Le jugement dans l’affaire Duferco-Kubla sera prononcé jeudi matin

Le tribunal correctionnel de Bruxelles prononcera jeudi matin à 9h son jugement dans l’affaire Duferco-Kubla.

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 Serge Kubla, ancien ministre régional et ancien bourgmestre de Waterloo.
Serge Kubla, ancien ministre régional et ancien bourgmestre de Waterloo. ©BELGA

Le groupe sidérurgique Duferco, son président, Antonio Gozzi, son directeur, Massimo Croci, et Serge Kubla, ancien ministre wallon de l’Économie et ancien bourgmestre de Waterloo, sont prévenus pour des faits de corruption présumée au Congo, entre 2010 et 2012.

L’enquête dans cette affaire remonte à juin 2014, lors de la disparition au Congo de Stéphane De Witte, un comptable qui travaillait au service du groupe sidérurgique italo-suisse Duferco. Un dossier a été mis à l’instruction pour assassinat et les policiers sont tombés sur le nom de Serge Kubla dans des documents remis par l’ex-épouse de Stéphane De Witte. L’ancien homme politique assurait des missions de consultance pour Duferco, notamment au Congo.

Selon l’enquête, un homme d’affaires français, Daniel Sparza, embauché par l’État congolais, est entré en contact avec Serge Kubla en 2010, parce qu’il cherchait des investisseurs pour une société congolaise de jeux de hasard, la Société nationale de Loterie (Sonal). Par la suite, Duferco a pris la décision d’injecter des fonds dans cette société, le but étant, pour l’entreprise sidérurgique, de se donner les chances d’obtenir des gisements miniers dans ce pays d’Afrique, d’après l’enquête. De Witte avait alors été envoyé au Congo afin de suivre de près les investissements de Duferco.

Une avance de 20 000 sur un montant d’environ 50 000 €

C’est notamment dans ce contexte d’affaires que Serge Kubla a remis une enveloppe contenant une somme de 20 000 euros, dans un hôtel bruxellois, à l’épouse d’Adolphe Muzito, alors Premier ministre congolais. Pour le ministère public, il est alors clairement question de corruption et il s’agissait d’une avance sur un montant bien plus important, d’environ 500 000 euros. D’autres pots-de-vin auraient également été versés à des mandataires de Sonal.

Mais lorsque Serge Kubla a été entendu pour la première fois par les enquêteurs, en octobre 2014, il l’a été en tant que témoin, au sujet de l’assassinat présumé de De Witte. Or, il a été longuement questionné sur ses missions pour Duferco, sur les commissions qu’il percevait pour ce travail – il est question de revenus à hauteur de 240 000 euros par an – et sur sa société, Socagexi, basée à Malte, qui facturait ces services de consultance à Ironet, une filière commerciale de Duferco, basée au Liechtenstein. La défense de Serge Kubla, assurée par Me Denis Bosquet et Me Sabrina Scarna, a vivement critiqué le fait que son client avait donc finalement été interrogé comme suspect de corruption, mais aussi de blanchiment, alors qu’il n’était pas assisté d’un avocat. Pour elle, l’instruction a été totalement viciée, dès le début.

Les enquêteurs ont aussi interrogé l’ancien ministre sur l’absence de convention écrite entre Duferco et lui, relative à ces consultances, et sur le fait qu’ils avaient finalement décidé de "régulariser" leur relation professionnelle un peu plus tard, après que De Witte les a menacés de dévoiler leurs manœuvres au Congo.

Des revenus pas tous déclarés

Les enquêteurs soupçonnaient un faux, mais pour les avocats de l’ex-homme politique, rien de ce qu’il a fait n’était illégal. Les revenus qu’il a perçus correspondaient à un travail réel et le recours à une société basée à l’étranger est licite, ont-ils avancé. Par ailleurs, selon eux, rien ne prouve que cette société était une coquille vide.

Les enquêteurs avaient aussi interrogé l’ancien homme fort de Waterloo au sujet d’un compte qu’il avait ouvert en Suisse, auprès de la banque Pictet, qui avait contenu plus d’un million d’euros, et été vidé régulièrement par des retraits en liquide depuis le Grand-Duché du Luxembourg, via une filiale de cette banque. Devant le tribunal, Kubla a expliqué que cet argent provenait d’activités professionnelles au service de plusieurs entreprises, concédant que ses revenus n’avaient pas tous été déclarés.

Le ministère public a requis une peine de trois ans de prison avec sursis et une amende de 600 000 euros à l’encontre de Serge Kubla et à l’encontre d’Antonio Gozzi. Il a également réclamé une confiscation d’un peu plus d’un million d’euros concernant l’ancien ministre.

Il a par ailleurs requis une peine de deux ans de prison avec sursis et une amende de 400 000 euros à l’encontre de Massimo Croci, et enfin une amende de 960 000 euros à l’encontre de la société Duferco.

Les conseils de Serge Kubla ont plaidé, à titre principal, l’irrecevabilité des poursuites pour violation des droits de la défense, puis, à titre subsidiaire, la prescription pour certaines préventions et l’acquittement pour d’autres. Les conseils d’Antonio Gozzi, Me Michèle Hirsch et Me Morgan Bonneure, ont plaidé la même chose, et celui de Massimo Croci, Me Jean-François Terlinden, a plaidé la prescription.

Quant à la société Duferco, ses conseils, Me Olivier Van Herstraeten et Me Nicolas Houssiau, ont rappelé que le projet d’investissement dans les jeux de hasard au Congo était une décision des actionnaires privés de Duferco, mais pas de la société en tant que personne morale. Ils ont plaidé l’incompétence du tribunal correctionnel bruxellois à juger une société basée en Suisse, ainsi que la prescription des faits.

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