amendements.

Selon le planning de Bruxelles Mobilité, la demande de permis pourrait être introduite en novembre… pour un début des travaux en 2024 et une fin en 2026. “Si on veut un beau projet, ça mettra encore du temps. Il est illusoire d’introduire le permis en novembre 2022”, estime Benoît Cerexhe.
Des plans d’aménagement de l’avenue de Tervueren, il faut dire qu’il y en a eu plus d’un… Pascal Smet (Vooruit) avait en son temps proposé un plan, Etterbeek avait alors riposté en faisant appel à une firme française pour réaliser une étude contrastée… Entre-temps, de l’eau a coulé sous les ponts et les négociations avaient repris avec l’instauration du nouvel exécutif régional… ce qui a même mené à un accord et une conférence de presse commune en juin 2020 avec Elke Van den Brandt et Vincent De Wolf. Mais le climat s’est depuis dégradé. "Bruxelles Mobilité revient avec son plan initial, honteux et scandaleux, d’une piste bidirectionnelle", dénonce le bourgmestre libéral. De son côté, Woluwe-Saint-Lambert n’est pas directement concerné, mais l’échevin Matgen craint "un report de trafic" dans la localité.
«Pour combien de cyclistes?»
Du côté des riverains présents ce lundi, beaucoup de crispation. “On fait tout ça, mais pour combien de cyclistes?”, s’interroge rhétoriquement un habitant. “Bruxelles Mobilité n’est pas à la recherche de solution, mais à la recherche de trophée. Et on va riposter”, assène un aîné de l’avenue de Tervueren.

Conseiller en entreprise et riverain depuis trente ans, Jacques nous fait part de ses vives craintes quant à la perte de stationnement en cas de piste bidirectionnelle. “Où va-t-on mettre les voitures? Il faut garder des places pour les clients, les amis… Nous sommes quatre chez nous, avec quatre voitures. On en a besoin pour travailler… et encore une fois, on tire sur ceux qui travaillent le plus.”
Vu l’ambiance de cette conférence-débat, les consultations prévues par les autorités régionales s’annoncent intenses sur ce que les locaux nomment “la plus belle avenue de Belgique”.