Ça construit beaucoup à Ottignies-Louvain-la-Neuve mais la population y augmente très peu
En 10 ans, la construction de 1 786 logements a été autorisée à Ottignies-Louvain-la-Neuve. Mais la population n’a augmenté que de 0,5 %, passant de 31 182 habitants en 2012 à 31 339 en 2022. Explications.
Publié le 13-05-2022 à 06h00
:format(jpg):focal(2243x1505:2253x1495)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/J7A6LABTARB7BKZCSLDV5X5HKU.jpg)
Ces dernières années, les logements, surtout des immeubles à appartements, ont poussé comme des champignons à Ottignies-Louvain-la-Neuve, surtout dans la cité universitaire. Et ce n’est pas qu’une impression.
De 2012 à 2021, la construction de 1786 logements a été autorisée, dont 1454 appartements, soit 81,4% de l’ensemble des logements neufs, selon les chiffres des permis de bâtir publiés par l’Office belge de statistique, Statbel.
C’est d’ailleurs la commune du Brabant wallon où ça construit le plus après Tubize (1800 logements autorisés en 10 ans, dont 1369 appartements) et devant Nivelles (1401) et Wavre (846).
C’est à Ramillies (178), Ittre (188) et Hélécine (208) qu’il y a eu le moins de construction de logements autorisée en 10 ans.
Mais si ça construit fortement à Ottignies-Louvain-la-Neuve, sa population n’a pas suivi: elle n’a augmenté que de 0,5%, passant de 31182 au 1er janvier 2012 à 31339 au 1er janvier 2022. Dans la province, seule La Hulpe a vu une hausse moindre de sa population, étant passée de 7479 habitants en 2012 à 7494 en 2022, soit une augmentation de 0,2%.
À l’inverse, en 10 ans, la population a augmenté de 16,9% à Mont-Saint-Guibert, de 15,3% à Perwez et de 15,1% à Tubize.
Pour comprendre ce constat ottintois paradoxal, nous avons interrogé l’UCLouvain, propriétaire des terrains à Louvain-la-Neuve, d’autant plus qu’elle réalise une étude démographique de la cité universitaire tous les cinq ans.
«Les enfants partent, les parents restent»
"Le constat est assez clair , entame Nicolas Cordier, le responsable du développement urbain et régional de l’UCLouvain. La population vieillit. Avant, elle était très jeune et on reste d’ailleurs toujours sous la moyenne régionale, comme le reste du Brabant wallon. C’est donc normal que la population prenne de l’âge. Mais si les habitants vieillissent, ils restent à Louvain-la-Neuve tandis que leurs enfants partent de la cité universitaire (et s’installent ailleurs vu les prix élevés des logements dans la commune et la province) . Sur le marché secondaire, il y a peu de maisons et d’appartements mis en vente. Donc là où il y avait une famille avec 2-3 enfants, il reste un couple voire parfois une seule personne."
Nicolas Cordier fait aussi remarquer que les constructions ont ralenti sur Louvain-la-Neuve avant de reprendre avec les projets Agora, près de la Grand-Place et Courbevoie, derrière L’esplanade. "Cela a d’ailleurs entraîné une baisse de la population dans la commune."
Après avoir augmenté de 9,3%, passant de 28372 habitants au 1er janvier 2002 à 31011 habitants au 1er janvier 2011, la population a continué sa hausse pour atteindre un pic en 2016 avec 31562 habitants. Elle est ensuite descendue à 31158 en 2021 pour remonter à 31339 habitants en 2022. "Et la hausse va continuer et même s’accélérer avec Athéna-Lauzelle (NDLR: où l’université entend créer écoquartier exemplaire de 1400 logements) ."
Par contre, pour le responsable du développement urbain et régional de l’UCLouvain, le phénomène de la transformation, sans autorisation, de logements unifamiliaux en kots ou colocations où toutes les personnes ne s’y domicilient pas, n’explique pas cette faible hausse de la population. "Il y a eu beaucoup de discussions à ce sujet il y a 5-6 ans, mais ce n’est pas un phénomène généralisé. D’ailleurs l’université garde, via le bail emphytéotique, une possibilité de faire respecter la destination d’un bien."
L’université reste propriétaire des terrains qu’elle cède, pour 99 ans, via un tel bail.
«Le vrai défi» auquel va s’attaquer l’UCLouvain
L’UCLouvain a donc les leviers pour s’attaquer "au vrai défi sur Louvain-la-Neuve: que la deuxième génération de propriétaires soit toujours des jeunes ménages."
Pour les maisons, l’université a toujours mis à disposition des jeunes ménages des terrains à des conditions avantageuses par rapport au prix du marché, souligne Nicolas Cordier. "Maintenant, on doit rendre cette accessibilité durable, en limitant, via le bail emphytéotique, la plus-value à la revente. On le fera sur le site Athéna-Lauzelle et pas uniquement via le Community Land Trust mis en place avec la Ville, même si tous les biens ne seront pas concernés."
«Au niveau des droits concédés, on ne referait pas Courbevoie de la même manière»
En ce qui concerne les appartements, les prix ont atteint des sommets sur Agora – mais le promoteur a dû construire l’extension de la dalle – et Courbevoie. "Les prix sont très élevés, mais les biens restent moins chers qu’à Bruxelles et sont dans les prix de certaines autres communes du Brabant wallon. De plus, les gens achètent à ces prix-là. Mais c’est vrai qu’au niveau des droits concédés, on ne referait pas Courbevoie, dont la décision d’entamer le projet remonte à une quinzaine d’années, de la même manière. Cela vaut aussi pour les maisons des Bruyères."
Et Nicolas Cordier de conclure: "Si on ne met pas d’éléments contraignants, les prix vont continuer à augmenter. Mais il faudra le faire intelligemment. Certes, des personnes ne viendront peut-être pas voyant que la plus-value à la revente de leur bien sera limitée. Mais nous, ce qu’on veut, ce ne sont pas des gens qui visent une plus-value future, mais bien des personnes qui veulent habiter la ville et profiter de son attractivité et de tout ce qu’elle propose. Si l’université est attentive à cela, c’est qu’on entend toujours développer une ville universitaire exemplaire et non pas un campus. "
Dossiers