«Plan B Josaphat»: les idées des associations pour ménager friche et logement
Les associations de défense de la friche Josaphat publient un manifeste. Très fouillé, celui-ci propose plusieurs alternatives pour sauvegarder cet espace sauvage tout en produisant tout de même du logement. On résume ce «Plan B Josaphat».
Publié le 29-01-2021 à 13h24
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Les associations de défense de la Friche Josaphat, ce vaste espace rendu à la vie sauvage dans la proximité immédiate du parc du même nom à Schaerbeek, ont rendu public ce 26 janvier un manifeste qui imagine plusieurs pistes alternatives au PAD qui doit redessiner le site. Pour rappel, dans le cadre réglementaire d'un PAD (plan d'aménagement directeur) dédié, la Région bruxelloise prévoit d'y bétonner 24ha de friche le long d'une voie de chemin de fer afin d'ériger à terme quelque 1600 logements. Ce, alors que des milliers d'espèces y ont été recensées en 4 ans par des naturalistes amateurs, riverains et défenseurs du site.
Parmi les signataires du document, on retrouve le BRAL, Natagora, Josaph'Aire, Sauvons La Friche Josaphat, Natuurpunt Brussel, l'ARAU, le collectif «Bas les PAD» et «Sauvons notre parc Avenue des Jardins», ainsi que l'auteur David Van Reybrouck. Ce travail porte le nom de «Plan B Josaphat». «Si le gouvernement bruxellois qui, selon l'accord de gouvernement, veut lutter contre le changement climatique, décide d'imperméabiliser un des derniers espaces de nature à Bruxelles, sans consultation supplémentaire, sans tenir compte de la biodiversité exceptionnelle de ce site et sachant qu'il y a 6.500.000 m2 d'espaces inoccupés à Bruxelles, alors il perd toute crédibilité», lance en exergue Tom Nootens, président du Bral, pour ouvrir cette trentaine de pages très élaborées. Vous pouvez en télécharger l'intégralité du texte en français par ici.
Mais que trouve-t-on dans ce manifeste? En gros, plusieurs pistes orientées chacune vers les préoccupations fondamentales des signataires. Soit tantôt la biodiversité, tantôt le logement abordable, tantôt un urbanisme plus apaisé. En résumé, la piste privilégie par ce «Plan B Josaphat» est de laisser peu ou prou le côté ouest de la voie ferrée à l’état de friche. Il en irait autrement du côté est, aujourd’hui occupé pour partie par des activités industrielles: il s’agirait là de densifier cette zone déjà imperméabilisée, aussi bien en posant de nouveaux bâtiments qu’en rehaussant le bâti existant, afin de faire cohabiter activités productives et logements dans cette mixité de fonctions tant vantée par les autorités bruxelloises.
Moutons ou vaches à l’ouest…
«La partie Ouest de la friche, vu son rôle unique pour la biodiversité, ne peut pas devenir un quartier de plus à urbaniser», plaide le manifeste. «Rien n’est éternel, pas même l’état de la friche si elle reste sauvage. À terme, les arbres prendront le dessus, ce qui rendra le paysage moins diversifié. Il faut garder la friche ouverte. Des solutions d’éco-pâturage extensif, comme faire paître des moutons, des chèvres, des chevaux sauvages ou des vaches Galloway, est un moyen simple de garder ce paysage ouvert et diversifié», expliquent les différentes associations signataires. Qui plaident pour «une réflexion sur les zones accessibles au public, les zones de transition et les zones réservées à la biodiversité».

… et logements à l’est
Pour le côté oriental, le manifeste ne s’oppose pas aux nouveaux logements. Mais escompte rationaliser «la partie est de la friche et la zone industrielle sous-utilisée». Il s’y trouve «un potentiel ignoré dans les plans actuels». En effet, les associations remarquent que «la zone industrielle actuelle est largement imperméabilisée mais beaucoup d’espaces n’y sont pas bâtis». Et de suggérer de maintenir l’industrie en la faisant cohabiter avec «une ferme urbaine ou des installations sportives» car «les fonctions industrielles sont souvent plus conciliables avec la nature sauvage que le logement».
Ce dernier pourrait cependant se construire «au-dessus des activités productives pour densifier la zone industrielle actuelle». À nouveau, des calculs ont été faits qui parient sur un potentiel de «1339 logements possibles sans faire disparaître la Friche et avec une empreinte minimale». Un chiffre qui n’est finalement pas si éloigné de l’objectif de 1600 unités prévues dans le PAD.

Et de terminer en insistant sur le caractère public de la friche: «nous souhaitons que ce terrain reste public, et que 60% des logements construits soient des logements sociaux. Urbaniser ne peut se faire “comme d’habitude”, selon un modèle qui contribue à accentuer la crise socio-environnementale et soutient la construction de logements et bâtiments chers, sans lien avec les besoins réels. Les logements neufs à Bruxelles doivent être abordables, solidaires, circulaires et à emprise au sol réduite».
Ville sur la ville
Mais plus globalement concernant cette problématique du logement, le principe plaidé par le manifeste est celui de «ville sur la ville». Au lieu de se précipiter sur les fameuses «zones de développement prioritaires» définies par le Gouvernement bruxellois, les signataires conseillent d’abord d’investir «l’énorme potentiel de logements inexploité en lieu et place des surfaces de bureaux, dont les espaces vides se multiplient».

À titre d’exemple, le manifeste note ainsi que, dans le voisinage immédiat de la friche, «un examen pointu des environs doit être réalisé». Et de plaider «sur une bien meilleure utilisation du potentiel de l’avenue Léopold III et des installations en transport public déjà présentes». Selon les calculs des riverains, «cela pourrait conduire à la création de pas moins de 1552 foyers. C’est presque autant que ce qui était prévu dans le PAD».