Manifestation des soignants: "Ce n’est plus de la colère, mais de la peur et de la tristesse"
Plusieurs milliers de membres du personnel soignant ont manifesté ce mardi à Bruxelles. Ils réclament de la considération, plutôt que des menaces et sanctions à l’encontre des non-vaccinés.
- Publié le 07-12-2021 à 20h03
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La colère du personnel soignant a grondé, ce mardi, dans les rues de la capitale. Ils étaient environ 3 800 selon la police et 5 000 selon les syndicats à crier leur mécontentement face à ce qu’ils perçoivent comme un profond manque de considération des autorités politiques. L’appel avait été lancé par la CGSP, le Setca, la CNE, le SLFP et la CGSLB, après une série de mobilisations quotidiennes depuis le 26 novembre.
La goutte qui a fait déborder le vase est l’avant-projet de loi du gouvernement fédéral, faisant suite à une décision du Comité de concertation, et qui s’apprête à instaurer l’obligation vaccinale pour le personnel soignant.
Ce texte est censé entrer en vigueur au 1er janvier prochain. L’obligation vaccinale serait alors de mise pour le personnel soignant. Les récalcitrants, eux, pourraient voir leur contrat de travail résilié – ou suspendu, sans salaire, s’ils en font la demande – dès le 1er avril.
Franchement, je n’ai aucun problème avec la vaccination. Mais ce qui est insupportable, ce sont les menaces.
"Franchement, je n'ai aucun problème avec la vaccination. Mais ce qui est insupportable, ce sont les menaces qui planent sur celles et ceux qui ne le feront pas. Ces menaces sont loin d'être anodines", exprimait, au sein du cortège, Valérie, venue avec plusieurs collègues du centre neuropsychiatrique de Dave (Namur).
Elle exprime de la sorte un sentiment partagé parmi les manifestants: après avoir été applaudis et considérés comme des héros, les professionnels de la santé se retrouvent aujourd’hui menacés de licenciement. Du moins, ceux qui n’acceptent pas de se faire vacciner, représentant environ 10% des 600 000 travailleurs du secteur. Et cette mesure intervient dans une période de pénurie, d’épuisement et de grande tension. Tous appellent à une véritable revalorisation du secteur et à une augmentation de l’attractivité de la profession infirmière.

Face aux budgets dégagés par le fédéral, dont 600 millions pour les salaires et les conditions de travail et les 400 millions du Fonds Blouses blanches, le constat est partagé: "Concrètement, on ne voit aucune différence", assurent plusieurs manifestants.
"Ce que je ressens, ce n'est même plus de la colère. C'est de la tristesse et de la peur, parce que vu l'état de la profession, on va faire face à un vrai problème de sécurité pour offrir des soins aux gens", commentait encore Valérie.
"Qui va encore vouloir se lancer dans la profession d'infirmier? Il n'y a encore que des fous comme nous qui acceptent. On est dégoûtées", lançaient Fanny, Caroline, Brigitte et Jessica, du CHR de Mons.

"Je ressens un manque total de considération, témoignait Fabienne, travaillant au CHC Montlégia à Liège. J'ai travaillé en unité Covid au début de la crise, j'ai fait 23 nuits, des heures supplémentaires. On n'était pas vaccinés et on nous envoyait au front. On a travaillé alors qu'on était positifs mais asymptomatiques. Aujourd'hui, on va jeter des gens dehors parce qu'ils ne sont pas vaccinés? C'est comme ça qu'on nous remercie, alors qu'on est déjà en sous-effectifs?", peste-t-elle.
Une note d’espoir
Ce mardi, une délégation syndicale a été entendue par le MR, le PS, Écolo et le CD&V, mais aussi le chef de cabinet du ministre de la Santé, Frank Vandenbroucke (Vooruit). Au final, c’est avec une note d’espoir que les syndicats ont conclu la manifestation. À défaut d’engagements clairs quant au retrait ou au report du projet de loi, ils ont obtenu la garantie de rencontres dans les prochains jours, qui permettront au minimum une concertation.

