Le cyclotron de l'UCLouvain, à Louvain-la-Neuve, fête ses 50 ans un peu en avance
L’accélérateur de particules de l’UCLouvain va fêter ses 50 ans. Il teste notamment la résistance des composants appelés à aller dans l’espace.
Publié le 12-10-2021 à 17h11
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Si la première pierre de Louvain-la-Neuve a été posée le 2 février 1971, les équipes de l’UCLouvain avaient entamé, dès 1970, la construction du cyclotron, le premier bâtiment universitaire achevé du site.
Cet accélérateur de particules allait être inauguré au printemps 1972, soit presque 50 ans d'existence. Et si l'université célèbre un peu en avance cet anniversaire, c'est que le cyclotron a été labellisé «site historique» par la société européenne de physique ce mardi. Pourquoi? En décembre 1990, des scientifiques de l'université, de l'ULB et de la KULeuven y ont créé le premier faisceau radioactif au monde pour la recherche. «Ils ont observé et analysé au passage une réaction nucléaire qui se produit dans les étoiles», s'enthousiasme l'UCLouvain.
Le cyclotron est donc un accélérateur de particules. Sa directrice, Nancy Postiau, en explique, de manière simplifiée, le fonctionnement. «On accélère des ions positivement. Comment les générer? On injecte du gaz neutre, comme le xénon, dans une source et on lui arrache des électrons pour le charger positivement. On extrait les ions de la source et on les injecte dans le cyclotron où ils seront accélérés et on générera un faisceau qui, ici, pourra atteindre 1/3 de la vitesse de la lumière.»
Un des trois centres de tests reconnus par l’ESA
Depuis les années 2000, le cyclotron est surtout utilisé dans deux domaines. Tout d'abord pour tester la résistance aux radiations de composants électroniques et de matériaux appelés à aller dans l'espace. « Nous sommes un des trois centres reconnus par l'ESA, l'agence spatiale européenne, pour réaliser ces tests, précise Nancy Postiau. Les deux autres sont en Finlande et en Suisse.»
Et de poursuivre: «On peut créer des faisceaux à partir d'un panel de particules allant du proton (masse 1) au xénon (masse 124). Mais pour les tests des composants, on va du lithium (masse 7) au xénon. Un élément plus léger ira plus profondément dans la matière et inversement. En cas d'éruption solaire, un composant sera bombardé de particules différentes, il est donc intéressant de pouvoir proposer un cocktail d'ions pour les tester.»
Les équipes du CERN viennent aussi régulièrement pour tester, entre autres, l’efficacité de leurs détecteurs dans le cadre notamment de l’amélioration, qui devrait être effective en 2026, de son LHC, le plus grand et le plus puissant accélérateur de particules au monde et qui est installé en Suisse.
En trois-quatre jours, à Louvain-la-Neuve, on peut mettre à l’épreuve ses composants en leur envoyant la quantité de radiations qu’ils subiront pendant 10 ans. Et il est primordial de s’assurer de leur résistance et de voir comment ils vont vieillir car une fois placés, ils seront difficilement accessibles.
Des membranes microporeuses pour le médical
Deuxième domaine d'application: la production de membranes polymères poreuses. «Quand le faisceau rencontre la membrane, il y crée un défaut. Ensuite cette membrane sera traitée chimiquement ce qui fera apparaître les trous. Leur nombre dépendra de l'intensité du faisceau, leur taille du bain chimique. Mais on ne s'occupe pas de ce traitement chimique», indique Nancy Postiau.
Parmi les utilisateurs, il y a la spin off de l'UCLouvain, IT4IP. «On parle de pores très petits, de 30 microns à un centième de micron (NDLR: un cheveu fait généralement une centaine de microns). On utilise notamment nos membranes pour la détection de cellules cancéreuses, explique le directeur de la spin off, Étienne Ferain. Dès qu'une tumeur apparaît, il y a des cellules cancéreuses qui circulent dans le sang. Et même si elles sont rares et petites, on peut les retenir avec nos membranes pour ensuite les analyser. Et on sait combien il est important, dans le traitement d'un cancer, de détecter la maladie précocement.»
En matière médicale, le cyclotron est souvent associé à IBA, car le prototype de cette spin off de l’universitée spécialisée dans la protonthérapie y a été développé.
L'accélérateur de particules fonctionne 24 h sur 24 en semaine. «On sous-traite peu et tant qu'on fait de la maintenance et qu'on lui apporte des améliorations, le cyclotron pourra encore continuer de fonctionner pendant des décennies», conclut sa directrice.