Nidhi Chaphekar, l’hôtesse indienne de la photo des attentats de Zaventem, se raconte sur CNN
CNN a retrouvé à Bombay Nidhi Chaphekar. Cette hôtesse de l’air est devenue mondialement connue suite au cliché d’elle pris lors des attentats de Zaventem le 22 mars 2016. Pour CNN, elle revient sur ces événements. Et sur cette image qui a, aussi, changé sa vie. Résumé.
- Publié le 12-08-2016 à 16h03
«Le 16 avril, mon mari m’a dit: “ tu sais comment on a su? ” J’ai cru que quelqu’un l’avait mis au courant par téléphone. Il m’a dit: “ Non, ta photo était partout, elle a été publiée dans tous les journaux». Je ne comprenais pas. Ma photo? Il m’a demandé: “ tu voudrais la voir? ” J’ai accepté.
Dans un studio de Bombay au décor sobre, Nidhi Chaphekar, sereine, raconte à CNN les éprouvants moments qui ont émaillé sa vie depuis le basculement abrupt du 22 mars à Bruxelles. Son visage reste marqué, ses mains gantées. Des attentats, cette hôtesse de Jet Airways est devenue un symbole suite à cette photo reprise dans le monde entier. On l’y voit en état de choc, agrippée à la banquette, l’uniforme en lambeaux. Son témoignage est poignant.
Elle ne reconnaît pas son mari
«Je me suis demandé: “ C’était moi? Ces yeux qui demandaient de l’aide. Mon visage, qui était en fait en pleine agonie, dans la douleur. Cette photo montrait tous les aspects, mais pas les apparences d’un être humain. C’était comme si quelqu’un avait trahi».
Nidhi Chaphekar revient ensuite sur les suites de l’attentat du 22 mars pour elle. «J’ai repris conscience le 13 avril. Ils avaient essayé de me réveiller le 30 mars». Elle raconte comment ce jour-là elle a réagi aux voix de ses enfants et comment le médecin a dû mettre fin à l’expérience car elle réagissait trop vite. Ensuite, lorsqu’elle revient finalement à elle le 13 avril, elle ne reconnaît pas son mari. Nidhi Chaphekar raconte ensuite les différentes étapes de sa revalidation, lente, mesurée.
C’est alors que l’hôtesse d’une quarantaine d’années revient sur le 22 mars fatal. Elle se souvient très bien. Certains détails sont très précis. «C’était un jour normal, un jour de vol bien réglé. Avec réveil très matinal, déjeuner et bus depuis l’hôtel. Mon sac était le dernier dans la soute et donc le premier à sortir».
«Woum!»
Elle prend alors les escalators jusqu’au hall des départs, avec les lignes de comptoirs et de check in. «J’ai entendu “ boom ” et j’ai vu de la fumée. Je me suis demandé ce qu’il se passait. J’ai cru d’abord que des faux plafonds s’écroulaient. Ou que des batteries avaient eu une avarie». L’hôtesse raconte sa conversation avec son collègue steward. Elle veut aller aider mais celui-ci conseille d’attendre. «Les gens crient, il y a ce chaos. On sent que quelque chose de bizarre se passe». Elle ne pense pas à l’attentat car «personne ne croit que ça peut lui arriver à lui-même».
C’est le cri de quelqu’un qui la met en mouvement. Elle court. Court. Et se retrouve «près de cette statue avec la main». Et c’est là que survient une autre explosion. «Woum», dit-elle. «Du feu, du bruit, de la lumière, de la chaleur, une boule de feu. c’était comme si quelqu’un m’avait pris pour un ballon de football et j’ai été emportée loin, je ne sais pas où. Et je me suis évanouie». Elle raconte ensuite comment l’urgence de la situation et le souvenir de ses enfants l’ont aidé à survivre. «Mais mes jambes et mes bras ne répondaient plus». Courageuse, cette maman raconte ensuite comment elle ne peut toujours pas comprendre à quel point l’homme est devenu son pire ennemi.
«J’aurais donné ma permission»

Sur la photo elle-même, la journaliste revient sur la réflexion de la rédaction lorsqu’elle l’a reçue. «Pas à cause du corps. Nous avons tous un corps. Mais parce qu’elle pouvait donner l’impression de vous faire perdre une seconde fois tout contrôle, que vous aviez déjà dû perdre suite à l’attaque». Et la journaliste de demander si Nidhi Chaphekar aurait donné sa permission de publier la photo si on la lui avait demandée.
«Je crois que je l’aurais donnée. Peut-être juste la tête», répond-elle. Et elle donne plusieurs raisons, qui peuvent être résumées à la question éternelle de ce que feraient les autres dans pareille situation. Et elle raconte qu’elle a demandé à ses enfants de 10 et 14 ans s’ils étaient gênés par le cliché. Leur réponse est sans appel: «Maman, pas du tout, parce que même là, tu assures toujours».