Les dons alimentaires en Brabant wallon: survol en quatre étapes
Pour offrir des colis alimentaires et des repas à 4€, un gros travail de l’ombre est réalisé par de nombreux bénévoles en Brabant wallon. Survol en quatre étapes, en commençant par le Colruyt de Wavre.
- Publié le 16-03-2022 à 07h02
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Comment s'organise l'aide alimentaire en Brabant wallon? La députée provinciale Isabelle Evrard (PS) a apporté quelques éléments de réponse en organisant ce mercredi des visites de presse auprès de différents acteurs. "On parle souvent de cette problématique et de l'explosion des demandes d'aide alimentaire suite au Covid. À cela s'ajoute la hausse du prix de l'énergie, qui vient renforcer les difficultés ou la précarité", explique la députée en charge de l'économie et l'agriculture, dans la Jeune province.
Première étape, le Colruyt de Wavre. "On retire les marchandises quatre jours avant la date de péremption et on les dépose dans des casiers. Les équipes de la Croix-Rouge viennent les récupérer tous les matins, vers 9 h. C'est une formule efficace et simple, qui fonctionne très bien", indique André Giglio, directeur régional de Colruyt, qui se réjouit de pouvoir ajouter une touche sociale à ses activités professionnelles.
Tous les produits ne sont toutefois pas mis de côté. Pas de pain, pas de viande, pas de poisson, très peu de denrées non périssables. "Ce sont surtout des légumes et des laitages. Tout ce qui est frais. Il n'y a pas de surgelés, ce serait trop compliqué de bien respecter la chaîne du froid. Au total, nous vendons 96 % à 97 % de nos produits et ce qui reste est donné ou valoriser autrement, avec la biométhanisation par exemple."
Les employés scannent les produits sur une application et sont avertis lorsqu’il est temps de donner ce qui n’est plus vendable.
Vers 9 h, des jeunes (et parfois moins jeunes) en décrochage sont accompagnés d'un formateur de l'ASBL Apides. "Ils se rendent aux Colruyt de Grez-Doiceau, Wavre et Ottignies et transportent tout à notre plateforme installée à Grez-Doiceau, explique Michèle de Bellaing, pour la Croix-Rouge. Là, les jeunes effectuent un tri et mettent de côté les légumes qui ne sont pas présentables, par exemple. Enfin, ils les répartissent en organisant une distribution des invendus à Grez-Doiceau, Jodoigne et Louvain-la-Neuve." Quand ces jeunes sont en congé scolaire ou suivent un cours théorique le vendredi, d'autres bénévoles prennent le relais. "Il y a sept ou huit chauffeurs, quatre autres personnes pour trier et trois ou quatre pour la distribution. Sans compter les volontaires de remplacement, lorsqu'il y a des absents."
Un mélange donc de bonne volonté et de compétence qui permet à un public précarisé de mieux se nourrir.

Deuxième étape, Neder-over-Heembeek: la Banque alimentaire Bruxelles-Brabant. Une sorte de grossiste, qui reçoit des dons: de l’industrie alimentaire, de la grande distribution (Colruyt et Delhaize surtout), ainsi que de l’Union européenne et de la criée. Tous ces produits, en grande majorité des denrées non périssables mais aussi des produits d’hygiène, ils les redistribuent gratuitement à différentes associations, donc sans être entrer contact direct avec les bénéficiaires.
Concrètement, une liste des produits disponibles est dressée et les associations cochent ce qu'elles désirent recevoir. Les quantités sont déterminées en fonction du nombre de bénéficiaires. En Brabant wallon, 3 187 bénéficiaires sont ainsi aidés par 22 ASBL: Wavre Solidarité, l'Entraide de Tubize, Saint-Vincent de Paul Waterloo, le CPAS de Villers-la-Ville, l'Ouvre-Boîtes et Soli-Dons à Nivelles, etc. "La liste des associations n'est pas fermée, l'Est du BW est d'ailleurs peu représenté. Nous essayons juste que les zones d'activité de ces associations ne se chevauchent pas, pour bien répartir cette aide", commente Pierre Labouverie, administrateur-délégué de la Banque alimentaire Bruxelles-Brabant.

Troisième étape: la Maison du Peuple de Braine-l'Alleud, qui abrite en semaine le RestO & Compagnie. "Notre resto social a deux grands objectifs. Proposer un bon repas chaud à un prix démocratique, 4€. Mais aussi, établir un contact humain. Les gens viennent ici pour discuter et se rencontrer. Le repas est presque un prétexte", indique Alphonse Putzeys, secrétaire. Avant le Covid, ils étaient entre 50 à 70 à venir manger. Ils ne sont plus que 20 à 30. "Le matin, les bénévoles vont chercher les invendus au Colruyt et cuisinent. Certaines personnes ne savent plus se déplacer, Gino leur apporte donc les repas à domicile", ajoute Eddy Dillien.

Quatrième et dernier arrêt: l'AOP Entraide de Court-Saint-Étienne. Ici, c'est le dernier jeudi du mois que les bénévoles distribuent des colis. "Un colis standard est composé de 3 litres de lait par personne, un ou deux paquets de farine, des spaghettis, du riz, du poulet et des légumes. On y ajoute parfois des tomates-boulettes, du bœuf, de la confiture, du chocolat, ou encore de l'huile d'olive ou d'arachide pour les familles d'origine maghrébine. On donne des céréales, des filets de maquereau et du riz au thon. Sauf pour les Syriens, car c'est ce qu'ils recevaient toujours dans les camps de réfugiés… et ils n'en mangent plus", explique Juliette Collard-Motte.
Le tout, grâce aux dons de la Banque alimentaire Bruxelles-Brabant, les surplus alimentaires de l’Europe, mais aussi des aliments achetés suite aux activités organisées, comme le concert solidarité Gospodi qui se déroulera le 28 mars prochain. Sans parler de l’aide financière de CAP 48, du Lion’s ou de Saint-Vincent de Paul Bruxelles.
"Depuis novembre, sans que nous sachions trop pourquoi, il y a eu moins de demandes. Nous aidons ainsi actuellement 45 familles et il y a actuellement un gros point d’interrogation concernant l’arrivée de réfugiés ukrainiens."
La force de l'association, c'est d'être en mesure de répondre aux besoins très rapidement. "Quand une famille s'inscrit au CPAS, le dossier doit être voté au conseil, ce qui prend un peu de temps. Du coup, les services du CPAS nous préviennent parce qu'ils savent qu'on travaille très vite. On réalise un colis d'urgence, dans les 24 ou les 48 heures. Et ce colis est préparé en concertation avec la personne qui le recevra."
Aucun document officiel n’est demandé aux bénéficiaires
L'autre spécificité, c'est qu'aucun document officiel n'est demandé aux bénéficiaires. "Nous n'en avons pas le droit, nous ne sommes pas des assistants sociaux. Ce n'est qu'un échange oral avec le bénéficiaire, on travaille en confiance." Un aspect qui est tout sauf anodin. Pour la députée Isabelle Evrard, toutes ces associations sont importantes car elles ne s'immiscent pas dans la vie privée des bénéficiaires: "Ceux-ci ont parfois du mal à passer par le CPAS, parce qu'on entre dans leur intimité. C'est déjà difficile de demander un colis alimentaire, cela l'est encore davantage d'être questionné sur sa gestion financière. C'est toute la problématique. Il y a des gens qui, parce qu'ils redoutent ça, ne formulent pas de demande…"