Née à Rixensart, Caroline Baldwin célèbre ses 25 ans avec la sortie de trois bandes dessinées "collector"
L’héroïne des bandes dessinées d’André Taymans est née d’un accident éditorial. L’auteur rixensartois nous a ouvert ses portes pour nous raconter la naissance et la suite des aventures de Caroline Baldwin.
Publié le 02-12-2021 à 09h47
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On ne peut pas se tromper. Quand on entre chez André Taymans, son bureau sent la bande dessinée à plein nez. André s'excuse pour le désordre qui, pour tout amateur de BD, rassemble plutôt toutes les caractéristiques d'une caverne d'Ali Baba, avec de petits et grands trésors disséminés çà et là. Il faut dire qu'en 30 bonnes années de carrière, l'auteur rixensartois a eu le temps de les accumuler, d'autant plus qu'il voyage beaucoup, tout comme son héroïne, Caroline Baldwin, apparue pour la première fois voici 25 ans, le "fruit d'un accident éditorial", raconte André.
C’est cet anniversaire qu’André Taymans et les Éditions du Tiroir entendent célébrer et partager avec les lecteurs avec la publication de trois ouvrages, de l’ancien remis à neuf, du tout neuf et une compilation exceptionnelle (voir ci-dessous). Trois trésors de plus dont le premier date de 1996, année où Caroline Baldwin est apparue.
Caroline séropositive, la série décolle
"J'étais connu comme dessinateur pour enfants et en 1996, j'ai voulu me lancer dans des histoires pour les ados et adultes avec l'histoire d'un astronaute qui déprime et qui finit par se suicider. Moon River est alors prévu comme un one shot mais le rédacteur en chef d'(À Suivre) (NDLR: mensuel BD des Éditions Casterman)voulait une série. Ce que je ne pouvais pas faire avec le personnage principal, un astronaute qui se suicide. On a pris le personnage de la détective, Caroline Baldwin, qui apparaissait dans Moon River, mais je n'étais pas préparé. J'ai dû lui charger la barque pour qu'elle ait un peu plus de consistance."
"Un accident éditorial" qui connaît tout de suite un beau succès avec une détective multiculturelle, de mère québécoise d'origine indienne huronne et de père américain. Après cinq albums, l'auteur se pose des questions: " Que puis-je encore apporter à cette série?"
Cinq albums qui vont s’insérer dans la collection
Nous sommes en 1999 et le fléau qui fait des ravages en cette fin de XXe siècle, c'est le sida, et quelle n'est pas la surprise des lecteurs d'apprendre que Caroline est séropositive dans Angel Rock, le 6e tome de la série.
" Cela suscite la colère de mon éditeur qui craint que tout le monde nous tombe dessus… Au final, même les malades m'ont applaudi et c'est même à ce moment-là que la série a véritablement décollé. Cela m'a même ouvert de nouvelles perspectives."
Aujourd’hui, un auteur, c’est un code-barres dans un listing, tous les rapports humains sont gommés.
Perspectives qui vont le conduire jusqu'en 2020 avec le 19e et dernier album de la série. Au grand mécontentement des fans de la série. Et c'est là, encore une fois, qu'André Taymans fait preuve de génie: "Pendant 25 ans, il y a aussi des albums que j'ai entamés et que je n'ai jamais terminés parce que j'étais parti sur d'autres choses. C'est comme ça qu'au fond de mes tiroirs, j'ai retrouvé cinq embryons d'album et que je me suis décidé à terminer."
Et ces cinq nouveaux volumes vont venir s'intégrer entre les albums déjà publiés, d'où le nom de cette collection "Entre deux" et ce Double dames qui vient de sortir en étant numéroté "entre 16 et 17".
"Cela me permet de respecter l'évolution psychologique de Caroline, et puis, elle a un peu vieilli aussi au fil des années", avoue l'auteur qui en 2012 a pris ses distances vis-à-vis de son éditeur, Casterman: "Il y avait des divergences de vues et je ne me retrouvais plus dans cette façon de travailler." Ce qui explique aussi en partie le trou de cinq ans dans la collection.
Aujourd'hui, les aventures de Caroline Baldwin sont publiées aux Éditions du Tiroir, basées à Braine-l'Alleud, et dont André Taymans est l'un des fondateurs: "Avec mes deux associés, l'idée était de retrouver l'esprit de famille que j'ai connu à mes débuts. Aujourd'hui, un auteur, c'est bien souvent un code-barres dans un listing, tous les rapports humains sont gommés. C'est pour ça que j'en ai eu marre des grosses maisons d'édition."
Auteur, scénariste, André est donc aussi désormais éditeur: " Oui, je m'occupe de tout ce qui est "fabrication" au sein de la maison d'édition."
Une réédition, un nouveau tome et l’intégrale de Caroline Baldwin
Et le travail ne manque pas, d’autant plus que pour fêter les 25 ans de Caroline Baldwin, les Éditions du Tiroir publient trois ouvrages qui pourraient trouver place au pied du sapin:
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La réédition de Moon River, le 1er album de la série Caroline Baldwin paru en 1996, en grand format et en 1 000 exemplaires numérotés et signés.

Un 20e album pour Caroline Baldwin (mais pas le tome 20, comme expliqué plus haut), Double Dames, qui prendra sa place dans la série entre les tomes 16 et 17. Une histoire et un numéro Entre-deux, qui donne donc le nom à la collection.

L’intégrale de Caroline Baldwin qui regroupe 14 récits (19 albums), une brique de 960 pages pour laquelle André Taymans a redécoupé les centaines de pages en chapitres et a retravaillé ce qui graphiquement ne trouvait plus grâce à ses yeux, et a également revu la chromie qui s’était dégradée au fil du temps et des réimpressions.

Comme expliqué ci-joint, au hasard d’un rangement, André est retombé sur un carton contenant les planches entamées en 2012 et avec l’aide de sa fille, il a réécrit l’histoire pour faire tenir les deux points de vue en un album.
"Elle écrit beaucoup sur des blogs et je lui ai demandé d’imaginer la fin de l’histoire. C’était amusant de confronter nos idées et ça donne même envie de continuer dans cette série."
Son fils Henry (15 ans) n’est pas en reste. Lui, c’est le dessin qui le passionne, "et avec lui, j’ai travaillé sur Eden, retour au Monde perdu, publié en 2019. Quand il avait 10 ans, il dessinait les dinosaures, il les connaissait tous et un jour en vacances, il m’a dit: “On ferait bien une histoire ensemble, je ferais les dinosaures et toi les hommes.” C’est une histoire en deux parties et je suis en train de terminer la deuxième."
5 000 BD par an
De là à dire qu’ils vont persévérer dans la bande dessinée, il y a un pas: "C’est compliqué de vivre de la BD aujourd’hui. Il y a 30 ans, il y avait 500 BD qui sortaient par an, il y en a 5 000 aujourd’hui et les libraires doivent faire des choix. Quand un jeune vient me voir, je lui dis de bien réfléchir car aujourd’hui, pour beaucoup, faire de la BD, c’est un hobby, il faut avoir un boulot sur le côté."
www.andrétaymans.com, www.editions-du-tiroir.org