“Ça sent les excréments jusqu’au 5e étage” : le bâtiment 6 du Peterbos a les pieds dans les égouts depuis des mois
Il y a près d’un an, des eaux souillées fuitaient sur les trottoirs du Peterbos. Un an de rejet des responsabilités, au détriment des habitants.
Publié le 21-05-2023 à 17h40
”Inadmissible, intolérable…” depuis plusieurs mois, les habitants du bâtiment 6 du Peterbos à Anderlecht vivent le nez dans les égouts. Les canalisations ont commencé à se boucher puis à déborder via un petit local technique du rez-de-chaussée. Une opération de colmatage a eu lieu avant que les eaux souillées trouvent un autre chemin dans le sol en rejoignant l’air libre sur un large lopin de terre le long de la face nord du bloc de 6 étages. L’odeur est pestilentielle. Le terrain de sport flambant neuf à côté de la fuite est déserté.

Nous rencontrons une dizaine d’habitantes “du 6” lors d’une des premières matinées largement ensoleillées de l’année. À plusieurs mètres de la fuite, et de l’autre côté du bâtiment, le foulard sur le nez est de rigueur. L’odeur difficilement supportable arrive jusqu’au hall d’entrée.

“Ça fait des mois que ça dure (le premier signalement remonte à plus d’un an). Les oiseaux, les chats et les rats qui prolifèrent vont boire cette eau. On a honte d’habiter ici, on n’ose inviter personne”, s’indigne Khalida, du deuxième. Et pour certains, le calvaire remonte jusque dans les logements. Les douches, éviers et toilettes bouchés sont légion sans parler de l’odeur qui se diffuse parfois jusqu’au 5e étage en remontant par les canalisations. “On commence à s’inquiéter pour notre santé”, et l’été, donc les chaleurs, approche à grand pas. “Il faut une intervention maintenant, ça à déjà trop traîné ce n’est plus vivable.”

Un ping-pong nauséabond
L’immeuble de logements sociaux est géré par la Sociétés Immobilières de Service Public (Sisp) Comensia. Son directeur ne répondra que brièvement à nos questions : “l’intervention technique est du ressort de la commune. Nous avons bien évidemment fait remonter l’information.”
Nous entamons donc un petit tour auprès des travaux publics de la commune d’Anderlecht : “une interversion de nettoyage a bien eu lieu mais nous n’avons pas d’information sur une intervention pour la rénovation des canalisations ni de la part de Vivaqua ni du service communal parce que cela appartient à Comensia”. Coincés par les échanges de politesse entre la Sisp et la commune, les habitants restent donc empêtrés dans un filet puant.
Alors que la fuite s’écoule maintenant sur plusieurs dizaines de mètre pour atteindre la rue de l’Agronome, chemin emprunté par beaucoup pour rejoindre l’école, les locataires s’interrogent sur le peu d’estime que leur porte leur bailleur et leur commune. “On paye nos charges, des charges plus élevées que le loyer, et on se retrouve avec ça, explique Martine exaspérée. Et ce n’est pas le seul problème, nous n’avons plus de concierge depuis 3 ou 4 ans, on paye pour cela.” La majorité communale en prend aussi pour son grade. “Ils disent qu’ils défendent les pauvres, j’aimerais bien en voir la preuve ?”

Pour le problème de concierge, Comensia n’apporte pas d’espoir mais se justifie : “C’est un petit bloc, la charge de travail serait trop faible par rapport à ce que cela ferait peser sur les charges des locataires. On a un nettoyeur qui s’occupe de nos bâtiments dont le 6 et qui fait déjà une partie du travail et un tout nouveau pôle de proximité va ouvrir au Peterbos en juin. Il sera accessible une fois par semaine pour les questions d’ordre administratif.” Pas sûr que cela suffise pour convaincre les habitants : “je ne vais plus aux réunions Comensia, cela fait des années qu’on fait remonter des problèmes et rien ne change”, s’agace Martine.
Dépitées mais pas abattues, les habitantes envisagent des manifestations devant les bureaux de Comensia si rien ne change dans les prochains jours. Ni la commune, ni la Sisp n’ont mentionné une prochaine intervention de rénovations. “Tellement indigne.”
