Plusieurs centaines de personnes et des milliers de questions à la cérémonie pour Sourour, décédée la semaine passée dans une cellule de la police
Famille, proches, amis, collègues et sympathisants se sont réunis ce soir devant le commissariat de la police, rue Royale dans le centre de Bruxelles. Bougies, fleurs, larmes et de très nombreuses questions encore en suspens.
Publié le 16-01-2023 à 07h38
Pas un mot, des regards graves et beaucoup de larmes, ce soir le long de la rue Royale dans le centre de Bruxelles. Entre 100 et 200 personnes ont participé à l’hommage organisé pour Sourour Abouda, décédée dans une cellule de la police bruxelloise dans la nuit de mercredi à jeudi dernier. Le moment de recueillement était organisé par l’ASBL qui employait cette Bruxelloise de 40 ans : Présence et Action Culturelles. Bouquets de fleurs et bougies fleurissaient le parvis du siège de la police bruxelloise, entouraient deux photos de la victime comme autant de signes d’affection pendant que la foule, dans un silence pesant et sous une pluie glaciale, gonflait rapidement. À tel point qu’elle empiétait sur l’encombrée rue Royale.
”Je ne préfère pas parler, je suis encore trop émue”, témoigne une collègue en larmes. Sa directrice non plus, ne souhaite pas témoigner. “C’est trop dur pour l’instant”, fond-elle. “Revenez plus tard.” Une autre collègue prend la peine. “On est là pour Sourour. Pour sa famille. On pense très fort à son fils. Sourour est une femme extraordinaire, pleine de convictions. C’était bien plus qu’une collègue, c’était une amie. On ne comprend pas ce qui s’est passé. Cela semble tellement injuste. Ça dépasse l’entendement.”

À l’instar de la famille, les proches ne croient pas à la thèse du suicide avancée par la police hier. “On ne sait pas. C’est le pire. On espère de tout cœur que l’enquête sera menée dans des bonnes conditions. On espère que la famille aura des réponses, qu’elle aura accès aux vidéos pour pouvoir comprendre ce qui s’est passé”, embraye un proche de cette Bruxelloise 40 ans fort connue dans le milieu du militantisme bruxellois.
Sourour Abouda est décédée dans une cellule de la zone de police Bruxelles-Capitale-Ixelles dans la nuit de mercredi à jeudi. Elle avait été interpellée mercredi soir du côté de la place du Châtelain, à Ixelles. La police l’a retrouvée morte le lendemain matin. Au Soir, le parquet de Bruxelles a expliqué que “selon les premiers devoirs d’enquêtes le décès pourrait correspondre à un suicide”. Le service d’aide aux victimes de la zone de police aurait évoqué un étranglement avec son pull.

Cette thèse, la famille de Sourour Abouda ne veut pas l’entendre. À la RTBF, sa sœur a indiqué que “ma sœur n’était pas quelqu’un de suicidaire. Elle avait un fils de 19 ans avec qui elle vivait et qui était tout pour elle. Elle ne l’aurait jamais abandonné”. La famille exige encore que “toute la lumière soit faite sur les circonstances du décès de Sourour. On veut savoir pourquoi il n’y a eu aucune surveillance de notre sœur lorsqu’elle était en cellule. On ira jusqu’au bout”.
Lundi, une autopsie permettra peut-être d’en savoir plus sur les circonstances du décès de Sourour. Tandis que le comité P a ouvert une enquête.
C’est la troisième fois en deux ans qu’une personne incarcérée au 202 de la rue Royale, siège de la police judiciaire fédérale où se trouvent également des cellules de la police de la zone de Bruxelles-Capitale-Ixelles, perd la vie dans des circonstances troubles.
Dans la nuit du 17 au 18 janvier 2021, Ilyes Abbedou – un Algérien de 21 ans – a été retrouvé mort dans une cellule identique à celle de Sourour, du même commissariat de la rue Royale. Il avait été interpellé après avoir été pris en flagrant délit du vol d’une veste dans un centre commercial. Onze mois plus tard, le 13 décembre 2021, Mohamed Amine Berkane (26 ans) perdait lui aussi la vie dans une cellule de la rue Royale. En séjour irrégulier, le jeune homme était suspecté d’avoir commis un vol.
Une troisième personne est décédée cette année 2021 dans la cellule d’un commissariat. Nous étions le 9 janvier. Ibrahima Barrie (23 ans) avait été arrêté alors qu’il filmait la police en intervention. Il a été retrouvé mort dans une cellule de la police de la zone de police Nord.