Grogne de milliers de policiers: ils crient leur colère chez la ministre, voici leurs revendications
Les représentants du groupe Facebook «Police Unifying Movement» attendent toujours d’être entendus et reçus par le ministre de l’Intérieur. Ce mercredi matin, les policiers mécontents se rassembleront au cabinet ministériel pour faire entendre leur voix.
Publié le 20-10-2021 à 07h00
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Ils sont à bout. Les policiers du pays n’en peuvent plus. La cause de leur colère? Un ras-le-bol concernant leurs conditions de travail, un manque de personnel, ou encore un statut barémique dépassé. Et selon eux, les syndicats ne sont pas assez sensibles à ces revendications. Parallèlement à cette colère policière ainsi exprimée, un groupe d’expression de policiers (et de membres du personnel civil de la police) a été créé sur Facebook: «Police unifying movement». En trois ans, ils sont désormais quelque 17.200 à y avoir adhéré.
Manu Vervier, vous êtes inspecteur principal à la police judiciaire de Liège. Pourquoi avez-vous créé ce groupe?
Le groupe a été créé en septembre 2018, à la suite d’une réunion syndicale qu’on avait au sein de notre unité à Saint-Léonard. On ne se retrouvait pas dans nos quatre syndicats représentatifs. On avait l’impression qu’ils nous laissaient tomber. À l’époque, Jan Jambon, alors ministre de l’Intérieur, voulait modifier le statut médical, et cette annonce a mis le feu aux poudres. Avec mon collègue Steve, on a décidé de faire quelque chose sans les syndicats. D’abord en organisant un rassemblement de 250 personnes sur la place Saint-Lambert pour manifester notre mécontentement. Un jeune collègue m’a ensuite émis l’idée de créer un groupe Facebook, qui a rapidement réuni des milliers de policiers. L’objectif de ce groupe est de défendre notre statut de policier, puisque les syndicats ne mènent pas des actions spécifiques à la police. Cela ne nous intéresse pas de bloquer des routes et d’embêter le citoyen. On veut des actions policières pour montrer notre mécontentement.
Justement, quelles sont vos revendications?
Une revalorisation salariale, une vraie tolérance zéro contre les violences à l’encontre des policiers et que leurs auteurs soient jugés le plus rapidement possible et d’une manière très sévère. Je suis un ancien gendarme et depuis la réforme des polices, on nous détricote notre statut de jour en jour. Tout d’abord, le recul de l’âge de la pension n’est pas normal. Depuis 2014, on n’a pas un âge de pension bien déterminé, c’est un peu au cas par cas. Il y a aussi la problématique de nos barèmes: nous sommes les seuls fonctionnaires dont les barèmes n’ont pas été augmentés depuis 2001. Sans arrêt, on coupe dans le budget de la police. Énormément de zones sont en sous-effectif, et cette situation perdure depuis des années. On ne sait plus travailler convenablement. On constate une hausse de collègues qui partent en période de maladie longue, soit pour burn-out, soit pour avoir été blessé en intervention.
On sent votre ras-le-bol dans la voix...
On en a assez, surtout qu’on ne fait pas un métier comme un autre. Notre profession est un métier pénible, difficile où on est sans arrêt victime de violence et la Justice donne un mauvais signal à la population, ne punissant pas correctement les auteurs d’actes de violence envers les forces de l’ordre. La situation n’est aujourd’hui plus tenable. Et de nouveau, on ne sait pas où sont les syndicats. Ils ne nous défendent pas comme on le souhaiterait. Les collègues sont tellement à bout que les plus anciens n’attendent plus qu’une chose: la pension.
Si le politique ne change pas son fusil d’épaule, il aura la police qu’il mérite: avec des anciens démotivés, des jeunes qui quitteront rapidement le métier...

À vous écouter, le métier de policier n’est donc pas attractif?
Lorsque le métier de policier est pénible et dangereux, non, il n’est plus attractif. Je ne vois pas pourquoi les jeunes seraient attirés par cette profession. Je suis persuadé que si le politique ne change pas son fusil d’épaule, il aura la police qu’il mérite: avec des anciens démotivés, des jeunes qui quitteront rapidement le métier, et restera peut-être l’un ou l’autre jeune rentré par vocation.
Si personne ne devrait nous recevoir, on bloquera l’un ou l’autre carrefour...
En quoi consistera l’action menée ce mercredi matin, devant le cabinet de la ministre de l’Intérieur?
Si on organise cette action, c’est parce qu’on a envoyé sept mails au cabinet de la ministre Annelies Verlinden et on n’a jamais obtenu la moindre réponse. On souhaite, ainsi de la sorte marquer notre ras-le-bol, d’autant qu’on estime ne pas être soutenu par notre hiérarchie. Si tous nos officiers nous soutenaient, le monde politique nous écouterait. On se retrouvera donc au cabinet de la ministre de l’Intérieur, où on a demandé à la rencontrer. Certes cela m’étonnerait qu’elle nous reçoive, mais on sera peut-être reçu par l’un de ses représentants. On lui remettra une lettre comportant nos différentes revendications. Au pire, si personne ne devrait nous recevoir, on bloquera l’un ou l’autre carrefour...