PORTRAIT | Karen De Paduwa: le hors norme lui va si bien
L’actrice Karen De Paduwa sort du registre comique avec «Gelsomina» son premier seule-en-scène, inspiré de «La Strada» de Fellini. Magique.
Publié le 18-05-2019 à 06h06
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Attention, tornade à l’horizon! Son énergie et sa bonne humeur sont tellement contagieuses que personne ne peut y résister. Karen de Paduwa (43 ans), c’est 1 m 27 d’explosivité, de spontanéité, d’humour, de chaleur humaine et de sensibilité. Un personnage. Contrairement à nombre de ses homologues, Karen De Paduwa n’a pas opté pour ce métier afin de vaincre sa timidité, elle ne sait pas ce que c’est.
Installée à Genappe depuis une dizaine d'années, Karen a grandi à Bruxelles (oui, oui, elle est la cousine de Sarah de Paduwa, la présentatrice de la RTBF). Quand elle sort du Conservatoire de Bruxelles en 2002, elle n'a jamais douté qu'elle deviendrait comédienne, et pourtant… «J'ai d'abord étudié la biologie pendant trois ans à l'ULB, mais je me suis terriblement ennuyée. C'est mon cousin qui était au Conservatoire qui m'a poussée à le rejoindre pour faire du théâtre. J'ai heureusement eu un prof, Michel de Warzee, qui a cru en moi et m'a poussée car certains profs me disaient carrément qu'une naine ne travaillerait jamais en Belgique. Je suis sortie en 2002 et je n'ai jamais arrêté de travailler.»
Le milieu théâtral l'a immédiatement accueillie, dans les spectacles pour jeune public, dans des pièces de classiques de Racine, Feydeau. On a aussi pu la voir dans Frankenstein à l'abbaye de Villers-la-Ville, et l'Odyssée au Théâtre royal du Parc, etc. Karen collabore également à l'émission d'humour Le Grand Cactus à la RTBF. Elle a aussi fait quelques incursions au cinéma.
«C'est le plus beau métier du monde! assure-t-elle. Je m'éclate et j'éclate les gens. C'est le seul bonheur vrai dans ce monde qui part en sucette.»
Souvent cantonnée dans des rôles comiques, Karen De Paduwa s'est lancée dans un seule-en-scène où on ne l'attendait pas. «C'est mon premier monologue et en plus, dans un registre plutôt grave et poétique. C'est un gros challenge.»
Dans «Gelsomina», l’autre Karen se révèle
La pièce a été créée en mai de l'année dernière, et l'interprétation de la comédienne en a déjà fait pleurer plus d'un. «À la fin, mon personnage pleure et moi aussi je pleure vraiment. Au début, j'ai eu un peu de mal à mettre la distance entre elle et moi. Mais ma sincérité a fonctionné apparemment. J'ai eu beaucoup de retours positifs et des invitations pour le jouer ailleurs.»
Le texte de Gelsomina est signé Pierrette Dupoyet (1992), et est inspiré du film mythique La Strada (La Route) de Federico Fellini (1954). La Strada, c'est l'histoire de Zampano dans l'Italie miséreuse de l'après-guerre. Ce forain achète pour 10 000 lires la jeune Gelsomina (incarnée dans La Strada par Giulietta Masina) à sa mère. Elle va lui servir de bonne à tout faire et de faire-valoir lors de ses exhibitions. Brutal et insensible, il la traîne dans sa roulotte, lui apprenant le métier à grands coups de gueule, incapable d'admettre qu'il est séduit par la beauté intérieure de cette femme-enfant. Mais Gelsomina est attirée par Il Matto, un funambule gracieux, antithèse de Zampano…
Pour Karen de Paduwa, ce rôle représente un tournant dans sa carrière. Mais ce n'est pas encore assez. «Gelsomina était quand même un rôle pour moi… C'est une femme enfant, une marginale qui évolue dans un univers fantasque… Moi je rêve qu'un metteur en scène ait un jour le cran de m'engager pour un grand rôle classique comme Ophélie ou Roxane. En faisant totalement abstraction de mon physique. Et puisque c'est un rêve, j'aimerais aussi que mon partenaire soit un Apollon en plus!»
«Gelsomina», mise en scène de Nicole Palumbo, avec Karen de Paduwa, le 22 mai à 20 h 30 à Rixensart, au Flétry (avenue des Combattants, 14, Genval) et les 9 et 10 août, au Festival de théâtre de Spa.