Ça chauffe à la direction de la commune d'Anderlecht: "Depuis 10 ans, je n'avais jamais subi une telle pression pour retirer un dossier"
Ça chauffe à la direction de la commune bruxelloise d'Anderlecht, et la canicule n'y est pour rien
- Publié le 07-09-2023 à 13h27
- Mis à jour le 07-09-2023 à 13h28
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Que s'est-il passé à Anderlecht, pour avoir contraint le bourgmestre Fabrice Cumps à adresser un courrier de "recadrage" à l'échevine Nadia Kammachi, future tête de liste Écolo-Groen pour 2024?
Pour bien comprendre, il faut rappeler que le collège des bourgmestre et échevins - l'instance dirigeante de la commune - tient ses réunions à huis clos. Et rappeler le rôle essentiel, au sein du collège, du secrétaire communal : outre qu'il prépare les affaires qui lui seront soumises et assiste aux séances, le secrétaire communal est en charge de la rédaction des PV et de la transcription des délibérations et des décisions.
Belle-sœur et harcèlement
Or, depuis (au moins) le 20 juin, la position de l'échevine Kammachi interpelle, au collège communal, par rapport à un certain dossier de harcèlement apparu dans un établissement scolaire, dossier dans lequel semble être impliqué une proche de l'échevine - une belle-sœur - en tant que présidente d'un comité de parents de l'Athénée Bracops-Lambert. L'athénée relève du réseau des écoles de l'enseignement communal d'Anderlecht. Dans cette affaire, la direction de Bracops-Lambert a porté plainte pour harcèlement auprès de l'organisme Mensura. À la suite de quoi une enquête fut ouverte.
L'affaire suivait son cours. Mais le 20 juin, alors que le dossier arrivait au collège, "des accusations graves (furent) émises à l'encontre d'une échevine". Les termes "accusations graves" figurent dans le compte-rendu de la séance.
Selon nos informations toujours, l'échevine Nadia Kammachi se verrait reprocher d'être intervenue auprès du secrétaire communal de telle manière que ce dernier a considéré que son honneur, son intégrité et sa probité étaient mis en cause.
"Pression sur le dossier"
Dans un document interne que la DH a pu lire, le secrétaire communal n'y va pas par quatre chemins : "Depuis dix ans que je suis secrétaire communal, je n'ai jamais subi une telle pression pour retirer un dossier qui a pourtant suivi la procédure légale et a été validé par l'échevin du SIPTT (service interne pour la prévention et la protection au travail). (...) Il est arrivé par le passé que des membres du Collège soient cités dans divers dossiers : jamais aucun n'a réagi de la sorte. (...) En 28 années de carrière, jamais un employeur n'avait mis mon intégrité en cause. (...)
Insistant sur l'importance de l'affaire, le secrétaire communal visiblement outré ajoute : "Je rappelle qu'ici, il ne s'agit pas d'un projet ou d'un budget que l'on négocie, mais bien du bien-être de membres du personnel qui vivent certains comportements comme une agression ".
"Étouffé ?"
À la suite de cela, le bourgmestre Cumps a estimé devoir adresser un courrier de "recadrage" à l'échevine Écolo. Nadia Kammachi a réagi en menaçant de porter plainte. Bien que "ne souhaitant aucunement une escalade de procédures", elle allait réfléchir, avec son avocat, à l'éventualité d'un dépôt de plainte pour diffamation.
"Pression ?" À ce stade, convenons qu'un certain brouillard entoure l'affaire. Que s'est-il passé par rapport à ce dossier de harcèlement sur la directrice de l'Athénée Bracops-Lambert ? Que s'est-il passé, ensuite, par rapport au secrétaire communal qui, connaissant le poids des mots, n'hésite pas à faire état de "pression pour retirer un dossier", à point tel que l'échevine Ecolo s'attirait les foudres au sein de sa propre majorité ?
Chef de file de l'opposition, Gaëtan Van Goidsenhoven (MR) s'inquiète. L'ancien bourgmestre de la commune mauve et blanc interpellera l'actuelle majorité à propos de cette affaire dont il estime qu'il "est devenu vain de vouloir l'étouffer".
"Dans la situation particulièrement difficile au niveau budgétaire, sécuritaire, social, et plus globalement, de qualité de vie, comment le collège d'une commune de cette importance - plus de 120 000 habitants - compte-t-il gérer ces très graves difficultés internes qui, de manière évidente, ont fracturé la confiance entre certains membres de la majorité ainsi qu'entre certains membres du collège et les responsables de l'administration."
A neuf mois des élections, Gaëtan Van Goidsenhoven pose la question : "Au regard des reproches graves adressés au membre du collège incriminé (Mme Kammachi, ndlr), le collège peut-il préciser s'il lui témoigne une confiance claire et unanime ? "
L'échevine Ecolo a réagi
Mme Kammachi a été contactée. Elle a répondu en deux temps.
Le premier, pour dire : "Je ne vois pas du tout ce dont vous me parlez "
Lorsque nous nous montrons plus précis, Mme Kammachi a changé : "Ecoutez, je sens que la campagne est là, on est à un an des élections". Et quand nous lui parlons de ce dossier pour harcèlement à l'Athénée Bracops-Lambert et de la vive réaction choquée du secrétaire communal dénonçant "une pression pour retirer un dossier comme il n'en jamais connue en 28 ans de carrière", l'échevine Ecolo revient à la première réaction : non, elle n'est décidément "au courant de rien", fait-elle. Ce "rien" dont toute la commune parle.