VIDÉOS | L’Avenir en commission du Parlement de la FWB: «l’information appartient aux lecteurs»
C’est la question de la liberté rédactionnelle qui s’est posée ce mardi, au Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Débordant du cadre du seul conflit aux Éditions de l’Avenir.
Jean-Christophe HerminairePublié le 26-03-2019 à 23h04
«Le lock-out ne peut jamais être une option. Je voudrais que la direction en prenne conscience», tance le député MR Olivier Maroy, qui se dit «profondément choqué par la réaction disproportionnée» des dirigeants de L'Avenir. Il parle de la décision prise de couper les accès informatiques aux journalistes du quotidien, en grève début mars.
Ce qui est décrit comme un « lock-out » patronal est au cœur d'une Commission parlementaire de la Fédération Wallonie-Bruxelles, qui s'inquiète pour la liberté de la presse. Une liberté garantie par la Constitution, condition des aides financières octroyées à cette même presse. Les mots sont lourds de sens.
Au Conseil de l’Europe
«C'est un acte gravissime parce qu'il tient de la censure», vient de souligner Ricardo Gutiérrez, le secrétaire général de la Fédération européenne des journalistes. Un acte assez «inédit» pour être inscrit sur la plate-forme d'alerte du Conseil de l'Europe.
Sur 537 violations graves qui y sont épinglées, une seule concerne un lock-out. Celui de L'Avenir. «À ce jour, il n'y a pas de réponse des autorités publiques belges. Je suis un peu surpris de la tiédeur des réactions; des actions auraient pu être prises», poursuit M. Gutiérrez. «La Belgique a pris un engagement à défendre la liberté de la presse. Cela demande aussi des actes.»
Mais du point de vue de la direction de L'Avenir, il n'est pas question de lock-out. Jos Donvil, l'administrateur-délégué des Éditions de l'Avenir, se veut très ferme: «Il n'y a jamais eu de lock-out. Il faut regarder dans le dictionnaire avant d'employer ce mot: on n'a nulle part empêché les travailleurs de travailler. Ils étaient en grève.»
Gréviste de la faim
«C'est comme une personne qui fait la grève de la faim et qui se plaindrait d'avoir été privée de manger», illustre aussi le directeur général, Yves Berlize. «Ce sont les journalistes qui ont décidé de ne pas travailler, en dehors de tout cadre légal.» Il évoque une «grève sauvage». Le mot laisse plus d'un parlementaire perplexe. Syndicats et représentants des journalistes contestent.
«La grève est un droit fondamental des travailleurs», souligne Martine Simonis, la secrétaire générale de l'Association des journalistes (AJP). Qui rappelle qu'après deux jours d'arrêt, les journalistes ont annoncé vouloir reprendre le travail, et qu'ils en ont bien été empêchés. «Il s'agissait d'une reprise en main musclée pour contrôler ce que les journalistes allaient écrire.»
Cassant, le directeur dénonce aussi le coup de force d'un «journal pirate», pour qualifier les quatre pages d'enquête sur l'inaction de Nethys publiées le 16 février par la rédaction de L'Avenir, pages qui avaient fait réagir l'actionnaire du journal. Il voulait éviter que cela se reproduise.
Un «journal pirate»
«Journal pirate». Ce mot-là aussi est puissant de sens. «Il s'agit plutôt de la couverture, très professionnelle, du conflit, où chacun a eu droit à la parole. La ligne de conduite des journalistes a été d'informer le lecteur», réplique Martine Simonis. «L'information n'appartient pas aux patrons de presse. Elle n'appartient pas non plus aux journalistes. Elle appartient aux lecteurs», rappelle de son côté Ricardo Gutiérrez. «Les journalistes, en publiant ces quatre pages, ont défendu la liberté des citoyens.»
«La liberté de la presse est d'abord un droit et un devoir d'informer», souligne aussi Stéphane Hazée, pour Écolo. «Est-ce qu'il y a eu atteinte à la liberté de la presse?, c'est la question. À mon sens, c'est oui. Et il ne me semble pas y avoir de prise de conscience», dit encore Olivier Maroy à l'adresse de la direction de L'Avenir.
Et d'en appeler une seconde fois au ministre Marcourt «garant de la liberté de la presse à ne pas passer l'éponge». Un ministre pas franchement convaincu, d'un point de vue juridique, par le terme «lock-out». Mais qui estime, lui aussi, que la direction de L'Avenir a fait preuve d'une «attitude disproportionnée».
Dans notre première vidéo ci-dessus, la réaction du ministre des médias Jean-Claude Marcourt ainsi que des députés Olivier Maroy et Stéphane Hazée, membres de cette commission.
Dans notre seconde vidéo ci-dessous, la réaction de Jos Donvil, administrateur-délégué des Éditions de l'Avenir (EDA):
Les Éditions de l'Avenir et la liberté de la presse:relisez le débat à la Fédération Wallonie Bruxelles
Voici les auditions complètes des neufs intervenants :
1. Jos Donvil, administrateur délégué des Éditions de L'Avenir (EDA) :
2. Yves Berlize, directeur général des EDA :
3. Philippe Lawson, directeur des rédactions des EDA :
4. Philippe Leruth, représentant de la Société Des Rédacteurs (SDR) des EDA :
5. Olivier Cattelain, Secrétaire permanent du Conseil National des Employés (CNE), en charge des EDA :
6. Thomas Lesire, Secrétaire permanent du Syndicat des Employés, Techniciens et Cadres (SETCA) de la FGTB, en charge des EDA :
7. Martine Simonis, secrétaire générale de l'Association des Journalistes Professionnels (AJP) :
8. Albert Jallet, délégué AJP des EDA :
9. Ricardo Gutierrez, secrétaire général de la Fédération Européenne des Journalistes (FEJ) :
